La richesse d'un voyage
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La richesse d'un voyage
27 juin 2022
Je voudrais d’abord profiter de cet article pour vous présenter et remercier chaleureusement Luis Felipe et Fédérica, qui m’ont si gentiment accueilli chez eux, dans leur vie, dans l’intimité de leur foyer, avec force d’amour et de bienveillance, et avec qui nous avons partagé, beaucoup partagé, des moments de vie, des discussions, des expériences autour du Daime, dans un état d’esprit que j’ai essayé de vous transmettre dans chacun de mes articles. Ce sont eux et la qualité de nos échanges qui ont nourri ces réflexions que je vous ai proposé ces 15 derniers jours, en association à mes lectures et mes moments passés avec moi-même au milieu de cette Nature.
Alors, ici, je voudrais leur redire avec cette belle accolade que nous partagions si régulièrement : Muito, Muito Obrigado por Tudo.
Dans mon dernier article, je vous parlais de cette autre façon de concevoir son rapport au monde que je rencontre ici, travailler plus à Etre qu’à Avoir. Travailler plus sur sa manière d’accueillir et de recevoir ce que la vie nous mets à disposition, essayer de vivre en harmonie avec, plutôt que d’être dans cette quête incessante de posséder et dominer le monde qui nous entoure. Cela relativise beaucoup de fondements inhérents à notre société capitaliste et matérialiste.
Ce que je souhaite dire, c’est que le voyage permet précisément cela : c’est s’ouvrir, aller à la rencontre de l’autre dans sa différence, essayer de la percevoir et de la comprendre au mieux, pour ensuite revenir à soi et voir ce qui peut faire sens pour nous, comment l’intégrer dans notre propre expérience de vie. En gagnant un peu plus d’ouverture, de relativité, de nuance, de discernement. Une plus grande maturité d’esprit, une conscience un peu plus ouverte et éveillée.
En cela, voyager c’est autant aller à la rencontre de l’autre que de soi-même. L’autre est comme un miroir qui nous renvoie à nos propres paradigmes, à ce que nous tenons pour évident, à nos certitudes. En prenant conscience qu’on peut concevoir les choses différemment, cela nous amène une prise de distance face à nos propres vérités, qui nous aident à appréhender la réalité tout autant qu’elles nous enferment dans une logique de pensée. On y trouve alors un nouvel espace de liberté, une ouverture, une respiration. En ayant l’humilité de reconnaître que nos vérités ne sont que nos vérités, relatives et subjectives, de notre point de vue et issues de notre propre conditionnement, on gagne en ouverture d’esprit et en connaissance de soi, sur ce qui nous fonde et nous anime intimement.
Notre perception du monde n’est pas qu’affaire de sensations. Celles ci sont modelées par nos émotions, nos cognitions, notre éducation, notre culture, notre propre histoire, et cette synthèse nous amène à porter une interprétation, une lecture personnelle de ce que nous expérimentons au cours de notre vie. Elle a bien sûr toute sa valeur et sa légitimité. C’est elle qui nous définit, dans notre manière d’être et d’appréhender le monde. Avec la sagesse de reconnaître qu’elle n’est que relative, qu’elle peut être questionnée, remise en cause, évoluer et s’affiner, notamment au travers de l’expérience de l’altérité, elle a tout à y gagner.
Deux visions différentes du monde ou de l’expérience de la vie n’ont pas à entrer forcément en compétition pour savoir qui est la meilleure. C’est entrer alors dans une relation de pouvoir et de domination, dans le règne de l’imposition de son point de vue. C’est une attitude ethnocentrique, où l’on viendrait juger l’autre de par notre propre cadre de référence, sans jamais chercher à le comprendre dans le sien. Je crois au contraire qu’elles peuvent tenter de se rencontrer en partant de là où elles sont pour s’enrichir mutuellement, dans une relation de complémentarité, de complétude, d’élargissement pour chacun. C’est certes une démarche plus exigeante, qui demande un effort de décentration et d’altruisme ; et également plus inconfortable, qui demande à accepter le doute et la remise en cause de ses certitudes. Mais au final tellement enrichissante ! C’est la possibilité d’une authentique rencontre.
Voilà le propre de la démarche interculturelle, ou en tout cas comment je la conçois et essaye de la mettre en pratique au quotidien. Voilà quelle fut ma démarche ici, dans cette immersion à Capao, dans ma rencontre avec Luis Felipe, Fédérica, leurs amis et pratiquants du Daime, dans ma façon d’appréhender cette expérience et tout ce que j’ai vécu ici et que j’ai tenté de vous partager.
Je suis sûrement parti loin dans mes réflexions ; et elles peuvent parfois vous être apparues déconnectées de vos réalités concrètes, ou le résultat d’élucubrations d’un mec perché sous Ayahuasca. Ce n’est pas le cas, mais peu importe. Elles ont été pour moi l’occasion d’un bilan personnel, pas toujours facile à assumer ; l’occasion de venir questionner mon rapport au monde, mes valeurs, mes perceptions ; tester mes convictions, approfondir mes interrogations et reconnaître mes erreurs, mes errances, mes illusions ; éclairer un peu la confusion dans laquelle j’étais, retrouver mon énergie vitale, celle qui m’anime et me fait me sentir fort, assuré dans mes positions, et ayant une certaine valeur malgré tout. Me reconnecter à moi même et à ce qui me fait me sentir vivant.
Ce que je veux dire au final, c'est que cette prise de hauteur à laquelle je me consacre, elle m'aide à mieux accepter tout ce qui me traverse, vivre plus justement et pleinement ce qu'il y a de beau en moi, reconnaitre, accepter et dépasser ce qu'il y a de plus sombre en moi. Vivre moins par automatisme et hzbitude, vivre de manière plus consciente et ouverte sur le monde.
Si vous avez trouvé quelques éléments dans ces réflexions qui vous ont apportés, j’en suis content. Je ne prétends pas détenir la vérité ; ma démarche est d’offrir avant tout un espace de partage sur des questions philosophiques et spirituelles que, dans la frénésie de nos vies, nous ne prenons peut-être pas assez souvent le temps d’explorer et d’aller interroger. C’est ce que j’ai essayé de faire pendant ces 15 jours de retraite. Et je serai ravi de poursuivre ce partage par vos retours, remarques, impressions et réflexions personnelles.
Je sors de la bulle de ma retraite pour revenir à des réalités plus matérielles et concrètes. Un peu de tourisme ici à Salvador, avant de rentrer et de retrouver la réalité de ma vie à Pau. Le blog devrait reprendre une tournure moins introspective et spirituelle désormais, soyez rassurés. ;-)
Je vous embrasse