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La tâche

La tâche

Published Nov 25, 2025 Updated Nov 25, 2025 Drama
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Des mois qu’elle passe devant cette boutique qui l’intrigue, qui l’interroge qui parfois l’obsède. Comment peut-elle encore existée ? Mai a vécu dans cette ville depuis toujours et pourtant à aucun moment elle n’y a aperçu un potentiel visiteur. Impossible de ne pas y penser chaque jour, c’est le chemin qu’elle emprunte pour aller au Lycée. A chaque passage, elle ressent un mal être, une angoisse qu’elle a dû mal à décrire au niveau de son plexus qui lui donne même la chair de poule parfois et pourtant elle sent bien qu’elle est attirée par cette devanture sombre, poussiéreuse et mal entretenue par les propriétaires. Les vitres sont opaques, l’enseigne est tellement noire de pollution que seul le panneau ouvert indique que l’établissement pourrait être visité. Plusieurs fois elle a essayé d’y entrer mais a toujours fini par y renoncer, à quoi bon ? Sa curiosité la pousse à s’arrêter à la hauteur de la porte vitrée. Une petite pancarte en bois qu’elle n’avait encore jamais remarquée auparavant est posée à la hauteur de la poignée, les caractères sont manuscrit et peint à la main ; Elle plisse les yeux pour la déchiffrer : Chez Lyne

Est-ce une femme qui tient cette boutique ? Que trouve-t-on à l’intérieur ? Malgré la peur de franchir la porte, une envie irrépressible la pousse à se pencher vers celle-ci en plaçant ses mains de part et d’autre de son visage, le nez collé à la vitre ; elle plisse les yeux.

- On n’y voit rien du tout là-dedans ! » se dit-elle

Une ombre rompit soudainement ce désert visuel, Mai fit un bond et recula jusqu’au trottoir. La porte s’ouvra brusquement : « vous pouvez rentrer, vous verrez mieux !

- Excusez moi je ne voulais pas paraître impolis bégaya Mai, je voulais juste jeter un coup d’œil.

Le regard de Mai se posa alors sur une vieille femme, ridée vêtue d’une longue robe en velours mauve. Elle est souriante presque joviale et dénote complètement avec le pas de porte aussi lugubre qu’intriguant.

-Allez y ma boutique est ouverte, n’ayez pas peur, je ne mords pas. Ça fait plusieurs fois que je vous vois ralentir à travers ma vitrine.

Mai hésita, puis succéda la vieille dame pour pénétrer dans l’échoppe. « Ce n’est pas si lugubre » pense-t-elle. La pièce était plutôt grande, propre malgré tous les objets qui l’encombrent. Son regard détailla des objets en tout genre : bibelots, bijoux, livres, vaisselle et meubles anciens. Un vrai bric à brac.

- Je vous laisse regarder ! Cria la vieille dame du fond de la boutique.

Mai s’enfonça doucement dans la pièce embarrassée, à sa droite un vieux buffet anglais de style victorien, en bois d'acajou. Le meuble possédait des portes fermées et des colonnes richement sculptées. Au-dessus de nombreux bijoux étaient présentés. Des breloques en tout genre : des colliers en argent, des broches en pierre et de vieilles montres automatiques. Son attention fut attirée par un gros bracelet en jade, qui se dressait sur un présentoir. La couleur du bijou était tellement hypnotisant qu’il paraissait presque fluorescent. Mai était subjuguée : « Quelle pièce incroyable ! » marmonna-t-elle. Elle aimerait la toucher mais se retient, la délicatesse et la beauté de ce bijou l’intimida.

« C’est une pièce unique ! mais ce bracelet est aussi beau de l’extérieur qu’il est laid à l’intérieur chuchota la vieille, Mai sursauta et balbutia :

- Pardon ?

- Je vois qu’il vous a tapé dans l’œil. Cet objet a une âme. Il choisit les personnes qui auront les épaules pour le porter. Il apparaît lumineux lorsqu’il a trouvé son propriétaire. - Vous voulez dire qu’il a une autre apparence pour d’autres personnes ?

- C’est exactement ça, jeune fille ! Il te plaît ? essaye le si tu veux.

Mai dubitative s’approcha doucement du bracelet et le toucha d’abord du bout des doigts puis fini par le saisir et le passer à son poignet. Le jade était lourd et froid. Elle ressentit alors une étrange sensation. C’est donc ça qu’elle éprouvait déjà devant la devanture de la boutique, ce petit pincement au-dessous de sa poitrine ? Est-ce lui qui l’a attiré et la fait venir jusqu’ici ?

- Ce bracelet est-il en vente depuis longtemps dans votre boutique ? demanda Mai.

- Tu as de la chance, je l’ai récupéré ce matin même d’une personne qui souhaitait s’en débarrasser rapidement. Sans doute un héritage familial. Comme je te l’ai dit cet objet est très rare.

Mai détailla cet objet si mystérieux en retournant son poignet. Elle cligna des yeux lorsqu’elle remarqua une tâche vermillon apparaître dans le dégradé de vert du bijou. Cette tâche était-elle déjà là ? elle fut prise d’un doute. Une quinte de toux violente de la veille commerçante brisa sa réflexion.

- Excuse moi, j’ai les bronches fatiguées. Je te laisse regarder.

La veille dame s’éloigna en se tenant contre le mur en direction d’ une petite pièce. Quelques minutes plus tard, Mai ne l’entendait plus tousser

-Tout va bien madame ? s’inquiéta Mai

Aucune réponse.

- Madame ?

Mai s’élança vers la pièce ou la veille dame avait disparu. A la hauteur de la porte elle la retrouva adossée à un mur dans un espace qui faisait office de salle de bain, haletante et essayant de reprendre son souffle.

Paniquée par la scène inattendue, elle saisit son téléphone.

- Non non, j’ai l’habitude ça va passer. Je dois juste reprendre mon souffle, ça va aller.

- Je ne peux pas vous laisser comme ça, j’appelle les secours !

- S’il vous plait c’est inutile, supplia la vieille dame, ça va mieux. Je ne veux pas ameuter tout le quartier pour une petite quinte de toux. Je suis désolée que vous ayez assister à ça, aidez-moi plutôt à me relever. Mai soutint la commerçante qui s’aida contre le mur pour se hisser sur ses jambes. Elle était tellement légère.

- Vous êtes sûr que ça va aller ? Vous avez un proche ou une personne à contacter en cas de problème ?

- Ne vous inquiétez pas pour moi, jeune fille. Je me suis toujours débrouillée.

Eprouvée par cette incident, Mai repris à toute hâte la direction de la sortie. Je dois y aller, on m’attend à la maison. Au revoir Madame ! Elle poussa la vieille porte vitrée sans se retourner et continua sa route en direction de l’appartement de ses parents.

Allongée sur son lit, Mai repensait à cette scène aussi improbable qu’inattendue. Subitement, elle se redressa et pris conscience qu’elle portait toujours le fameux bracelet à son poignet. Je ne suis pas une voleuse ! Dès demain, elle repassera à la boutique et rendra l’objet à son propriétaire. Pris de remord, elle essaya de l’ôter. Malgré l’étroitesse de son poignet impossible de le faire glisser, il était bloqué. C’est étrange elle se souvint bien de ne pas avoir eu à forcer pour l’essayer. Le bracelet semblait s’être resserré de manière à ce qu’elle ne puisse plus l’enlever. Prisonnière, elle s’empressa vers la salle de bain. Après plusieurs minutes de lutte, beaucoup de savon, elle arriva enfin au bout et fut enfin délivrée et soulagée.

Elle repensa soudainement à cette tâche qui était apparût juste avant la crise de la veille dame. En retournant le bijou dans tous les sens, elle ne vit que le dégradé de vert. Rien n’entravait l’harmonie des couleurs apaisantes de l’objet.


Assise en tailleur sur sa chaise, sa cuillère tournoyait en huit à l’infini dans sa tasse en céramique. Elle devait absolument repasser par la boutique pour rendre l’objet emprunté par mégarde. A 8h, elle trouverait sans doute porte close. Elle devra sans doute attendre la fin de la journée, pour se libérer. Quelle idiote !! Comment a-t-elle pu s’enfuir ainsi sans se retourner. Elle vérifia que le bracelet était bien dans la petite poche avant de son sac à dos. Elle sentit le froid du jade entre ses doigts, elle allait enfin pouvoir oublier toute cette histoire.

- Mai on y va ? demanda sa mère, je te dépose au lycée.

En passant devant la boutique, Mai ressentit cette étrange sensation qui la rendait mal à l’aise et angoissée. La journée allait être longue, c’est certain.


-T’as l’air bizarre, tout va bien s’inquiéta Luce, sa meilleure amie.

- Tout va bien, je suis un peu préoccupée avec cet exposé en anglais, je ne suis pas sûr d’être vraiment prête lui mentit son amie.

La matinée venait de s’achever et les deux filles se dirigèrent vers le réfectoire. Elles entendirent au loin un brouhaha et des cris inhabituels provenant du préau. Il se passait quelque chose ! Un attroupement d’une dizaine d’élèves et de surveillants entourait une personne qui semblait être à terre. Une jeune fille était sur le dos, les yeux révulsés : elle convulsait. Un des surveillants lui maintenait la tête, tandis que l’infirmière scolaire essayait de lui ouvrir la bouche pour lui maintenir la langue. Bouches bées et estomaquées les deux filles restèrent immobiles sans bouger, spectatrice impuissante par cette scène horrifique.

D’un mouvement violent Mai jeta son sac à dos par terre, et en sortit le bracelet de la poche avant : une tâche pourpre était apparue sur le bijou en jade.

Les pompiers évacuèrent la victime à l’extérieur de l’établissement. Les jours de cette jeune fille étaient-ils en danger ? Bien que la crise impressionnante selon le chef d’établissement, son pronostic vital n’était pas engagé mais cet incident choqua profondément Mai et la plupart des élèves.

Lorsqu’elle repassa par la boutique pour rendre le bracelet à sa propriétaire. Tout était fermé ! Elle essayer d’apercevoir la veille dame de la veille mais rien ne bougeait. Une personne sortit de la porte d’à côté et vit Mai tournoyer çà et là autour de la vitrine.

- Cette boutique est définitivement fermée mademoiselle !

- Euh, pardon, je voudrais rendre un objet à la propriétaire de la boutique, que j’ai emporté par maladresse.

Vous la connaissez ?

- Vous devez commettre une erreur, cette boutique est abandonnée depuis des décennies. Je connaissais la propriétaire, elle est malheureusement décédée depuis bien longtemps d’une embolie pulmonaire.


Des bruissements, des éclats de voix, des pas. Elle essayait d’ouvrir les yeux mais ses paupières étaient trop lourdes. Elle entendait ce qu’il se passait autour d’elle mais elle n’avait aucune idée ou elle se trouvait. Après plusieurs minutes d’efforts, elle finit par entrouvrir un œil, puis le second. La pièce était très lumineuse voir aveuglante. Mai pris conscience qu’elle se trouvait à l’hôpital allongée mais n’avait aucune idée de la raison de sa présence. Elle testa ses jambes, ses pieds, son bras. Bien qu’engourdis, tous les membres de son corps répondaient normalement à ses sollicitations et surtout elle ne souffrait d’aucun maux.

Une aide-soignante, s’approcha :

- Vous voilà réveillée ! comment vous vous sentez ?

- J’ai l’impression que ça va. Savez-vous pourquoi suis-je ici ? questionna Mai

- Vous avez été admise hier pour une crise d’épilepsie. Vous étiez au Lycée lorsque la crise s’est produit. Vous avez eu des convulsions sévères et prolongées, vous êtes arrivés en urgence avec le VSAV des pompiers. Je vais prévenir vos parents que vous êtes réveillée.

Mai était confuse, prise de vertige la tête lui tournait. Sa mémoire semblait lui jouer des tours : la boutique, le bracelet, la tâche, la crise de la lycéenne pourtant elle se souvenait d’absolument de tout et dans les moindres détails. Elle était divisée entre le soulagement et l’incompréhension.

Désorientée, la gorge sèche elle se redressa et attrapa un verre d’eau sur un petit meuble faisant office de table de nuit. En ouvrant le tiroir, elle trouva son téléphone portable ainsi que quelques affaires personnelles, sa montre et une pince à cheveux. Ce qu’elle ne vit pas, c’est qu’au fond du tiroir était posé le bracelet en jade, à l’intérieur une tâche rouge apparaissait et perçait le dégradé de vert.




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Mario DAngelo verif

Mario Dangelo 1 hour ago

une petite histoire fantastique pleine de suspense. Quelques fautes d'orthographe et d'accccord mais qui ne gâchent pas la lecture.

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