Autant vous l’avouer : au lycée, les cours de philo sur le stoïcisme ne m’avaient guère emballée.

À mon goût, il parlait trop de souffrance inévitable et de résignation face au destin… Et cela m’agaçait un peu.

Car à 17 ans, j’envisageais plutôt d’éviter la souffrance. Et je préférais la rébellion à la résignation.

Il faut dire que Monsieur Berthelot, le prof de philo, avait abordé la pensée stoïcienne en nous contant les mésaventures du philosophe Épictète… Lesquelles n’étaient pas des plus joyeuses.

Dans sa jeunesse, Épictète avait été l’esclave d’un maître fort cruel, un certain Épaphrodite.

Un jour, ce dernier lui tordit violemment la jambe. Sans montrer ni douleur ni colère, Épictète l’avertit calmement : "Tu vas me casser la jambe."

Et en effet, ce sadique lui cassa la jambe.

Alors avec flegme, Épictète se contenta de lui dire : " Je te l'avais bien dit ! "

En tant qu’esclave, Épictète savait que la douleur et la violence faisaient partie des épreuves qu'il ne pouvait pas éviter… Mais il avait décidé de rester maître de lui-même et de ses émotions.

Cette anecdote illustre l'idée que la vraie liberté réside dans la maîtrise de notre esprit, indépendamment des circonstances extérieures.

À première vue, le stoïcisme peut rebuter par cette apparente résignation face à la vie. On pourrait croire qu’il enseigne d’accepter tous les événements, sans lutter ni réagir.

Or ce n’est pas le cas !

En réalité, le stoïcisme aiguise la volonté et encourage l'action sur ce que l'on peut changer, tout en restant en paix avec ce qui échappe à notre contrôle.

Au fil des années, j’ai redécouvert toute la puissance de cette philosophie.

Le stoïcisme, c’est un peu comme une recette secrète pour développer votre force intérieure et votre résilience personnelles. Au point de pacifier votre quotidien, de façon très concrète.

Fondé par le Grec Zénon de Citium, le stoïcisme est né au III^ème siècle avant J-C.

Pour atteindre la sérénité intérieure et le bonheur, il prône la maîtrise de soi, l'acceptation des événements extérieurs et le détachement face aux passions.

Admettre qu’il y a des choses qui dépendent de nous et d’autres qui ne dépendent pas de nous

… C’est le principe de base du stoïcisme.

Imaginez que ce weekend, la météo annonce de fortes pluies, alors que depuis des semaines, vous préparez votre grandiose garden party…

Vos lamentations n’y changeront rien ! en revanche, vous pouvez toujours modifier vos plans et organiser la fête, en intérieur.

Le stoïcisme, c’est un peu ça : cesser de s’énerver et se battre en vain contre ce qu’on ne peut pas contrôler… Pour agir avec détermination, dès qu’on le peut.

Prenez l’exemple des embouteillages. Vous êtes en route pour un rendez-vous important et catastrophe… Voici qu’un gros bouchon se forme sur la route.

Deux choix s’offrent à vous : soit vous pestez contre le trafic (ce qui ne vous fera pas rouler plus vite), soit vous prévenez calmement de votre possible retard… Et profitez de ce moment pour écouter un podcast intéressant.

Vous exercez alors votre pouvoir de choix. Vous ne contrôlez pas l’embouteillage, mais vous contrôlez votre attitude (et l’optimisation de votre temps).

Accepter l’inévitable - voire en rire quand c’est possible -

Le stoïcisme nous invite aussi à accepter l'inévitable, y compris les événements aussi peu réjouissants que le vieillissement et la mort.

Dans Les Pensées pour moi-même, Marc Aurèle explique que ce ne sont pas la réalité ou les événements extérieurs qui provoquent notre souffrance, mais plutôt la manière dont nous y réagissons et les jugements que nous portons sur eux.

Quand il dit : « Ne cherche pas à ce que les événements arrivent comme tu le veux, mais veux les événements comme ils arrivent », il n’incite pas à devenir fataliste, mais à apprécier le moment présent, quelles que soient les circonstances.

De nature sombre et très taciturne, mon père s’est métamorphosé, à l’annonce de sa maladie. Militaire de carrière, il avait souffert toute sa vie de stress post-traumatique. Mais la perspective de nous quitter bientôt l’a transformé.

Se sachant condamné, il a vécu le dernier mois de sa vie en nous faisant le plus beau des cadeaux : une bonne humeur et un sourire permanents. Et il a enfin pu nous manifester la tendresse qu’il avait toujours cachée, au fond de lui.

Il est parti alors que nous jouions tous les deux au scrabble, sur son lit. C’était la première fois qu’il jouait au scrabble avec moi. Il allait remporter la partie.

Considérer l'échec comme une opportunité d'apprendre et de grandir

La pensée stoïcienne nous encourage à agir de notre mieux dans chaque situation, sans être obsédé par le résultat. Car elle estime que la valeur se trouve dans l’effort sincère, intense et bien dirigé. Pas dans le succès ou l'échec.

Le stoïcien voit l'échec comme l’occasion de nous renforcer moralement et de cultiver notre sagesse. En exerçant notre résilience et notre capacité à nous relever. Comme le disait Épictète : " Ce qui trouble les hommes, ce ne sont pas les choses, mais les jugements qu'ils portent sur elles."

Ainsi, ce n'est pas l'échec en soi qui compte, mais notre réaction face à celui-ci. Voilà pourquoi Marc Aurèle - encore lui - insistait sur l’importance d’accueillir l'échec avec calme et d’en tirer des leçons pour progresser.

Un des plus grands enseignements du stoïcisme, c’est de garder le contrôle sur ses émotions

C’est comme avoir un super-pouvoir. Imaginez-vous au café, commander un café latte… Et qu’à la place, on vous apporte un double expresso.

Plutôt que vous énerver, vous réagissez comme Épictète l’aurait fait à votre place :

Vous prenez une grande respiration et vous vous souvenez que ce n’est qu’un café - dans lequel vous pouvez faire ajouter du lait -… Alors vous réalisez que ce n’est pas la fin du monde !

Le stoïcien sait que les émotions comme la colère, la frustration ou encore la jalousie, sont souvent des réactions à des choses qu’on ne peut pas contrôler.

Par exemple, votre voisin vient de s’acheter un gros SUV et vous, avec votre petite Dacia, vous vous sentez un peu envieux. Or cette jalousie ne dépend que de vous, pas du voisin.

Le stoïcisme vous encouragerait à vous poser la question : " Pourquoi je me compare ? Est-ce que le fait qu’il roule en gros SUV va changer ma vie ? " (Spoiler Alert : non, sans doute pas).

Pour autant, le stoïcisme n’est en rien une philosophie de passivité

Bien au contraire ! Il nous incite à agir sur ce que nous pouvons changer.

Vous avez un projet en tête mais vous procrastinez parce que ça vous semble trop compliqué ?

Marc Aurèle vous dirait : " Mais bon sang, vas-y, fonce ! Fais ce qui dépend de toi. "

Car si vous ne pouvez pas changer le monde, vous pouvez changer votre manière de le percevoir et d’y vivre.

Si vous rêvez de changer de job parce que votre emploi actuel vous rend malheureux, c’est à vous d’agir. Mettez à jour votre CV, publiez sur Linkedin, explorez de nouvelles options. Vous n’obtiendrez peut-être pas ce nouveau job du jour au lendemain, mais vous ferez tout ce qui est en votre pouvoir pour le trouver, sans être paralysé par la peur de l’échec ou du résultat.

Le bonheur ne réside pas dans l’accumulation de biens matériels mais dans la simplicité

Les stoïciens prônent aussi quelque chose qui échappe à beaucoup, dans ce monde d’hyper-consommation : le bonheur ne réside pas dans l’accumulation de biens matériels, mais dans la simplicité.

Cela ne veut pas dire renoncer à tout, mais simplement réaliser que nos besoins sont souvent bien plus simples que nous l’imaginons.

Si vous avez déjà ressenti une vraie plénitude après avoir trié vos placards et donné tout ce qui ne vous sert plus, vous voyez de quoi je parle.

Moins on en attend, plus on est satisfait. Si vous savez savourer un bon repas, une balade ou un moment en famille sans avoir besoin du dernier iPhone, vous êtes déjà en route vers un état d’esprit plus stoïcien.

Le stoïcisme est un outil pratique pour devenir plus serein et plus heureux

Très concrète, cette philosophie s’applique à la vie de tous les jours. Elle nous apprend à faire la paix avec ce qu’on ne peut pas changer et à agir sur ce qui est à notre portée.

C’est un outil puissant pour rester calme et positif, face aux tracas et aux épreuves de la vie.

Et si vous voulez approfondir, voici ce classique, que je viens d’évoquer : les " Pensées pour moi-même ", de Marc Aurèle.

À la fois empereur et philosophe stoïcien, Marc Aurèle a régné sur l’Empire romain de 161 à 180 après J.-C.. "Pensées pour moi-même" est un recueil de réflexions personnelles, où il explore des thèmes comme la vertu, la maîtrise de soi et l'acceptation du destin.

Que vous désiriez mieux gérer vos émotions, surmonter une épreuve ou accéder à plus de paix intérieure, cette approche philosophique reste incroyablement actuelle et utile.

Alors, pourquoi ne pas explorer la sagesse stoïcienne et découvrir comment elle peut améliorer votre quotidien ?

Merci de m’avoir lue 😊

Maivan Lecoq

Cet article est paru dans 

L’Écho de la Source

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