Du « non agir » appliqué au monde d’après le confinement…
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Du « non agir » appliqué au monde d’après le confinement…
La radicalité de la rupture dans la course effrénée aux biens (pas forcément biens…), à la consommation, à la compétition et à la mobilité, a, malgré toute la souffrance produite par cette crise, permis de se recentrer et de se poser pour réfléchir. Nous avons aussi, malgré le stress, goûté ce silence, ce temps qui s’allonge soudain, l’air qui s’éclaircit, les priorités qui changent.
Que voulons nous vraiment? Qu’est ce qui est important, nécessaire ou juste accessoire? Qu’est ce qui fait que la vie vaut d’être vécue? Devons nous toujours aller irrémédiablement (et diablement…) vers plus de réchauffement, d’inégalités, de pollution, de migrants, de conflits internationaux, de destruction du vivant en général?
La crise mondiale peut t elle nous permettre de trouver un élan pour changer notre monde en mieux ou sommes nous condamnés à la même chose qu’avant « en un peu pire » comme le dit Michel Houellebecq?
Autrement dit: Allons nous pouvoir suffisamment modifier la donne au niveau local et mondial pour que les milliardaires n’aient pas besoin de se casser sur Mars ou de s’enterrer en Nouvelle Zélande?
Nous voilà passés de la crise sanitaire à la crise existentielle.
La bataille fait rage un peu partout et surtout pour l’instant sur les réseaux sociaux.
Les forces en présence sont:
• D’un côté les forces sociales, progressistes, écologistes, humanistes, boostées par la mauvaise gestion libérale et industrielle des États, et pour qui le vrai progrès est politique et social.
• En face, nous avons les forces de pression conservatrices, financières et économiques bien implantées et influentes. Celles là ont grand intérêt à ce que rien ne change vraiment, ou en marge, et pour qui le salut ne peut venir que de la science, de la recherche et de l’innovation technologique, bref de ce qui est traduisible en valeurs d’échanges.
Ce dont nous pouvons être à peu près sûrs:
• Dans un premier temps rien ne va changer. Le monde économique soutenu par le politique a besoin de retrouver ses marques et de se « refaire ».
• L’appauvrissement et la fragilisation grandissante du peuple va conduire à beaucoup de heurts, de manifestations et de revendications et que les forces en présence vont s’affronter durement tant l’enjeu est de taille.
• Passée le pic de la crise, il est probable que le gouvernement va se dépêcher d’oublier les belles promesses inconsidérées et retrouver ses fondamentaux technocratiques par rapport à la gestion de la santé. Tout au plus va t il revaloriser les petits salaires de quelques dizaines d’euros, distribuer quelques primes et organiser des concertations larges citoyennes et/ou sectorielles sur plusieurs mois et cela finira de la même façon que le grand débat…
Je souhaite me tromper, mais je pense que nous ne pouvons pas attendre autre chose de ce gouvernement que ce pour quoi il a été élu. Nous serons fixés la dessus dans les tous prochains mois.
Alors que faire, comment agir?
Ma proposition est d’appliquer un principe clé du taoïsme: « Agir sans agir » ou « non agir » (Wei wu wei).
Qu’est ce que cela peut bien vouloir dire? Peut on ne pas? Alors que tout nous presse de toute part pour agir justement. Il faut faire vite, le temps nous manque. Agir pour, agir contre, courir, produire, rattraper le temps perdu (alors que c’était du temps gagné…). L’injonction au mouvement et à l’action revient au galop.
Et bien justement, nous pouvons agir en continuant à prendre ce temps dont on a besoin. En refusant cette course au toujours plus. En privilégiant la proximité, le local, la qualité. Nous sommes maître de ce qu’on nous propose. Essayez pour voir! Dites non à un produit, à un modèle, à une politique, à un service, à un nouveau gadget et cela disparait instantanément.
Hâtons nous lentement. Concertons nous. Réfléchissons. Gardons les choses positives que le confinement nous a permis de découvrir ou de redécouvrir. Refusons la futilité, l’absence de sens, la compétition stérile aux profits d’un petit nombre, le toujours plus qui est invariablement un toujours moins quelque part sur terre. Ne courons plus après le dernier fichu gadget électronique. Qu’il était bon et reposant de vivre pour la première fois peut être dans l’histoire de l’humanité une période sans compétitions sportives…Faire du sport juste pour le plaisir de pratiquer…
« Agir sans agir » n’est pas: « ne pas agir »
• C’est agir en respectant l’existant, sans tout balayer, sans être interventionniste.
• C’est agir en économisant ses forces, sans être à contre-courant, en utilisant les énergies et les ressources disponibles, en étant sobre de moyens.
• C’est agir posément sans agitation, sans frénésie, calmement après réflexion. Agir en étant maître de son temps.
• C’est agir en se méfiant comme de la peste de la parole performative. Ce qui est dit est juste dit, pas encore fait.
• C’est agir en accordant les contraires, en trouvant un équilibre, une troisième voie sans perdant ni gagnant.
• C’est aussi agir sans l’égo en respectant l’autre et en admettant qu’il puisse aussi avoir raison.
• C’est agir en faisant confiance à priori et contrôler à postériori. Une grande partie de nos récents malheurs vient du fait que les décideurs et l’État ne font confiance à personne, centralisent et contrôlent tout à priori. Outre le climat de suspicion ainsi créé, une administration de contrôle est décourageante, lente, non agile et coûte très cher en énergie et en budget.
Cette crise a commencé à changer les consciences, sans qu’on ait fait autre chose que de la vivre. Nul doute que cela va changer beaucoup de nos choix futurs. À commencer par le choix de notre future politique. Faisons confiance à l’humain en nous. Nous ne changeons pas les choses, ce sont les choses qui nous changent.
Bonne chance à tous pour cette rentrée.