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Je devrais peut-être dégoutée, mais je suis plutôt captivée

Je devrais peut-être dégoutée, mais je suis plutôt captivée

Published Feb 16, 2024 Updated May 17, 2024 Culture
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Je devrais peut-être dégoutée, mais je suis plutôt captivée

 
 

Ce n’est pas un nouveau livre, mais ce n’est que récemment que je l’ai lu et j’ai découvert l’auteur. Depuis, je ne cherche que à lire plus de ses œuvres. Je vous parle de Erection, Ejaculation, Exhibitions, and General Tales of Ordinary Madness (désolé pour le mauvais langage :3) de Charles Bukowski qui a paru en 1972 aux éditions City Lights Publishers.

C’est un recueil de nouvelles relatant une vingtaine d'histoires brèves et percutantes où Charles Bukowski dépeint sans filtre la vie des marginaux. À travers des récits empreints de sexisme, de misère quotidienne, de violence et de désespoir, l'auteur explore des années d'errance à travers l'Amérique des laissés-pour-compte. Dans un style brut et sans concession, Bukowski nous plonge dans l'univers sombre des bars louches et des chambres d'hôtels minables, où l'alcool et la pauvreté règnent en maîtres. Pourtant, au milieu de cette désolation, l'amour, l'affection et l'amitié trouvent leur place, défiant les normes sociales avec une sincérité déconcertante.

Le livre ne fait pas l’unanimité et je comprend du moins pourquoi. Vulgaire, sans retenue ni pudeur, on pourrait n’y voir que le vomissement des aventures de baises, de beuveries et de l’autodestruction de Charles Bukowski (Hank, le héros de la plupart des nouvelles étant Bukowski lui-même). Imprégnées dans une atmosphère noire de crasse, de bile et de sentiments bien peu pieux, ces histoires nous racontent la vie sale de cet écrivain provocateur et subversif.

Le titre est si grossier, qu’il ne fut pas toléré pas en France et donc, la traduction française que j’ai lue est plutôt titrée ‘Contes de la folie ordinaire’ qui omet de parler d’érection et d’éjaculation, termes bien trop scandaleux. C’est pourquoi j’ai été surprise sur le coup de lire à quel point ça parlait de sexe. Je comprends mieux en voyant le titre original anglais lors de la rédaction de cet article.

Tellement grossier!

Oui, c’est vulgaire. Oui, il y a des passages choquants. Mais à mes yeux, ce n’est pas une raison de cesser de lire ou de ne pas aimer. Certes, il faut aimer l’humour noir, l’ironie et l’insolite. Volontairement décalé, le livre relève presque de la farce burlesque tant il pousse le ridicule et le grotesque des situations.

En lisant ça, on se fait brasser. Je suis d’avis que parfois, pour faire réfléchir, il faut brusquer les mentalités et c’est exactement ce que fais Charles Bukowski. Il nous raconte la folie, celle de la vie ordinaire, celle de pas mal de gens qui passent à travers les jours en essayant de survivre, tant bien que mal, et… ces gens existent. Il y en avait dans les années 1970 et il y en a encore aujourd’hui. Il nous raconte ces histoires dingues de sauteries, de cochonneries, de saletés, d'hommes gros, laids, sales, vicieux, alcoolos, de femmes sal****, p****, moches, droguées et ça choque, car ça nous met en pleine face une certaine réalité.

Ils / nous — sommes fous

J’adore le concept de la folie ordinaire. Cette folie quotidienne de tous et chacun. Cette folie de société refoulée, niée, qu’on tente d’éradiquer, mais qui finit toujours par déborder et rejaillir. La folie qu’on ne peut pas soigner, car elle fait partie du fait d’être humain. Cette folie profonde émanant de notre côté encore présent d’animaux, car nous oublions que l’humain n’est qu’un simple mammifère, sans poil et avec un gros cerveau certes. C’est la folie de nos instincts primaires, de nos peurs, de nos angoisses. La folie de la vie, d’être né humain, de respirer, tout simplement.

En se disant que ces histoires ont vraiment eues lieu et ont été vécues par Bukowski, on se dit qu’il en faut du culot pour faire des trucs pareils et le raconter après. Beaucoup y pensent, quelques-uns les font, aucun ne les raconte. Sans fausse pudeur, Bukowski, lui, ose, avec humour et autodérision. Il raconte ce que les autres enjolivent et dissimulent. Et puis, il faut aussi un œil critique pour caractériser ainsi d'une plume acérée une certaine tranche de la société. Et ça réussit. J’ai eu des moments de dégoût, je me suis dit "mais comment peut-on…?", et puis, j’ai refermé le livre en me disant que j’en ai bien aimé la lecture. Peut-être est-ce car je suis une folle ordinaire?

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