Gilda (Charles Vidor, 1946)
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Gilda (Charles Vidor, 1946)
Ariane, Sabrina, Laura, Eve, Rebecca... et Gilda. Les titres de grands classiques hollywoodiens portant des prénoms de femmes (en VO ou en VF) se divisent en deux catégories: ceux qui sont axés sur la métamorphose (Ariane, Sabrina et Eve) et ceux qui tournent au contraire autour d'une icône figée pour l'éternité. Certes, contrairement à Laura et Rebecca, Gilda n'est pas un portrait qui prend vie et s'émancipe (ou continue de hanter et vampiriser son entourage). Mais elle est bien une image de cinéma, une construction fantasmatique tant elle est fétichisée à l'extrême. Gilda ce n'est pas Rita Hayworth comme elle le disait d'ailleurs elle-même amèrement. Gilda c'est une chevelure de feu (perceptible même en noir et blanc) rejetée en arrière de façon provocante, une robe fourreau de soie noire faisant ressortir la blancheur laiteuse de la peau et la silhouette sculpturale et sensuelle de la dame en train de danser et de chanter "Put the blame on mame" et enfin et surtout un long bras ganté de noir que l'autre main dénude voluptueusement, faisant passer dans l'assistance (devant et derrière la caméra) un frisson érotique dont les réalisateurs actuels feraient bien de s'inspirer tant notre époque actuelle manque d'imagination à ce niveau là. La stupidité crasse du code Hays avait un avantage: sa stupidité justement. Et comme l'érotisme est basé sur la suggestion, le sous-entendu, la subtilité, ses gardiens se faisaient souvent berner sans même sans apercevoir.
Car "Gilda" est moins un grand film noir (l'intrigue, élaborée au jour le jour n'est pas ce qu'il y a de plus réussi avec ses répétitions et ses incohérences) qu'un grand film tout en non-dits sur la complexité du désir et des pulsions sexuelles circulant entre trois personnages: Johnny Farrel (Glenn Ford) le voyou-gorille de service, Ballin Mundson (George Macready) son patron aux manières aristocratiques et Gilda (Rita Hayworth), incendiaire femme du deuxième et ex du premier. Une ambiance trouble s'instaure entre ces trois personnages. Ballin joue les voyeurs en s'amusant à observer derrière les fenêtres de son bureau la relation tendue et pleine de fiel (et de désir) qui s'installe entre Gilda et Johnny. Gilda passe son temps à séduire le premier venu pour que Ballin et Johnny s'intéressent à elle. Comme avec Ballin c'est visiblement peine perdue (il prétend l'adorer... mais à distance, comme un fan avec son idole), elle se donne en spectacle pour susciter de la haine et de la jalousie chez Johnny. Celui-ci l'a en effet laissée tomber et semble plus motivé par le fait de protéger les biens de son patron que par son ex-fiancée. Quant le patron disparaît, il va jusqu'à prendre sa place (comme il le lui avait demandé) en gérant ses biens et épousant sa femme pour mieux la délaisser à nouveau tout en la faisant surveiller d'une façon maladive. Une bien étrange attitude pleine de paradoxes, tel cet amour-haine qu'il voue à Gilda et cette dévotion trouble vis vis de Ballin, lui-même pas très net. La scène de rencontre entre les deux hommes dans laquelle Ballin tire Johnny d'un mauvais pas à l'aide d'une canne-épée est d'un symbolisme aussi évident que le gant retiré à la manière d'un bas de soie sur une jambe parfaitement galbée.