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Collapsologues : scientifiques ou charlatans ?

Collapsologues : scientifiques ou charlatans ?

Publicado el 28, ago., 2019 Actualizado 25, sept., 2020 Medioambiente
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Collapsologues : scientifiques ou charlatans ?

La collapsologie, en voilà un terme qui effraie. Et pour cause, ce terme apparu en 2015 signifie l’étude de l’effondrement des civilisations. Alliant de nombreuses disciplines, de l’anthropologie au droit, de la biophysique à l’archéologie, les collapsologues tentent de prédire par diverses analyses l’effondrement de nos sociétés. Mais souvent décriés, qui sont ses collapsologues et leurs conclusions sont-elles réalistes ?

 

Quand notre civilisation s’effondrera-t-elle ? De quelle façon ? Quelles en seront les causes ? Voici des questions auxquelles les collapsologues essaient de répondre. Ce terme de collapsologie est un néologisme inventé par Pablo Servigne, ingénieur agronome, et Raphaël Stevens, expert en résilience des systèmes socio-écologiques. C’est en 2015 qu’ils publient leur essai, Comment tout peut s’effondrer. Petit manuel de collapsologie à l’usage des générations présentes. Avec ce livre ils portent à la connaissance des francophones une thématique déjà étudiée par le passé comme dans le rapport Meadows en 1972 ou par Jared Diamond en 2005.

 

 

De nombreux mouvements de pensés composent les collapsologues. Il y a même presque autant de théorie que d’études sur ce sujet. Le postulat de départ, le nombre de variables prises en compte ou encore les modèles de prédictions diffèrent drastiquement suivant les cas, et les résultats qui en découlent aussi. Alors quelle théorie doit-on croire ? Et à quoi va ressembler cet effondrement ?

 

Pour le caractériser, les collapsologues reprennent la définition de l’ancien ministre de l’Environnement Yves Cochet : un « processus irréversible à l’issue duquel les besoins de base (eau, alimentation, logement, etc.) ne seront plus fournis à une majorité de la population par des services encadrés par la loi ». Cela semble peu envisageable de notre point de vue privilégié. Mais il ne faut pas oublier qu’en 2017, quelque 2,1 milliards de personnes, soit 30 % de la population mondiale, n’avait toujours pas accès à des services d’alimentation domestique en eau potable et 4,4 milliards, soit 60 %, ne disposent pas de services d’assainissement gérés en toute sécurité, d’après un rapport commun de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et de l’UNICEF.

 

Certaines grandes villes mondiales sont d’ailleurs déjà sous pression, le jour ou l’apport en eau courante ne sera plus assuré approchant dangereusement. Cet événement est appelé le «Jour 0». Imaginez que vous ouvriez votre robinet ... et rien ne sort. C’est ce qu risque de voir arriver les habitants de Chennai (anciennement Madras), São Paulo ou encore le Cap. À elles-seules, ces trois métropoles regroupent plus de 21 millions d’habitants. Mais ce sont loin d’être les seules. Des problématiques similaires sont à prévoir dans des villes telles que Los Angeles, Marrakech, Melbourne, Pékin, New Delhi, Mexico et même Madrid. D’après l’Institut des Ressources Mondiales ( WRI), ce n’est pas moins d’un quart de la population mondiale qui risque d’être touchée par ce phénomène. Ce sont 17 pays en crise, auxquels il faut ajouter 27 autres pays, dont plusieurs européens, figurant sur la liste des pays présentant une "pénurie hydrique élevée". En France aussi les restrictions d’eau se multiplient chaque été afin de protéger les nappes phréatiques.

 

 

Une autre organisation fait souvent la une des journaux avec ses rapports : le GIEC. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat est chargé de synthétiser l’état des connaissances scientifiques sur le changement climatique. Cet organisme a un rôle central, mais il est mal connu et souffre de nombreuses critiques sur son fonctionnement ou ses rapports.

 

Une des idées reçues les plus répandues au sujet du GIEC est que celui-ci fonctionnerait comme un groupe fermé, en vase clos, empêchant la contradiction et les discussions d’émerger lors du processus de rédaction des rapports. Ce processus d’écriture est au contraire ouvert, transparent, et implique un grand nombre de contributeurs. Ce ne sont pas moins de 195 gouvernements qui participent à ce processus et plus de 2500 scientifiques spécialisés dans les domaines traités ont collaborés à la rédaction des différents rapports. Et depuis ça création en 1988, ce sont 5 rapports majeurs, et de nombreux autres plus ciblés qu’ont publiés le GIEC. Ces rapports sont extrêmement complets, celui de 2014 synthétise pour information plus de 9200 études menés dans le monde entier.

 

J’essaie de vous montrer ici le sérieux de cet organisme car de nombreuses critiques s’élèvent à l’encontre de leurs publications. Rapport truffés d’erreurs, influence de la politique ou même manipulation des données climatiques , nombreux sont ceux à mettre en doute leurs résultats. Et s’il est vrai qu’il y a eu des erreurs et des approximations dans certaines parties de certains rapports, elles ont étés non seulement corrigées, mais ne concerne qu’une infime partie des travaux. Pourquoi alors ne prenons-nous pas plus en compte leurs résultats ?

 

 

Il est vrai que nombre d’actions et de projets ont découlées de ces rapports, et pourtant de plus en plus de gouvernements, alors qu’ils ont validés ces études, décident de ne pas en tenir compte. On peut bien sûr citer le climatosceptique J. Bolsonaro, président brésilien, et sa politique sur l’Amazonie ou encore Donald Trump, se moquant du réchauffement climatique après des froids tardifs aux États-Unis. Mais une partie du problème vient de chacun d’entre nous, et de la difficulté d’accepter de telles données. En effet, tous les rapports du GIEC se font de plus en plus alarmistes et pressant : nous sommes sur une très mauvaise pente. Et si nous ne réagissons pas, le rythme risque de s’emballer, et cela n’augure rien de bon.

 

Ceux-ci ne sont pas les seuls a tirer la sonnette d’alarme ! Selon un rapport publié en mars 2019 par l’OIT, plus de la moitié de la population mondiale n'a pas accès aux soins de santé essentiel. Et si vous pensez que parce que vous vivez dans un pays riche vous ne serez pas touché, voici quelques informations moins réjouissantes. Vous avez sans doute déjà entendu parlé des terres rares. Ce sont 17 éléments qui sont, du moins pour l’instant, indispensables à la fabrication des éléments suivants :

 

  • les téléphones portables, les tablettes et autres équipements à écrans tactiles,
  • les ordinateurs (notamment pour leurs caméras, écrans et disques durs),
  • les écrans LCD et plasma (yttrium + europium pour la couleur rouge, europium pour le bleu et terbium pour le vert),
  • les appareils photos et les caméras,
  • les batteries (7 % en masse : soit 1 g pour une batterie AAA, 1 à 2 kg pour un véhicule normal ou encore 12 à 15 kg pour un véhicule hybride tel que le modèle Prius de Toyota).

 

 

Selon le JRC, centre de recherche commune européen, huit métaux sont classés "à haut risque" de pénurie à l’horizon 2020-2030. Six d’entre eux sont des terres rares, indispensables notamment à la miniaturisation de technologies "préoccupantes". Un arrêt de la production de nouvelles technologie ne serai-t-il pas un effondrement partiel de nos systèmes occidentaux ? Certaines mesures ont étés mises en place afin d’augmenter la recherche pour le remplacement de ces éléments, ainsi qu pour un recyclage plus efficace.

 

Malgré ces signaux, de nombreuses personnes considèrent les collapsologues comme des «alarmistes», des charlatans. Ils sont mis en cause sur leur vision du monde bien trop pessimiste. Il faut alors comprendre qu’il y a en effet beaucoup de gens prétextant la collapsologie pour vendre des écrits vagues aux sources douteuses en jouant sur les peurs, telles que les guerres de civilisations ou une catastrophe planétaire soudaine. L’autre problème est le terme même d’effondrement. C’est en effet un mot qui fait peur. Qu’est ce que cela représente pour l’humanité ? À partir de quels critères définit-on que notre société est en train de s’effondrer ou non. Enfin il y a ceux qui ont une foi illimité en notre potentiel à pouvoir gérer tout cela. Le président Ronald Reagan avait répondu lors d'un discours à l'université de Caroline du Sud en 1983 : « Il n'y a pas de limite à la croissance, car il n'y a pas de limite à l'intelligence humaine, à son imagination et à ses prodiges ».

 

Il et vrai qu’on ne sait pas ce qu’elle sera la situation exacte dans dix, cinquante ou cent ans. Mais j’aimerai vous proposer d’imaginer à quoi ressemblera notre avenir, de façon simplifier du moins. Prenons une approche qui étudie l’évolution du système dans son ensemble. Dans ses recherches Arthur Keller, consultant et conférencier sur les questions d’énergie, de climat et de transition écologique et ingénieur de formation, définit quatre types d’imaginaires différents :

 

 

  1. Les Illimitistes :

Pour cette première catégorie il existe deux sous mouvements. Soit la Terre possède une capacité infinie à générer des ressources et à absorber nos déchets, soit nous serons en mesure de repousser cette limite indéfiniment au fur et à mesure de notre croissance.

Mais comment une planète qui est physiquement un monde fini pourrai-t-elle avoir un potentiel infini de production ?

 

  1. Les Soutenabilistes :

Deuxième catégorie et deuxième imaginaire. Notre quantité de production et de croissance n’a pas encore dépassé la limite que la Terre peut soutenir, et nous arriverons à conserver l’équilibre en s’approchant au plus proche sans la dépasser.

Sauf que nous savons depuis les années 70 que nous sommes déjà au dessus de cette limite et que nous consommons plus de ressources que la Terre n’en produit. Il y a d’ailleurs un jour spécial pour ça et qui s’appelle le jour du dépassement : le jour dans l’année ou nous avons dépassé les ressources produites en un an et consommons les réserves non renouvelable de notre planète. En 2019, c’était le 29 Juillet, soit deux moi plus tôt qu’en 1999.

 

  1. Les Décroissants

Non seulement nous sommes au dessus de la limite de la bio-capacité terrestre, mais celle-ci commence à décroître dans différents domaines. On peut citer l’exemple des stocks de pêche qui s’amoindrissent, ou de la productivité des sols qui diminue à cause de la surexploitation. Le troisième imaginaire est donc celui de la décroissance. Il va falloir d’une façon ou d’une autre décroître, afin de revenir à un équilibre entre les humains et leur habitat. C’est une façon d’envisager un avenir stable et durable.

Cet imaginaire possède une autre déclinaison : nous pourrons faire décroître l’empreinte écologique de l’humanité, tout en poursuivant une croissance économique. C’est sans doute l’imaginaire dominant aujourd’hui, mais qui n’est basé sur aucune donnée scientifique (cela ne s’est jamais produit par le passé), mais bien sur la foi en l’humanité et dans les nouvelles technologies. C’est sur cet imaginaire que sont menées toutes les politiques écologiques actuelles. Mais n’est ce pas simplement pour soulager notre conscience ?

 

  1. Les Effondristes

Nous puisons aujourd’hui plus de ressources que la Terre ne peut en générer. Tôt ou tard des pénuries vont apparaître et se multiplier. Si nous n’avons rien fait pour améliorer notre mode de vie (et même si nous le faisons il est sans doute trop tard), il risque d’y avoir des crises majeures dans de très nombreuses zones du globe. Voici le quatrième imaginaire. Un effondrement de notre mode de vie plus ou moins rapide suivant les scénari. Dans combien de temps ? Impossible d’en être certain. Pour certains nous sommes déjà en plein dedans : il n’y a qu’à regarder l’effondrement de la biodiversité. Quoi qu’il en soit cela finira toujours par arriver car c’est une des loi fondamentale de la physique, tout système retourne toujours à l’équilibre. Reste à savoir ce que l’on va faire pour s’y préparer, afin d’éviter une décroissance trop violente.

 

J’espère que vous aurez pris conscience de quelques enjeux et que cela ne vous aura pas (trop) démoralisé, ce n’était vraiment pas mon but.

 

P.S. : Pour ceux qui pensent que partir sur mars nous sauvera, le jour ou l’on pourra vivre dans un environnement aussi hostile c’est qu’il sera bien plus simple de survivre sur Terre avec les mêmes technologies qui sont censées nous aider.

P.S.² : A quel imaginaire vous identifiez-vous ? N’hésitez pas à liker/commenter/partager si cet article vous à fait réfléchir ou s’il vous semble utile de le faire.

 

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