Dépendance affective : dysfonctionnement ou évidence ? ça dépend...
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Dépendance affective : dysfonctionnement ou évidence ? ça dépend...
« Attention à la dépendance affective ! », « Tu devrais soigner ta dépendance affective... » ; le genre de phrases que l’on entend beaucoup ces temps-ci. Le terme « dépendant affectif » est désormais dans le langage courant dès qu’on aborde le thème des sentiments, de l’amour et/ou de l’attachement. À croire que c’est une nouvelle maladie pour laquelle il faudrait vite créer un vaccin histoire d’en être protégé pour toujours (et à tout jamais)… Mais, concrètement, c’est quoi ?
On appelle communément « dépendance affective », le fait d’avoir besoin d’une autre personne. Besoin de la voir, besoin d’être en contact, besoin de la serrer dans ses bras, besoin de l’embrasser et plus si affinités. C’est comme un élément vital, de même que respirer, boire ou manger.
Et si ce besoin n’est pas comblé, on souffre… Ok, je suis assez d’accords avec cette définition.
Mais la question que je me suis posée est : en quoi est-ce mal ? En quoi serait-ce une affliction ? Pourquoi faudrait-il l’éradiquer ?
Nous les humains, sommes des êtres sociaux. Nous sommes faits pour entrer en contact avec les autres. Nous sommes faits pour aller à leur rencontre, échanger des paroles, des gestes, des contacts, et ce, depuis notre naissance.
On sait désormais qu’un nourrisson privé d’attention peut développer, au cours de sa vie, des dysfonctionnements comme des troubles de l’attachement, des retards mentaux et d’autres déficiences psycho-cognitives. On sait aussi qu’un enfant peut se laisser mourir par manque d’affection.
Moi-même, ayant été privé de liens affectifs durant l’enfance et m’étant coupé des autres plus tard dans ma vie d’adulte, j’ai pu constater que certains troubles apparaissaient : déficience des habilités sociales, un état cyclothymique. Une déficience sur le plan intellectuel, notamment dans la concentration, mêlée d’une certaine difficulté à gérer mes émotions ; parfois même l’impression de ne plus en éprouver. Il en découlait un état dépressif chronique dont je n’étais pas forcément conscient.
Et c’est normal : nous ne sommes pas faits pour vivre de la sorte !
Alors oui : je suis dépendant affectif, comme à peu près 100 % des êtres humains de cette planète. Et non, ce n’est pas une maladie qu’il faut soigner à coup de thérapie ou de médocs !
Oserions-nous dire à une mère qui ressent le manque de son enfant qu’elle devrait se faire soigner ? Oserions-nous dire à quelqu’un dont un proche est décédé et qu’il en souffre : « Attention à la dépendance affective hein ! » ? Je ne pense pas, ou alors on manquerait sévèrement d’humanité et d’empathie.
Alors, quand la personne qu’on aime nous manque, quand on ressent le besoin de la voir, de la toucher, de lui parler : pourquoi il y a toujours quelqu’un pour nous sortir : « Oh, là, là, tu es dépendant affectif mon pauvre, vas falloir te soigner et surtout, prend tes distances pour un temps avec cette personne ! » ? N’est-ce pas là complètement absurde comme raisonnement ? N’est-ce pas là un manque d’empathie de la part de celui qui croit prêcher la bonne parole, parfois par facilité, parfois par agacement ?
Qui peut dire sans mentir : « Il n’y a jamais quelqu’un qui me manque » ? Sinon des personnes qui ressentent le besoin de (se) prouver que « ils sont indépendants, des adultes censés… et équilibrés » ?
Alors, je suis bien d’accord, il y a des personnes qui atteignent des extrêmes à ce niveau-là ; il y a des extrêmes en tout.
Cela en amène certains à devenir possessif, jaloux, maladifs… Ils ne lâchent plus d’une semelle l’être aimé, qui devient l’être possédé par la force des choses ; c’est ce qu’on appelle une relation toxique.
Et d’autre, au contraire, se coupent de toute relation dans le but ultime de “ne pas perdre sa liberté” ; comme si aimer ou être aimé était une prison...
Mais il ne faut pas confondre l’extrême et l’intense. L’amour se vit dans la passion et pas dans la passivité, bien sûr, tout n’est qu’une question de nuances…
Cette obsession qu’ont certains de vouloir tout raccrocher à une seule notion, une seule nuance, comme la dépendance affective, fait beaucoup de mal. Cela amène de la culpabilité là où il ne devrait pas y en avoir ; être coupable d’aimer et d’être aimé ? Quelle absurdité !
Ce sont les jugements de ce genre-là qui font parfois le malheur de ceux qu’ils pensent aider, tout en restant pétri dans leurs certitudes…
Ayant moi-même été accusé de dépendance affective, quand je ne faisais qu’exprimer mon affection pour quelqu’un, je peux témoigner que ça fait beaucoup de mal que d’entendre ses sentiments réduits à des termes banalisant. Je sais par expérience combien il est destructeur de voir sa parole et ses sentiments brimés par des personnes qui se pensent motiver par de bonnes intentions.
Vous savez ce que l’on dit de l’enfer et de ses pavés...
Noa Mineilit 4 months ago
Intéressante réflexion ! Cela dit, pour ma part, je voyais plus la dépendance affective comme le fait d'avoir besoin de l'affection de quelqu'un pour être validé en tant que personne, pour s'aimer soi-même en outre. L'amour-propre ne devrait-il pas tenir dans nos mains uniquement ?