O comme otite!
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O comme otite!
C’est l’inflammation de l’oreille.
Ce terme regroupe un nombre important de modifications de l’oreille allant d’un phénomène aigu et douloureux au phénomène chronique avec parfois des lésions séquellaires retrouvées, en passant par des phénomènes subaigus avec douleurs d’intensité variable évoluant sur le long terme.
On mettra à part l’otite externe qui est l’inflammation - parfois intensément douloureuse en cas d’eczéma – du conduit auditif externe (cf Doc’s proplug).
Ce mot récent date du début du XIXe siècle, date à laquelle on cherchera à classer ces affections en distinguant les formes douloureuses de celles qui ne l’étaient pas.
Dès 1804 le docteur Alard sera le premier à évoquer l’otite moyenne aiguë catarrhale, précisant que si l’on parle communément d’abcès de l’oreille quand il y a rétention dans la caisse, le liquide ramené (par paracentèse) n’est pas toujours du pus, mais parfois du mucus, en raison de l’oblitération de la trompe (d’Eustache).
Itard en 1821 dira : les deux nuances catarrhales et purulentes ne diffèrent guère l’une de l’autre que par l’intensité des symptômes…
Ces otites touchent essentiellement l’enfant et beaucoup de parents ont été confrontés à ces deux formes d’atteinte de l’oreille.
Mais si distinction il y a sur le papier et sur le comportement de l’enfant qui, dans un cas souffre et dans l’autre ne se plaint de rien, mais entend mal, cette nuance est artificielle.
Dans les deux cas, nous nous trouvons confrontés à un dysfonctionnement chronique de la trompe d’Eustache qui équilibre les pressions dans la caisse de l’oreille.
C’est cette trompe (ce canal) qui relie l’arrière-nez à la caisse s’ouvrant parfois mal en avion lorsque celui-ci se pose, créant une vive douleur d’oreille.
Pourquoi l’enfant est-il fréquemment concerné par ces deux formes d'otites ?
L’arrière-nez de l’enfant abrite un organe lymphoïde (comme l’amygdale) intervenant dans la défense de l’organisme, utile chez l’enfant qui s’immunise contre les germes les plus communément rencontrés.
Mais il arrive que ce tissu se développe de manière excessive et constitue un foyer infectieux chronique. Ces végétations, par leur taille et leur accumulation de pus, vont gêner l’ouverture de la trompe (orifice tout proche) ou faciliter la propagation de l’infection - via le canal - vers l’oreille, déterminant les otites. D’autant plus aisément que la trompe de l’enfant n’est pas encore développée. Elle est petite, large, horizontale…
L’ablation de ces végétations adénoïdes diminue la fréquence des otites aigües et constitue aussi le premier temps de traitement des otites séreuses (perte d’audition isolée liée à la glue derrière le tympan) avant la pose parfois nécessaire des yoyos… (Aérateurs trans – tympaniques).
Mais docteur, on (le médecin parfois, le gardien d’immeuble plus souvent ou l’ami bien intentionné qui sait…) me dit qu’il ne faut pas opérer les végétations, car c’est utile !
Dans ces cas-là, c’est surtout utile pour entretenir l’infection !
Un filtre de voiture se change lorsqu’il est sale. À défaut du changement d’organes défectueux qui se développera dans le courant du siècle en cours, nous ôtons encore, dans la mesure du possible, l’organe incriminé !
Moi aussi, j’ai des végétations infectées, car j’ai toujours mal aux oreilles quand je prends l’avion…
Bonne remarque, frappée de bon sens français.
Nous rencontrons de plus en plus de reliquats de végétations adénoïdes chez des adultes qui présentent des problèmes de dysfonctionnement tubaire (de trompes) se traduisant par des douleurs à l’atterrissage, mais aussi en montagne ou même parfois par une sensation désagréable en passant dans les tunnels. Cela correspond à une différence pressionnelle entre la caisse (à cause de cette dysfonction des trompes) et le monde extérieur.
Il y a des modes en médecine… et j’ai connu l’époque où certains médecins, quelle que soit leur compétence, déconseillaient cette intervention au prétexte que les végétations étaient utiles…
J’opère de temps à autre ces reliquats, quand ils gênent le patient ou l’empêchent parfois de pratiquer un sport que je connais bien : la plongée.
Mais ces oreilles devenues douloureuses, dès que la pression atmosphérique augmente, ont rarement pour cause d’hypothétiques reliquats de végétations.
La trompe d’Eustache chez l’adulte s’allonge, se verticalise, devient plus fine et s’ouvre moins facilement. Si elle apparaît trop fine ou trop coudée (en forme d’accent circonflexe) l’ouverture active (à la déglutition) se fait parfois moins bien. À fortiori quand la pression extérieure augmente sur le tympan !
La forme des trompes fait donc tout.
Un enfant équilibre et s’infecte facilement (trompes larges et horizontales).
C’est l’inverse pour l’adulte.
Un peu d’histoire
Une otite moyenne aigüe, encore très fréquente de nos jours, a vu son pronostic se transformer grâce à l’antibiothérapie (qui ne doit donc pas être prescrite systématiquement, mais à bon escient). En début d’installation, il n’était pas rare pour les ORL de ma génération de pratiquer une paracentèse (incision du tympan pour évacuer la collection de pus dans la caisse) malgré une mise sous antibiotique de l’enfant qui souffrait. Cela devient de plus en plus rare.
L’otite aigüe n’était pas que douloureuse, elle pouvait s’avérer grave et se compliquer de mastoïdites, qui ont quasiment disparu de nos jours, et nécessiter un acte chirurgical avec nettoyage des cavités mastoïdiennes (cavités aériennes emplies de pus).
Dans les cas les plus graves, l’abcès se propageait au niveau cérébral aboutissant au décès…
Nous l’avons dit, Jeanne d’Arc avait probablement fait des mastoïdites.
Elle fut loin d’être la seule.
Le premier fils de Catherine de Médicis, François II, devint roi de France en 1569. Il n’avait que 15 ans à la mort d’Henri II. Il eut droit à nombre de sobriquets irrespectueux, pour beaucoup injustifiés, mais ce n’était qu’un adolescent au visage ingrat, qui de surcroit était marié à la belle Marie Stuart. Et la jalousie peut faire dire beaucoup de méchantes choses. L’époque était en outre compliquée, marquée par les guerres de religion qui avaient débuté… avec leur lot d’intolérances et de massacres. Il mourut au bout d’un an et demi de règne, certainement d’une complication de mastoïdite qui le fit souffrir atrocement plusieurs jours durant avant qu’il ne décède en fin d’année 1560.
Photo: Les gens de médecine/ Daumier