Aujourd'hui, j'aimerais vous présenter ce livre : Sauve-la de Sylvain Forge. Attirée de manière irrépressible par ce titre, je me sentais le devoir impérieux de lire cet ouvrage. Qui fallait-il donc secourir? Une femme au vu de l'emploi de l'article défini, et pas n'importe laquelle. Mais alors qui était-elle cette femme ? Et pouvais-je moi, lectrice, être sauveuse ?

Ou bien alors, était-ce une adresse à l'un des personnages du roman, destinataire de cette injonction pressante. Dans tous les cas, il y avait urgence. Je m'empressais de dévorer des yeux la quatrième de couverture. 

L'on y trouve en général un résumé de l'oeuvre ou bien un extrait, j'y aurai sûrement de quoi me renseigner et répondre à toutes mes interrogations. En effet, les caractères d'un blanc immaculé, blancs sur fond noir, signalent à tout le moins que c'est une apparition, sépulcrale ou divine au creux de la nuit, qu'elle est toujours là, présente, quelque part et que l'on n'attend plus que moi pour la chercher. Je comprends à la lecture de ces quelques lignes que cet ordre n'en est pas un, qu'il s'agit plutôt d'une instante prière d'une femme à un homme qu'elle a aimé, que la situation de cet homme ne l'invite pas à s'engager dans cette recherche mais nous savons déjà, dès ce moment, que notre héros va se lancer dans l'aventure. Et me voilà, pressée de rentrer de la librairie et de plonger dans cette histoire de disparition. 

Désormais investigatrice aux côtés de notre héros, je suis pas à pas ses doutes quant à l'entreprise de cette quête. Dans une famille qui aurait ainsi pu être une famille idéale, Alexis notre héros se débat avec un statut dans l'entreprise tout à fait particulier du fait de sa proximité avec le dirigeant (son beau-père) et les rêves de maternité de son épouse, qu'il ne semble pas forcément désireux de concrétiser. 

Dans cette situation, intervient à la manière d'un récit épique, un évènement magique qui pose notre personnage en chevalier servant : l'irruption sur sa boîte professionnelle de messages de son ancienne compagne, Olivia. Ces messages agissent comme un philtre et petit à petit notre héros va se prendre au jeu, séduit de fil en aiguille par la teneur de ces échanges. 

Ce livre, que l'on aurait cru, de prime abord, roman policier, se transforme peu à peu sous nos yeux, d'épopée en conte avec les ressorts habituels, que nous nous plaisons à retrouver. D'abord un accident puis la présence de maisons inquiétantes aux abords du lieu de l'accident. C'est forcément de là que vient l'explication, l'ogre est le gérant de cette auberge étrange, où séjournent de nombreux jeunes gens. Son antre est fort opportunément gardée par un terrible animal, qui ressemble tant à Cerbère, gardien des Enfers. Mais bientôt il est question également d'une sorte de "marraine" qui en sait bien plus qu'elle ne veut bien le dire et cache des éléments propres à aider notre enquête. 

Cette histoire devient palpitante, nous tremblons à chaque minute pour notre héros qui au fil du temps se rend compte que cette disparition n'est pas une chose si simple qu'il y paraît. En réalité, la jeune femme avait, au cours de son exploration fait d'importantes découvertes et ce sont ces trouvailles qu'elle avait faites qui la mettaient en danger. 

Alors, morte ? Vivante ? Le doute subsiste et de nombreuses péripéties viennent émailler le récit. Alexis, le bien-nommé, parviendra -t-il à démêler cet écheveau de fils qui se croisent, s'entrecroisent, se mêlent, jusqu'à se confondre et que l'on perde la trace de Clara, la jeune femme disparue. Dans cette recherche effrénée, Alexis aura-t-il perdu ce qu'il a laissé, sa femme, Clémence, en tout premier lieu, sa famille, son éminente place au sein de sa société ? Les épreuves qui attendent notre héros se révèlent nombreuses et toutes plus difficiles les unes que les autres et une nouvelle fois notre oeuvre multiple nous offre une autre facette, celle d'un roman initiatique où Alexis-Papageno pour vivre son amour avec Clémence-Papagena devra en passer par le sauvetage de Clara-Pamina, fille de la Reine de la nuit. 

En somme, encore éblouie par cet ouvrage d'une maîtrise incomparable, je vous invite à vous couler dans ce roman, vous laisser bercer par le lit de ce fleuve impétueux et d'escarpements rocheux en troncs d'arbre un brin facétieux, à suivre Alexis, Olivia, Clémence et Clara dans leurs pérégrinations, vers la lumière ou au plus profond du gouffre.

Vous en ressortirez chaviré, conquis, heureux et reconnaissant à l'auteur de vous avoir fait naviguer en eaux troubles, au point de craindre vous y perdre vous-même et vous pourrez lui dire merci de vous avoir convié, prié de devenir pour un temps quelqu'un de spécial, d'avoir saisi la main de l'auteur, d'Alexis, d'Olivia, de Clémence comme d'extraordinaires personnages et d'avoir été distingué parmi tant d'autres comme sauveur potentiel de Clara. 

La question se pose alors : est-ce elle qui doit être sauvée et nous qui sommes sauveurs ou bien nous qui sommes sauvés par elle ? A vous de me dire quel est votre sentiment...