Un conte pour la Saint-Valentin
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Un conte pour la Saint-Valentin
[Attention : mention de suicide]
Âme solitaire, âme blessée...
Impossible pour lui de passer près de son propre reflet sans s'arrêter. Hypnotisé, il observait des heures son horrible visage dans le miroir cassé de sa chambre, située dans une immense tour, elle-même perdue dans une antique forêt aux arbres gigantesques.
Cette nuit, il fixait avec une telle intensité le miroir brisé que ce dernier semblait se fissurer de plus en plus, comme si c'étaient ses yeux qui souhaitaient détruire cette image hideuse : son visage. Comment parvenir à se libérer de l'emprise négative de soi-même ? Comment pouvait-il s'aimer s'il se trouvait hideux à ce point ? Pourquoi n'arrivait-il pas à se trouver beau comme les autres ? Il n'avait pas confiance en lui, il ne croyait pas en sa beauté et en sa force intérieure... Il était prisonnier de son propre regard, de son propre jugement et de celui des autres.
Son visage, déformé par le miroir craquelé, était à demi caché par une longue et épaisse mèche de cheveux d'un noir aussi profond que celui de l'ébène. Il aurait voulu cacher entièrement son visage, mais ce serait encore plus effrayant qu'avant. Il devait donc se contenter de constamment baisser la tête et de laisser sa mèche le recouvrir au moins en partie, et bien sûr de rester seul et isolé dans cette forêt tant qu'il n'aimerait pas son visage.
Mais... Rien à faire. Il continuait à dire à son corps qu'il était affreux, il n'arrivait pas à penser le contraire.
Enfin, il s'éloigna du miroir et soupira lentement en se dirigeant vers la petite fenêtre ronde de cristal de sa chambre, la seule de la tour. Le calme de la nuit le rassurait et les douces étoiles dorées l'entouraient de leur lumière protectrice. Il aimait le ciel et ses étoiles. Il étudiait les cartes célestes et les légendes interstellaires... C'était la seule chose capable de l'emmener assez loin de son malheur. Des rêves qui lui permettaient de s'échapper et d'oublier quelques instants la douleur qui blessait son cœur. Il imaginait des histoires tous les soirs et espérait que la vie allait lui réserver peut-être encore une surprise.
Mais il savait qu'il devait d'abord s'aimer soi-même avant de trouver son bonheur... Comment faire ? Avant, il ne se trouvait pas particulièrement beau, ou changeait sans cesse d'avis à ce sujet, mais maintenant que ce maudit sortilège l'enfermait dans le corps d'un monstre, il se détestait.
Ce qu'il ne savait pas, c'est qu'il n'avait en rien une apparence terrifiante, bien au contraire, il était si beau que la lune se trouvait pâle par rapport à lui ! Mais à force de penser que son visage était la cause de ses soucis, à force de ne voir en soi que faiblesse et difformité, son miroir (qui était enchanté) en avait fait la réalité !
Brusquement, une lueur intense passa dans ses yeux sombres et il renversa un verre rempli d'eau qui se brisa au sol en mille morceaux. Quelques éclats le blessèrent et son regard fut attiré vers le bas. Son désespoir se fit plus grand lorsqu'il vit son terrible reflet au sol, dispersé et déformé par les bouts de verre tranchant. Ce n'était plus seulement le miroir magique qui reflétait son image en bête affreuse, désormais, tous les autres reflets en faisaient de même ! Sans aucun indice, comment pouvait-il deviner que ce n'était qu'un sortilège ? Il n'en pouvait plus de voir ce monstre qu'il était devenu...
Alors, il s'effondra par terre et prit son visage entre ses mains, lassé de la solitude et de son apparence qu'il croyait épouvantable. Il ne sortait presque plus dehors, ses dernières forces et ses dernières espérances le quittaient... Il n'avait presque pas senti la douleur que lui infligèrent les éclats de verre tant il avait mal au cœur...
Soudain, il entendit une voix féminine qui provenait de l'extérieur. Sans réfléchir il se leva et sortit de sa chambre pour voir de qui il s'agissait.
Il s'attendait à tout, sauf à cela.
Jamais il n'avait vu une si jolie et douce jeune fille. En croisant les yeux de celle-ci, il oublia tout le reste, et même de cacher son visage qu'il trouvait affreux. Il voulut dire quelque chose mais les mots restaient coincés dans sa gorge malgré sa bouche ouverte. Ils se regardèrent longtemps ainsi sans parler, sans bouger. Elle n'avait jamais vu d'aussi beaux yeux, noirs comme la nuit, un regard si attendrissant et si fascinant qu'il la rendit muette de stupeur. Lui non plus n'avait jamais vu d'aussi beaux yeux, également noirs comme la nuit, aussi brillants que les siens. Il tomba amoureux de ce regard, et ainsi, il aima enfin son propre regard, car elle avait le même que lui : son regard était désormais la seule et unique partie de son visage qu'il aimait.
Enfin, elle décida de s'approcher de lui. Elle venait de voir une goutte de sang briller sur sa main et une autre sur son visage. Elle aurait dû prendre peur en le voyant dans cet état, l'air fatigué, manquant de forces et tâché de sang, mais son aspect fantomatique ne la terrifia pas, bien au contraire. La douleur qui se lisait dans les yeux de l'homme et son apparence fiévreuse ne firent que l'inquiéter davantage. Cet inconnu lui semblait familier, comme si elle le connaissait depuis toujours. Elle ne pouvait pas expliquer cette attirance qu'elle éprouvait.
Lentement, elle tendit sans un mot son bras vers sa joue. Il baissa sa tête afin de cacher son visage sous ses mèches noires en se souvenant de son apparence terrifiante, gêné. Pour la première fois de sa vie il laissa quelqu'un s'approcher de lui afin de mieux le voir. Il trembla légèrement en sentant le contact de la douce main de la belle contre sa joue. Il ressentait la même chose qu'elle et la laissa toucher son visage, écarter ses cheveux noirs. Sous ces derniers se cachait une autre blessure due à l'un des morceaux de verre. Cependant, il avait non seulement des coupures à la main et au visage mais aussi sur les jambes : il s'était encore blessé en s'effondrant sur le sol parsemé d'éclats de verre ! Avant qu'il ne puisse protester, elle entreprit de désinfecter ses plaies en l'emmenant près d'une source enchantée. Il leur suffit d'un sourire commun pour savoir qu'ils étaient destinés l'un à l'autre et qu'ils pouvaient désormais tout se dire.
Ils passèrent la nuit entière à se promener et à parler, aussi naturellement que s'ils se connaissaient depuis la nuit des temps, autrement dit depuis une éternité. Il reprit des couleurs et des forces, elle reprit de l'assurance et de la joie. Lui était un prince elfique qui avait fuit son royaume par manque de confiance en soi, elle était une fée des eaux aux jolis cheveux ondulés qui ne croyait pas en ses pouvoirs.
Il lui raconta comment il avait voulu reconstituer un miroir magique cassé qui devait le rendre beau, mais en le faisant, il était devenu prisonnier d'un sortilège qui le rendait hideux. Elle lui fit remarquer que ce n'était que son reflet qui paraissait affreux, mais lui non. Elle lui expliqua qu'il avait lui-même aidé le miroir à l'ensorceler car il ne s'aimait pas, il fallait qu'il comprenne sa propre beauté pour se délivrer de cette magie qui copiait simplement ses pensées. S'il voulait réparer le miroir magique qui selon une vieille légende apportait la beauté, cela signifie que même avant le sortilège il ne s'aimait pas !
Et elle l'aida à aimer à nouveau son apparence, différente mais belle chez tous les êtres de ce grand monde. Il reprit vite confiance et fit disparaître sa douleur. Elle en fit de même en le voyant si heureux à ses côtés. Elle pensait être faible, impuissante et défigurée, rongée par la douleur... Mais rapidement, elle se rendit compte de ses erreurs et retrouva sa vitalité, il était son miroir et c'est en le voyant qu'elle vit ses propres erreurs !
Tous les deux furent plus heureux que jamais, plus beaux et souriants que personne, illuminés par l'amour et la joie.
Le passé est le passé, il ne faut plus y penser lorsqu'il nous blesse, il faut se concentrer sur le futur, et c'est en s'aimant soi-même que l'amour nous trouve, ou comme ici, c'est l'amour qui peut nous sauver. Ils ont souhaité de tout leur cœur être heureux et ils le sont devenus même si sans s'en rendre compte, ils l'étaient déjà avant ! Il suffisait juste d'un petit coup de pouce, ou plutôt d'une simple lueur d'un amour véritable pour les aider.
Sous le soleil levant, près des cascades d'argent, ils s'embrassèrent dans une étreinte chaleureuse, rassurante et protectrice qui effaça ce qui restait de leurs peurs. Bénis par un amour immense et éternel.
Et le miroir enchanté se brisa à nouveau. Ses éclats se séparèrent afin que d'autres puissent le réparer et ainsi passer son épreuve.
Cette bonne âme était heureuse, car à chaque fois elle apprenait sa morale aux êtres de ce monde et répandait le bonheur partout où elle allait.
Fin ! Je vous souhaite de passer une bonne Saint-Valentin et d'être heureux <3 En espérant que ma petite histoire vous a plu !
(Désolée de publier ça bien après la Saint-Valentin ha ha, alors voici un petit tableau de ma mère qu'elle a peint spécialement pour mon histoire ! D'habitude je dessine moi-même, mais elle a voulu participer, merci à elle <3)