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EXORCISME MENAGER (Première Partie)

EXORCISME MENAGER (Première Partie)

Publicado el 8, jun, 2020 Actualizado 8, jun, 2020 Viajes
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EXORCISME MENAGER (Première Partie)

L’exorcisme est un rituel religieux destiné à expulser une entité spirituelle maléfique qui se serait emparée d'un être animé et, plus rarement, inanimé. On peut appeler cela un démon. Cette pratique est probablement universelle (Wikipédia).
 


«Pourquoi t’as bu le vin de M’sieur L’Curé, mécréant ?» : me cria ma mère en me balançant une torgnole. Tu finiras aux galères, sacripant!
C’est vrai, je l’avoue, dans un moment de grande tentation, j’avais bu le vin de Monsieur Le Curé dans la sacristie. J’avais 12 ans, j’étais enfant de cœur et ne respectais pas grand chose. Mes parents m’avaient mis en pension à 10 ans chez les ‘Mon Père’ en désespoir de cause. Les ‘Mon Père’ avait une méthode pédagogique assez désuète qui consistait essentiellement en calottes et en coups de pieds au cul. Méthode qui rendait les participants têtus et endurants aux coups tout en forgeant une forte personnalité appréciée à l’armée ou dans les ordres mais pas toujours adaptée à la vie en société, surtout actuellement.
Mais attention, je n’ai jamais puisé dans la quête. De toute façon pour 3 boutons de culotte et 2 pièces en aluminium, ça ne valait pas le coup de risquer la damnation éternelle. Je n’ai jamais volé dans les troncs avec une ficelle et un aimant, ni pissé dans le bénitier, ni mangé les hosties qui d’ailleurs faisaient de délicieux biscuits apéritifs avec le petit blanc doux de pays que buvait Monsieur le Curé. J’avais quelques principes, ça m’a sauvé. Et finalement, j’ai pas fini aux galères, mais en Afrique au milieu des crocodiles, des éléphants et des indigènes...comme le personnage d’un livre de Céline. Par la suite, je ne peux pas dire que ma foi s’y soit vraiment épanouie. Je parle, bien sûr, de celle imaginée par les religieux...
 
J’ai écrit la petite histoire suivante en réunissant et compilant toutes un tas de petites anecdotes. C’est donc une fiction qui aurait pu exister et qui dresse un portrait des sectes et églises généralement protestantes qui pullulent du Togo jusqu’en Afrique du Sud.
 
J'essaye d'éviter toute ressemblance avec des lieux, des organismes ou des personnes mais ça devient de plus en plus difficile.
 
      Le prédicateur et prophète Elysée de Dieu Adjoavi regardait d’un air lubrique les jeunes femmes de la chorale évangélique de l’église du «Renouveau spirituel des Saints de l’Espérance» qui se dandinaient en chantant une version africaine de «Dieu est amour» accompagnée par un air de rumba Congolaise.
« J’ai eu une bonne idée de faire cintrer ce nouveau pagne au niveau de la taille, ça met en relief les formes arrondies de nos sœurs en Christ » : pensa-t-il avec satisfaction. Il avait aussi demandé que sur la fesse gauche du vêtement soit imprimée la photo de l’Abbé Pierre et sur la droite celle de Jean Paul II. Ca aussi c’était une bonne idée. Bien qu’il eut longtemps hésité pour choisir qui devait être à droite et qui devait être à gauche.
«Ils ont l’air vivants lorsque nos sœurs dansent et tressautent au rythme de nos cantiques, surtout l’Abbé Pierre avec sa barbiche qui remue en cadence. Ils auraient aimé ça, j’en suis sur.» : Pensa t il alors que les larmes lui venaient aux yeux.
 
Puis il se souvint de ses débuts lorsqu’il sortit avec, en poche, son diplôme de science politique de l’université de Lomtonou. Sans un sous et fragile des reins, il n’avait devant lui que la perspective d’une carrière politique ou religieuse.
La politique l’avait séduit dans un premier temps. Il rêvait de grands pays démocratique comme en Ereb où il est possible, pour un jeune plein d’ambition et faible physiquement, de faire de la politique une profession lucrative à temps plein.
Qu’importe l’orientation politique, l’important était de raconter des balivernes et de fonder son parti.
Surtout avec les élections Erebéennes, tout devenait tellement simple. Cela assurait un job bien payé, pas fatiguant. Il suffisait d’aller au bureau, chez les Belges, une fois par mois et encore, ce n’était même pas obligatoire.
Les médias s’occupaient de vous faire de la publicité et d’expliquer aux citoyens que l’existence des députés Erebéens était pour eux une question de vie ou de mort dans un monde extrêmement dangereux en proie à des prédateurs de toutes sortes. En particuliers les méchants Chinois, les Arabes Musulmans, les Africains envahisseurs et les Américains agressifs, ne parlons pas des Russes dont les vapeurs sulfureuses du Stalinisme remontaient parfois à la surface. Sans oublier le petit jaune, là bas, au fin fond de l’Asie avec ses farces et attrapes, ses pétards et ses fusées qui va bien finir par faire une connerie et mettre le feu à la baraque.
Toute banalité était bonne à prendre pour former son parti, on trouvait, pêle-mêle :
« Le parti de la défense des animaux» ou «Le parti pour la promotion de la langue Espéranto» ou encore «Le parti pour rendre les gens heureux.»
Certains surfaient sur la vague Bobo-écolos comme «Le parti pour fumer tranquillement le pétard.»
«Le parti pour que les noirs et les arabes ne viennent plus manger notre pain quotidien», lui, était en vogue. De l’autre bord, il y avait «Le parti pour que les noirs et les arabes puissent venir, à la nage, manger leur pain tranquillement en Ereb». Celui-ci avait moins d’adhérents mais il avait sa place dans la grande démocratie fraternelle du «donner» et du «recevoir». Enfin surtout du «recevoir» dans le cas des députés Erebéens dont le salaire mirobolant attirait une foule de «Pieds Nickelés» allergiques au travail.
Les saltimbanques, ménestrels, bouffons et autres acteurs en fin de carrière se bousculaient au portillon pour créer leur parti.
Le fait que l’on soit obligé de se contenter de ses émoluments légaux était le véritable talon d’Achille de ce système. Toute tentative d’une petite rétribution «crapuleuse» lors d’un important projet immobilier ou de la reprise d’un des fleurons de l’industrie française par les Chinois (Oui, il en existe encore : «La vache qui rit» par exemple) risquait d’être mal perçue. A moins d’être très habile ou d’avoir des appuis politiques à haut niveau, le risque était certain. Même les emplois fictifs étaient interdits. Alors qu’il y a un manque évidents de candidats pour le poste «d’assistants parlementaires». 
De plus c’était une très bonne solution pour résorber le chômage dans des pays dont le taux de chômeurs atteint les 10% de la population dite active...
Plusieurs milliers d’emplois d’assistants parlementaires, faisaient autant d’emplois sauvés.
Qui osera dire après ça que les hommes politiques manquent d’idées pour améliorer le bonheur social de leur compatriotes.
Les poursuites judiciaires se finissaient souvent par un non lieu, mais malgré tout, il fallait endurer, quelques mois durant, les tracasseries administratives de petits juges procéduriers.
En quand ça tournait vraiment mal, on risquait une sanction administrative et même peut être l’interdiction de se présenter pendant 2 ans.
Le plus terrible dans ces grands pays démocratiques, c’était quand la presse «indépendante» annonçait, au journal télévisé, par le plus grand des hasards et quelques jours avant les élections, que tel ou tel chef de parti avait détourné plusieurs centaines de milliers d’Euros en emplois fictifs. Cela pouvait compromettre une grande carrière politique pendant quelques mois; le temps que le peuple oublie. Mais, heureusement, il oubliait vite.
Quant à la presse, le quatrième pouvoir, il fallait s’en méfier comme de la peste. Leur dangerosité provenait du fait que ces médias manipulaient très habilement l’opinion publique. Grâce à une armée de parleuses (traduction de speakerines), petites sœurs dévouées au pouvoir en place et qui rentrent en propagande comme on rentre en religion, la presse audio-visuelle propageait des informations manipulées en jurant, la main sur le cœur, que ce qu’elle disait n’était que la vérité, toute la vérité.
Cependant, le pays du futur prophète Elysé n’était pas une grande démocratie et à part s’inscrire au parti au pouvoir qui était déjà surpeuplé, il n’y avait pas d’issue.
L’opposition, la vraie, était trop dangereuse et peu lucrative.
Qui plus est, en Afrique, même dans l’opposition, il fallait un minimum de sérieux pour être écouté et ne pas passer pour un farceur qui ne visait que ses propres intérêts financiers.
Elysé avait encore en mémoire tous ces héros anonymes qui avaient fini dans la fosse aux fourmis ou jetés, du haut d’un hélicoptère dans la brousse avec, pour seul parachute, un sac à dos lesté de pierres.
Il lui restait la religion.
Il avait d’abord pensé à faire le Marabout, comme son voisin Sénégalais Mamadou Serigne Dieng dit «Prosper yop la boum». Celui-ci avait une armée de petit «Garibous» (Elèves de l’école Coranique) qu’il envoyait mendier la journée et dont il relevait les compteurs le soir. Pour un investissement minime, quelques boites de sauce tomate vides pour recevoir la monnaie et un salaire constitué de petits paquets de cacahuètes, une banane pour les plus méritants et un coup de pieds au cul pour les mauvais sujets, l’affaire pouvait avoir un très bon rendement mais les rentrées étaient relativement limitées en rapport avec l’investissement.
Il y avait aussi le conseil matrimonial aux amoureux éconduits et la fabrication de fétiches et autres filtres magiques mais les sommes en jeu étaient relativement faibles. Et surtout, certains clients pouvaient se plaindre et demander le retour de leur argent au cas où les résultats se faisaient attendre. Les jeunes fétiches sont tellement capricieux et versatiles de nos jours, on ne peut plus leur faire confiance.
Puis, lui vint à l’esprit de fonder une église protestante et de devenir prédicateur. C’était finalement le moins risqué. Au Togonin, il y avait beaucoup de chrétiens dans le sud, même si la séparation entre Christianisme, Animisme et Vaudou n’est pas toujours très clair. Les Chrétiens n’avaient ils pas aussi leur fétiches en représentant Dieu, Jésus, la Vierge Marie, Satan ou toute une tripoté de Saints et de diablotins avec des noms tous plus bizarres les uns que les autres?
De plus, de nombreux hommes politiques étaient de confession chrétienne. Il serait facile de leur vendre le paradis et même une place à droite du Seigneur lors du jugement dernier. Aucun des clients ne reviendrait se plaindre que la même place ait été vendue plusieurs fois. Ca, c’était un avantage.
Il y avait aussi une rentrée régulière de fond en perspective. Les politiciens corrompus voyaient la possibilité de se racheter moyennant quelques menus offrandes pour les déshérités de la paroisse. Par exemple, à chaque construction de pont, de route ou d’école, sur les commissions que touchaient les décideurs, une petite partie pouvait revenir à l’Eglise pour le salut de leurs âmes. Le Bon Pasteur se chargerait d’intervenir auprès du Tout-Puissant et d’assurer la répartition terrestre.
Les Musulmans ont bien leur pèlerinage à la Mecque, qui leur permet, une fois l’an, d’effacer tout les péchés qu’ils ont commis l’année précédente. Le prophète Elysé allait donner cette chance aux Chrétiens, il allait devenir un grand serviteur du Très Haut et de l’humanité toute entière. Il commençait d’ailleurs à sérieusement penser à la sanctification.
L’idée que les pauvres ne pourraient pas racheter leurs péchés avait, un temps, effleuré Elysé. Il s’était rapidement consolé en se rappelant la parole de Dieu, enfin plutôt celle de l’Evangile :
‘Heureux, vous les pauvres, car le Royaume de Dieu est à vous. Heureux, vous qui avez faim maintenant, car vous serez rassasiés. Heureux, vous qui pleurez maintenant, car vous rirez.
Mais malheur à vous, les riches ! car vous avez votre consolation. Malheur à vous, qui êtes repus maintenant ! car vous aurez faim. Malheur, vous qui riez maintenant ! car vous connaîtrez le deuil et les larmes.’
C’était bien la preuve, une fois de plus, que les vrais malheureux qui ont le plus besoin de la parole de l’Eternel sont les riches. Elysé était là pour aider les riches à s’appauvrir afin qu’il puissent comparaître sans crainte du châtiment divin lors du jugement dernier. C’était sa mission divine.

Puis son regard revint sur les danseuses car Elysé était malgré tout un homme.
«Le pagne de sœur Anne d’Aurey lui va particulièrement bien et contrairement à celles de Dieu, ses voies ne sont pas impénétrables», pensa le Saint Homme en se grattant l’entre-jambe.

L’histoire de sœur Anne d’Aurey était particulièrement dramatique.
Soeur Anne d’Aurey née Safiatou Diallo, vit le jour en Guinée à Labé au Fouta Djalon. Elle était la neuvième enfant d’un riche commerçant qui avait 3 femmes et une vingtaine de rejetons. Lorsqu’elle eut dix sept ans, son père mourut d’un ulcère à l’estomac provoqué par les jérémiades permanentes de ses 3 épouses et les disputes sans fin de sa progéniture.
Certains s’imaginent que la polygamie est une sinécure. Ceux là n’ont qu’à essayer et ils verront bien que la vrai victime dans ce bazar, c’est l’homme. Celui-ci meurt souvent prématurément, usé par les querelles incessantes entre membres de cette grande famille plus ou moins unifiée.
(O! Toi, l’Homme qui n’a qu’une seule femme et deux enfants, imagine un peu si tout ceci était multiplié par quatre - et même par 10 pour les enfants).
A partir de ce moment là, la mère n’arriva plus à nourrir ses rejetons. Safiatou décida alors d’aller à Bamako, au Mali, chercher fortune chez une tante maternelle qui cherchait une petite bonne. La cohabitation avec la parente tourna vite à l’affrontement lorsque celle-ci, un soir qu’elle étaient revenue plus tôt du marché, trouva la bonne et l’oncle dans une position qui ne semblait pas rentrer dans le catalogue des taches ménagères habituelles.
La tante mesurant un mètre quatre vingt et pesant 120kg, cinq minutes après, Safiatou était dans les rues de Djélibougou, avec son petit baluchon, essayant de chercher un coin pour dormir.
Après avoir erré quelques jours dans le quartier de Hippodrome, elle se dirigea vers la rue Princesse puis tourna à droite au bout de la rue. Là, à quelques mètres, comme un phare dans la tempête, que dis je, comme la parole de Dieu chez un désespéré, le «Conakry bar» brillait de tout ses feux. Elle était sauvée. Elle se présenta au patron. Comme elle était grande et de belle prestance, le tenancier lui proposa une place de serveuse :
«Tu n’auras qu’à servir les clients, les faire consommer et tu te paieras avec les pourboires et le ‘reste’. Viens ce soir à 21H, tes collègues t’expliqueront.»
Elle se présenta à son nouveau travail le cœur battant à l’heure prévue.
Elle avait enfin trouvé le souper et un toit pour la nuit.
Les clients appréciaient beaucoup sa gentillesse et son savoir faire et elle pu rapidement subvenir à ses besoins.
A l’époque, vivait en bas de la rue un ancien marin Breton, originaire du Morbihan, nommé Louis Le Benezet. Après avoir navigué tout autour du monde, il avait choisi de s’installer à Bamako.
C’était un habitué du «Conakry» où il venait déguster son whisky-bulle tous les jours à 19H pile. Après le cinquième ou sixième JB-bulle, il s’écriait invariablement :
«Ca ne vaut pas un bon coup de Lambic
Mais c’est tout ce qui y’a sous les tropiques.»
Puis il se levait en riant et dans un bruit de tempête, refermait sa braguette et sortait en rotant car il avait souvent été à Amsterdam et c’est comme ça que les marins font dans le port d’Amsterdam, de Conakry ou d’ailleurs...
Vous pourrez le vérifier aisément sur You tube. En effet, un chanteur très populaire le décrit admirablement bien dans une de ses chansons.
Faute de Batave à ramener en pleine lumière, Il ramena vite Safiatou chez lui. Par nostalgie de son pays Breton, il l’appela rapidement ma petite 'Anne D’Aurey'.
Malheureusement ce bonheur sans tâche ne dura qu’un temps et le marin fut rapatrié pour raison de santé. Malgré les doses massives de whisky-bulle, soit disant bon pour le cœur, il eut de graves problèmes cardiaques et dut se faire implanter des stents dans les artères; ce qui lui valut le surnom de «Scoubidou» que lui donnèrent ses amis du «Tri Martolod», épicerie-bar, tenue par Souazic le Cam à Pleudihen-sur-Rance.
Comme un malheur n’arrive jamais seul, le patron du Conakry décéda en tombant du toit de son établissement alors qu’il colmatait une fuite d’eau qui s’était déclarée juste au-dessus du bar et menaçait l’intégrité physique des bouteilles de Pastis, de vodka et des autres spiritueux.
Suite à ce drame, l’établissement fut fermé et transformé en école maternelle.
Safiatou se retrouva de nouveau seule dans la rue.
Elle se souvint alors d’un de ses anciens clients, Mr Elysé, qui lui avait donné son contact une nuit de grande solitude alors que la mousson faisait rage à l’extérieur. Elle l’appela et par chance il était à Bamako. Celui-ci, ému par le récit de la jeune fille, et en bon homme d’église recueillit cette brebis égarée, d’autant plus que l’agnelle avait moins de 25 ans et était bien vertébrée.
«J’ai besoin d’une assistante pour mes baptêmes, mes conversions et mes exorcismes», lui dit il. Tu devras aussi convaincre certaines de mes ouailles qui sont parfois hésitant pour verser une obole pour le salut de leur âme.
Le prophète Elysé aimait beaucoup les termes, ‘ouailles’, ‘brebis’, ‘agneau’, ‘agnelle’ et tous les mots qui se rapportent plus ou moins au ‘mouton’. En politiques, il y a d’autres termes comme ‘électeurs’, ‘citoyens responsables’, ‘peuple’...
«Mais finalement», pensait Elysé, «cela revient toujours au même».
Un mouton n’est il pas un animal docile, grégaire qui suit toujours le bon Pasteur qui le protèges des loups et sur lequel on peut tondre des années durant la laine sur le dos sans que celui-ci ne s’en aperçoive.
Ils adorait particulièrement la citation de Maupassant :
«Le peuple est un troupeau imbécile, tantôt stupidement patient et tantôt férocement révolté. On lui dit : ‘ amuse-toi.‘ Il s’amuse. On lui dit : ‘Vote pour l’Empereur.’ Il vote pour l’Empereur. Puis, on lui dit : ‘Vote pour la République.’ Et il vote pour la République.»
Il aurait bien rajouter :
«On lui dit : ‘Prie’, il prie, on lui dit : ‘Pleure’, il pleure.»
Mais, se dit Elysé, il ne faut pas cracher dans la soupe et en religion comme en politique, ce sont ces admirables moutons qui nous permettent d’engranger des sommes confortables sans trop nous fatiguer.
«Tu n’as qu’à me rejoindre au temple à 23H pour un entretien.
Cependant, tu devras changer de tenue car le body décolleté, le short ultra court et les talons aiguilles risquent de faire fuir les clients...hups pardon! Les fidèles. Surtout ceux qui viennent avec leur épouse. Nous avons un pagne qui convient à toutes nos sœurs. Il est vert clair, très joli avec des photos de saints imprimées dessus. Mais quand même, viens habillée comme ça ce soir, je te donnerai ton nouvel uniforme.», proposa Elysé.
C’est ainsi que Safiatou Diallo, après un entretien qui se prolongea tard dans la nuit, devint sœur Anne d’Auray. Elle avait choisi ce nom en mémoire de «Scoubidou» qui, elle en était sure, pensait encore à elle en dégustant son verre de limonade là-haut, chez Souazic le Cam, au pays des blancs.
Deux jours après, ils étaient à Lomtonou

Et maintenant, le Pasteur Elysé était là, assis, regardant l’Abbé Pierre et Jean Paul 2 qui avaient l’air de s’amuser follement sur la croupe incendiaire de sa brebis préférée au rythme de «Plus près de Toi, Seigneur» sur une musique de Koffi Olomidé.
« -Prophète Elysé, Prophète Elysé, c’est l’heure de votre prêche, vos fidèles vous attendent.»
« -Chier, merde, qui se permet....», pensa t il.
C’était Madeleine, la petite sœur en Christ juste recrutée qui l’appelait.
« -Oui, mon enfant, j’arrive tout de suite, j’étais justement en train de réfléchir à mon homélie», répondit il en souriant.
 
«Alléluia Mes Soeurs, Alléluia Mes Frère, Dieu est amour.
Errare humanum est perseverare diabolicum. Deus ex machina. Veni, vidi, vici
Vade retro Satanas», dit il en s’élançant sur la scène.
Il ne connaissait pas trop la signification de toutes ces citations mais c’était du Latin et il n’y avait rien de tel pour impressionner un auditoire, surtout que l’on remarquait bien, dans toutes ces phrases, les mots ‘Deus’ et ‘Satanas’.
«Shalom, Paix soit dans le coeur des hommes de bonne volonté» 
Puis il commença sa prêche :
«Vanitas vanitatum, et omnia vanitas, vanité des vanités, et tout est vanité. J’ai élevé des ouvrages magnifiques, j’ai bâti des maisons et j’ai planté des vignes. J’ai possédé des serviteurs et une nombreuse famille, et de grands troupeaux de bœufs et de brebis. J’ai entassé l’argent et l’or, le revenu des rois et des provinces ; j’ai eu des musiciens et des musiciennes... En tout cela je n’ai vu que vanité, affliction d’esprit ; rien de stable sous le soleil disait l’Ecclésiaste.»
«Bon, il ne faut pas que je charge trop car ça pourrait dégoûter mes moutons de gagner de l’argent et il y a un risque pour mon fond de commerce», pensa t il.
.....
Il prêcha 2 heures sur ce thème et lorsque ce fut terminée, il fit appeler sœur Anne d’Aurey.
«Ma sœur, nous avons un exorcisme à faire cet après midi.
(A suivre)

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