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Retour parmi les hommes (2011) Philippe Besson

Retour parmi les hommes (2011) Philippe Besson

Publicado el 25, may, 2021 Actualizado 25, may, 2021 Cultura
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Retour parmi les hommes (2011) Philippe Besson

Le deuil impossible de l’amant merveilleux

C’est rare de voir l’attente qu'a pu provoquer pour les amateurs un roman comme Retour parmi les hommes. Dès la fin d’En l’absence des hommes, son héros manquait à de nombreux lecteurs. Savoir que, dix ans après, Philippe Besson projetait d’écrire une suite à son premier roman a fait naître chez beaucoup d’amateurs du livre, une inexplicable et fiévreuse espérance. Celle de ressentir les mêmes émotions, la même passion et les mêmes angoisses que la première fois. Pourtant depuis sa première œuvre, l'auteur avait écrit une dizaine de romans, à un rythme quasi annuel. Mais il faut dire qu’En l’absence des hommes avait enthousiasmé une grande partie de lecteurs qui lui seront souvent fidèle, et que le livre se finissait sur une note tragique mais aussi avec l’espérance de jours meilleurs, d’un ailleurs où allait s’engouffrer Vincent pour se retrouver et pouvoir commencer une nouvelle vie.

De retour de son périple à travers le Monde, Vincent nous parle de la société d’après-guerre à laquelle il ne peut pas s’identifier, se sentant extérieur à cette société qu'il a quittée sans penser la retrouver un jour. À 17 ans, il est parti voyager loin, quittant sans un mot son ami Marcel, désormais mort sans que le jeune homme n’ai pu lui dire au revoir. Les deux hommes qui ont le plus compté dans sa vie ne sont plus là et il ne peut s’y résoudre, se retrouvant pratiquement neurasthénique. Malgré les voyages, malgré la distance, la blessure qui l'a poussé à quitter les siens est toujours aussi forte. Pourtant il est allé loin, en Italie où il a traversé des paysages magnifiques sans vraiment s’y attarder, tout à sa peine et à son deuil. Il a traversé la mer, a rejoint l’Afrique, ses déserts et ses nomades. Il a aussi rejoint le Moyen-Orient, la Turquie et la Grèce… tous ces pays, il les a visités mais ne s’y est jamais vraiment attardé.

On retrouve, dans Retour parmi les hommes, avec un plaisir indéniable, l‘écriture survoltée de Philippe Besson, qui s'épanouissait dans En l'absence des hommes. Ce récit d’aventures éperdues en quête de réconfort est mené tambour battant, suivant le rythme effréné du héros que le roman dépeint. C’est une prouesse littéraire que de nous emporter si loin et si vite sans jamais perdre en intensité. Cette toute première partie, grandement inspiré par les voyages d'Arthur Rimbaud, est  fulgurante, envoutante et poignante. Puis, le voyage en Amérique entame un autre style dans la narration, plus posée et encore pleine de découvertes. Le héros murit mais il emporte avec lui sa peine et son désarroi. Enfin, le retour en France est captivant, on est curieux de découvrir avec les yeux de Vincent ce Paris des années folles. Le décalage entre les affres du personnage et le décor qu’il nous dépeint amène une dimension tout à fait particulière qui donne un charme certain à l'histoire.

Mais malgré tout, Retour parmi les hommes n‘atteint pas les sommets auxquels on rêvait d‘accéder. C’était une gageure pour Philippe Besson que d’égaler cette prouesse initiale et forcément unique, qu'il avait atteinte avec En l'absence des hommes. La difficulté était redoublée par la force intérieure et le charme que possédait son héros. Le lecteur s'attachait à cette âme forte, tourmentée, dont la fragilité était en grande partie liée à son jeune âge : le faire revenir quelques années plus tard pouvait s'avérer risqué. Et la force romanesque de cette suite, qui en est une sans vraiment le revendiquer complètement, est moins intense, la fougue transparait moins. Au lieu de laisser transparaître sa sensibilité, Besson se perd dans des considérations un peu prétentieuses, et souvent vaines. Son écriture maniérée apparaît de façon plus évidente, et l'on se rend compte que l'auteur reprend souvent les mêmes tics de langage.

Et puis le charme du premier roman de Philippe Besson était qu’il évoquait des personnages sans les nommer : par exemple le patronyme du personnage prénommé Marcel n’était jamais évoqué. Évidemment le lecteur savait pertinemment qu’il s’agissait de Proust, mais avec pudeur et élégance - à l’image du milieu corseté dans lequel baignait Vincent de l’Étoile - personne ne le disait. Dans Retour parmi les hommes, les noms de Raymond Radiguet et de Jean Cocteau sont clairement indiqués : c’est certes intéressant de mieux connaître cette époque mais du coup on a parfois l’impression de lire Voici, ou plutôt un Who's who, version gay. Reste que Besson se révèle encore assez bon quand il raconte des drames intimes et des tourments passionnels, et que, lorsqu'il part dans cette voie là, on le lit toujours avec un plaisir non dissimulé. Il se concentrerait sur ces aspects plus personnels que son roman n'en serait que meilleur.​

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