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Rencontre d'autrui et culte ?

Rencontre d'autrui et culte ?

Publicado el 23, may., 2020 Actualizado 23, may., 2020 Política
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Rencontre d'autrui et culte ?

Un couple avec trois enfants vit depuis 15 jours sur l'esplanade Compans à Toulouse - Source de la photo

Regardons les appels que ces situations pandémiques lancent aux chrétiens, tout spécialement à ceux qui possèdent un peu de pouvoir

Comment peut-il en être autrement ? L’esprit est bien préoccupé par ladite « après-crise ». J’en parlais déjà le 30 avril.

Les chrétiens catholiques se divisent devant l’attitude à prendre par rapport aux décisions de l’État de ne pas ouvrir les églises pour les rassemblements eucharistiques (la messe) avant début juin. C’est alors que l’on rappelle que l’eucharistie ne se comprend bien que si on lui associe le lavement des pieds qui précède le don du corps et du sang du Christ. Dans le service du frère il y a également communion au Christ Jésus.

Ce matin Robert Divoux a communiqué un article de François Cassingena-Trévedy : “Nous sommes convoqués à la fraternité du désert”.

Fançois est moine bénédictin de l'abbaye de Ligugé (Vienne) ; il est spécialiste de liturgie, grand connaisseur des Pères de l’Église.

Que sera le monde de demain ?

Il importe d’y penser maintenant, car attendre plus tard sera trop tard. Surtout, ne disons pas que Dieu répondra comme par magie aux questions que nous posons. L’économie va mal, le monde va mal, réfléchissons et prenons les moyens d’une bonne gouvernance. Soyons des électeurs conscients des enjeux politiques où le plus pauvre demeure un frère en humanité. Disciples, gardons solidement en mémoire ce passage des Actes des Apôtres : « Tous ceux qui étaient devenus croyants vivaient ensemble, et ils mettaient tout en commun ; ils vendaient leurs propriétés et leurs biens, pour en partager le prix entre tous selon les besoins de chacun. »

500 000 je vous salue Marie

L’évêque de Toulouse a suscité de la colère en comptabilisant les prières pour obtenir l’arrêt de la pandémie.

« Faisons monter 500 000 je vous salue Marie pour œuvrer pour le monde à venir. »

Sur le site du diocèse de Toulouse, écrit Robert, « nous avons tous trouvé un appel à fournir 500 000 “je vous salue Marie” au cours du mois de mai ! Avec compteur à l’appui. Et rapidement j’ai été témoin au téléphone, ou sur internet, de réactions ulcérées. J’ai donc décidé le samedi d’écrire un lettre ouverte ». Cette lettre à l’évêque, Mgr/frère Robert Le Gall, lui est apparu comme une nécessité personnelle tellement il a reçu « des témoignages de gens ulcérés », « des témoignages nombreux de “départs” de chrétiens à la suite de la situation actuelle dans l’église de Toulouse ».

 

Voici cette lettre ouverte

« Tels sont les faits.

Nous sommes un certain nombre à qui ils posent question :

- des questions d’ordre théologique (à soumettre donc en particulier à des théologiens) : une prière – de plus un des "bijoux" dans son domaine – peut-elle être traitée ainsi ? À la quantité ! Que veut-on réaliser ? Créer un rapport de force avec Marie ? N’est-ce pas là une défiguration du dialogue avec elle, une dénaturation de la prière ? Une telle approche ressemble fort à de la magie…

Il nous revient à la mémoire ces deux passages de l’évangile :

« Quand vous priez, ne rabâchez pas comme les païens ; ils s’imaginent que c’est à force de paroles qu’ils se feront exaucer. Ne leur ressemblez donc pas, car votre Père sait ce dont vous avez besoin, avant que vous le lui demandiez. » (Mt 6,7-8)

« Il ne suffit pas de me dire : Seigneur, Seigneur ! pour entrer dans le Royaume des cieux ; il faut faire la volonté de mon Père qui est aux cieux. » (Mt 7,21)

 

- Cette invitation sur le site diocésain pose aussi des questions d’ordre pastoral :

La prière fait partie de notre vie de chrétiens, et une fois de plus le site diocésain nous y invite. Nous ne contestons pas la légitimité de ces appels (les célébrations, les pèlerinages, le temps liturgique, les adorations, les méditations, etc.), mais encore faut-il qu’ils concernent un culte "en vérité".

Car la vie chrétienne a une autre composante du même niveau (Mt 22,39) : l’amour du prochain. Qui se déploie dans de très nombreuses dimensions : personnelles, familiales, amicales, relationnelles, sociales, politiques… Or ce domaine n’est pratiquement jamais mis en évidence dans ce que nous lisons sur le site du diocèse, l’action personnelle ou/et collective dans le réel de la vie n’est jamais promue avec réalisme.

Un signe : dans la communication du diocèse, les images pieuses ne manquent pas ! Des hommes et des femmes, des religieuses et des religieux… toujours souriants, toujours contents… il y en a. Mais le concret des personnes mal logées ou pas logées du tout, des sans ressource ou des petites ressources (à la ville comme à la campagne), des immigrants en difficulté, etc. (on pourrait faire une longue liste !) on ne le trouve pratiquement pas ; l’illustration de ces catégories qui constituent pourtant une grande partie de la population est quasiment absente.

On ne trouve pas non plus de réflexion, à la lumière de l’Évangile, sur les appels que ces situations lancent aux chrétiens, tout spécialement à ceux qui possèdent un peu de pouvoir, pouvoir que donne l’argent, et/ou la situation sociale, et/ou certaines cultures acquises au cours de sa vie – pensons à l’École, mais aussi à la vie militante, etc. (nous faisons d’ailleurs partie de ces groupes !). L’appel à réfléchir évangéliquement sur l’utilisation de ce pouvoir nous ne le trouvons nulle part mis en avant au plan diocésain.

En focalisant quasiment tout sur le culte, notre diocèse semble s’être enfermé sur lui-même, sur une recherche d’un retour au passé.

Dans le journal LA CROIX du 2 mai Isabelle de Gaulmyn, rédactrice en chef, pose la question :

« …l’absence de célébration liturgique épuise-t-elle toute la foi ? La période que nous venons de vivre prouve bien l’inverse : nous nous sommes sentis en communion, sans communier. Elle peut aussi nous inciter à revoir notre compréhension de l’Eucharistie, qui, comme l’écrit Anne Lécu, est aussi le service d’autrui (Ceci est mon corps, d’Anne Lécu, éd. du Cerf).

Profitons de ce moment exceptionnel, le kairos, comme l’écrit dans un magnifique texte le père Tomás Halik , théologien tchèque (« Les églises fermées, un signe de Dieu ? » sur : lavie.fr), pour voir ce à quoi notre foi a été renvoyée durant ce confinement, avec l’impossibilité d’assemblée dominicale

…plutôt que de se battre pour déconfiner les messes, ne vaudrait-il pas mieux se battre pour déconfiner Dieu lui-même, et le sortir d’églises parfois trop fermées ?

 

Avec nos respectueuses et fraternelles salutations ».

 

Se préparer à ce que demain ne soit pas comme hier.

Je pense actuellement qu’avec ce regard spirituel, religieux, pour compléter la dimension ecclésiale, il me faudrait écrire un texte qui prenne radicalement en compte la dimension politique et économique. Quelle vie voulons-nous au quotidien ? Quels témoignages les disciples du Christ doivent-ils donner au monde enlisé dans l’économisme libéral ?

 

J'apporte une mise à jour ce vendredi 8 mai

Tous les évêques ne s'exprime pas de la même façon. Alain Planet, de Carcassonne, écrit : "Le gouvernement vient de nous annoncer que le culte, en dehors des funérailles, ne reprendra pas avant le 2 juin. Il s’est trouvé des voix, certaines vénérables, pour aussitôt crier à la violation de la liberté de culte ou même à la liberté religieuse. Ce n’est pas mon point de vue.

Dans la Tradition catholique, les gouvernements, quelles que soient leurs limites, ont reçu de Dieu la charge de rechercher le bien commun. En ce moment, dans le monde, ils ont le redoutable devoir d’assurer une reprise économique et pourtant de préserver la santé publique".

À lire ici. 

Mgr Planet parle ce "reprise de l'économie". J'estime qu'il est profondément regrettable qu'aucune invitation ne soit faite pour interroger cette économie. La politique libérale n'est-elle pas en cause dans cette pandémie ? Pour que le monde "d'après" ne soit pas comme celui "d'avant" n'y a-t-il pas remettre en cause l'économisme globale ? Un débat de type synode paroissiale ou diocésain serait vraiment utile pour que les chrétiens puissent se situer, au nom de l'Évangile, dans le Monde où ils vivent. 

 

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