L'étoffe des rêves
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L'étoffe des rêves
Le temps des métamorphoses (7)
Les Lords
Alain Péters fonde un premier groupe avec les frères Gilbert et Dédé Lebon, les Lords, avec déjà la volonté de sonner rock, anglo-saxon, de ne pas donner dans la variété. D'après Jean-Michel Toquet, dit Zoun, un ami musicien lui aussi membre de Carrousel :
[Alain Péters] était le plus anglais de nous tous, il n'y avait personne qui pouvait chanter mieux que lui les chansons de Led Zeppelin ou des Stones. (Livret Parabolèr)
Mais les Lords ne sont qu'une première étape dans la construction d'ensemble qui va peu à peu se dessiner. Ils ne font guère parler d'eux et, malgré un nom sympathique, cela reste un groupe d'adolescents qu'on ne prend pas encore trop au sérieux, même si les intentions sont déjà là. Ils ne laissent aucune trace, aucun enregistrement, à peine un nom sur une affiche mal imprimée sur du papier vert pâle. On ne sait même pas exactement quels morceaux ils jouaient, où ils se produisaient, sur quelles scènes, dans quels troquets, en première partie ou en tête d'affiche. On ne se souviendra d'eux que comme d'un pas dans le parcours initiatique d'Alain Péters.
Pop Décadence
La seconde formation à laquelle il participe est beaucoup plus intéressante en revanche. Elle a laissé plus de souvenirs que les Lord. Il s'agit de Pop Décadence. Malgré un nom qui sonne un peu comme celui d'un groupe de heavy métal, Pop Décadence va surtout se spécialiser dans les reprises de chansons de rock anglais et américain. Alain Péters et sa clique sont des gentils. On retrouve au sein de cette formation un autre rescapé des Lords, Dédé Lebon à la guitare, ainsi que d'autres noms qui nous deviendront familiers au fur et à mesure de notre avancée de l'histoire d'Alain Péters : Bernard Brancard à la batterie, Joël Gonthier aux percussions, Mascotte au chant et à la guitare, ainsi que quelques musiciens éphémères : André Massena, Ti-Claude Perianon.
Au sein de Pop Décadence, Alain Péters s'affirme. Il fait figure de rock star avec ses pantalons colorés à motifs et ses longs cheveux détachés. C'est sa mère qui lui fabriquait ses tenues de scène d'ailleurs, cousant des franges, taillant, ajoutant des empiècements. Comme il ne trouvait pas les vêtements qu'il voulait dans le commerce, il fallait les faire coudre sur mesure par une ouvrière bienveillante dans du tissu étoilé, dans l'étoffe même des rêves. Ça a un petit côté punk avant la lettre, do it yourself ou bien fais-toi aider par maman, les épingles à nourrice et la teinture en moins. Il faut de toute façon pour pouvoir être crédible aller au bout de sa démarche, pousser la logique jusqu'à son terme, l'éprouver entièrement, être son premier public et son premier critique, il faut fabriquer les vêtements que l'on veut porter et jouer la musique que l'on veut entendre, sinon ça ne vaut rien.
Merci à Eric Ausseil pour l'illustration.