

SAISONS - La lettre de Louisa - âge : 13 ans
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SAISONS - La lettre de Louisa - âge : 13 ans
Chère moi de l’avenir,
En fait, je ne sais pas comment t’appeler (nous appeler car tu es moi ?), mais je veux dire… Je m’embrouille un peu, pardon.
J’écris cette lettre, nous avons 13 ans. C’est encore un samedi soir lourd à porter, j’ai encore l’impression d’en faire trop, d’être trop, suis-je une éternelle exagération sur pattes ?
J’espère qu’en relisant tout ça, tu sauras toi, car je galère pas mal de mon côté. Je ne peux pas demander à Maman, elle ne pense qu’à son voyage au Pérou en ce moment. Et puis, est-ce qu’elle saurait m’aider ? On est bien d’accord que non.
Je ne saisis pas ce qui m’arrive. Ce corps qui change (sans ma permission), ces regards bizarres des autres garçons et mon visage qui se tapisse de boutons, franchement ça m’embarrasse. Et je ne dis rien de ce que je ressens à part à toi, sur ce papier à lettre que j’utilise pour la première fois. Toi, tu ne me jugeras pas, tu as intérêt !
Cette lettre pourrait me faire du bien. Au moins pour ce soir. Ce soir, il me faut un passage à la machine à laver, un car wash, un reboot... N'importe quoi de décrassant, j’aimerais quitter mes pensées, dissoudre celle que je suis. Tous ces changements m'effraient, me déforment, je ne comprends pas mes reflets et quand je me regarde de haut, je vois deux petites collines qui poussent. Deux collines que les garçons ne manquent pas de remarquer, ils parlent si fort...
C'est dégueu.
En ce moment je me fais plein de soucis. Un jour, j’ai l’impression de plaire à V et le suivant, plus du tout. C’est quel genre d’injustice ça ? Est-ce que mon cerveau aussi se déforme, vais-je tomber dans une sorte de folie ? V est tellement timide, peut-être que ça me plaît chez lui... C'est difficile de savoir.
Qu’est-ce qu’on dit déjà sur les amours de jeunesse ? Que ce sont des amourettes, j’entends ça dans toutes les bouches adultes. Toutes sans exception, ont-ils été jeune un jour, c’est à se demander.
Mais là, c’est différent.
Tu vois, le sentiment que j’ai, celui qui m’étreint la gorge et qui étouffe mes nuits, il ne dépend pas d’une personne. C’est comme s’il était plus fort, à lui tout seul, comme si il était déjà là depuis le début, en veille, attendant l’activation première ; mais est-ce que le garçon que je regarde quand le cours m’ennuie l’active ?
Est-ce que c’est V que j’aime, est-ce lui, le pour toujours que j’attends ?
Ça fait beaucoup de questions.
Je n'arrive pas à savoir et aucun livre, aucun film ne m’aide.
Toi, tu sauras. Toi, tu auras l’armada (j'ai appris ce mot en Histoire aujourd'hui, la classe hein), la connaissance, la maturité qui me manquent. Et j’en manque de trop. Tu m’auras vue, de toutes mes morts à mes renaissances, et j’en ai déjà vécues pas mal et dès fois j’en perds le sentiment. Ma puberté me fait vriller.
Tu vois, je ne pense pas à V tout le temps, en fait je ne pense à lui que par moment… Mais mon sentiment me tracasse, je le sens m’ouvrir à autre chose, une nouvelle chose que je ne connais pas.
Je rêve d’un printemps apaisé, j’ai un travail, un mari et ce sentiment.
Dans ce rêve parfait, le sentiment danse avec lui, je ne fais que m’y soumettre.
Lundi, je regarderai V, et je t’invoquerai, tiens-toi prête. Je me concentrerai pour savoir si le sentiment a le rythme de V. Voir si on peut danser ensemble.
Je dois savoir ce que je dois en faire et d’où il vient, car le sentiment me demande de faire autrement, d’aller commencer quelque chose que j’ignore.
Je m’en remets à toi.
Avec toute ma reconnaissance.
La petite toi

