IL FUT À LA VIE,
CE QUE PICASSO EST À LA PEINTURE

Voilà ce que pour seul testament laissa sur sa stèle KING DADDY.

À hanter les deux ponts dignes de son inspiration - Alexandre III et le Pont des Arts - il avait appris à utiliser leur résonance pour mieux laisser porter sa voix. Sous leurs arcades il écartait les bras du bonimenteur prêt à éclairer de sa philosophie le badaud virginal.
De son vivant applaudissements, murmures approbatifs, cris d’émules le suivaient avec respect dans ses allers-retours enrichissant régulièrement sa cour.

Dans une réalité à laquelle il avait renoncé King Daddy avait un fils qu'il n'avait jamais abandonné et une épouse qui ayant accepté son renoncement  sans le vilipender, avait juste précisé avant son départ
qu'elle était :
"incapable de sacrifier livres, stretching et Festival d’Avoriaz à ses aspirations".
Le couple était pourtant demeuré en contact - très rapproché - au prix de bains récursifs.

La raison officieuse

de sa fuite, King Daddy la susurrait à quelques élus :
- Quand nous prenons le temps, ayons conscience de ce que cela implique.

L’officielle

remontait aux événements de 1968.
Jeunes au chômage, mines en crise, ouvriers mal payés …
Autant de lacunes qui donnèrent forme à l’idéal - jusque-là flou - de King soit « Égalité et Rejet de toute forme d’autorité ».

Le pouvoir des mots allait le servir (Chère Me Caint, paix à son âme !)

Entre mendicité et fouilles de poubelles il avait donc enseigné sur les trottoirs.
- On a les épreuves à la mesure de son courage bien que celles qui nous dépassent, nous rongent dans l’attente de leur fin ou la nôtre.

KD partageait volontiers vivres et boissons, la bouteille  - plus que le Saint-Esprit ainsi descendu - amenant ses disciples à distribuer des taloches plutôt que leur pitance.
- Seule une pensée peut frapper ! Marquer les esprits doit être votre seule ambition, contre-attaquait-il.

Identifié aisément à la morgue, il surprit plus d’un en n’affichant aucun signe de décrépitude.

Bien après l’enterrement la tombe était taguée

Photo de couverture et illustration : Chantal Perrin Verdier