

Souvenirs d'une vie vagabonde 6
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Souvenirs d'une vie vagabonde 6
8/ La Chaloupe — L’âge d’or à Saint-François
Puis, la Guadeloupe. La Chaloupe. Un restaurant mythique, un nom que tout le monde connaissait, sur l’île comme sur le continent.
J’ai revendu L’Entracte. Il était temps. J’avais envie de passer à autre chose, de viser plus haut. Et c’est ainsi que j’ai racheté La Chaloupe. Ce n’était pas n’importe quel restaurant : c’était une institution dans toute la Guadeloupe. Un établissement autrefois tenu par Jean-Pierre Coffe et l’un de ses associés. Rien à voir avec L’Entracte. C’était un niveau au-dessus. Une autre dimension.
J'étais assis tous les soirs sur ma terrasse, en chemise blanche, une coupe de champagne à la main, j'accueillais les gens, une poignée de main, un sourire et ils étaient contents.
J’avais un pianiste, Fanfan, et son piano à queue qui attirait le monde tous les soirs, ça et les lumières sur toutes les tables et l'ambiance chaleureuse du restaurant
Fanfan , tous les soirs, prononçait à haute voix, ces mots que je connais par cœur et me font pleurer quelques fois : “ Et pour le patron ….” et il me jouait Take Five, un air de jazz que j’adorais mais que je ne peux plus écouter de peur d’avoir les larmes aux yeux…
C’est là, dans cette grande salle ouverte sur la marina, que j’ai fait certaines des rencontres les plus marquantes de ma vie.
Henri Verneuil venait souvent. Le grand réalisateur, discret, élégant, passionné. Il aimait parler de cinéma, bien sûr, mais aussi de la vie, de l’humain, des liens invisibles qui nous unissent. Il m’a raconté Charles Bronson, cet homme que l’on croyait froid, mais qui saluait chaque membre de l’équipe un à un, toujours avec un mot, un sourire. Il m’a parlé de Fernandel aussi, et de ce tournage où l’humour cachait une grande tendresse.
Nous parlions d’Alain Delon aussi , et une anecdote me revient à ce sujet: j’avais déjà croisé Alain , ou disons qu’il a failli m’écraser… Il était à Marseille pour le tournage du film Borsalino, et il fonçait avec son bolide , casquette vissée sur la tête… Virulent comme je l’étais à l’époque, je crois bien que je le suis resté, je lui ai lancé un regard mauvais. Nos yeux se sont croisés et il a redémarré et j’ai réalisé que je venais de croiser une légende. Des années plus tard nous sommes devenus amis, par l’intermédiaire d’Henri Verneuil, justement. J’ai toujours dit: Alain Delon m’a appris à avoir des rêves et Henri
Verneuil m’a appris à les réaliser…
Ces conversations là, je les garde précieusement. Comme un trésor. Une preuve que même dans ce coin de paradis, on pouvait croiser la grandeur — pas celle qui se montre, mais celle qui écoute, qui respecte, qui transmet.
J’ai aussi croisé Jacques Villeret, avec sa douceur naturelle, son sourire timide et sa gentillesse désarmante. Un jour, il m’a proposé de faire un tennis, en pleine chaleur, sous un soleil de plomb. J’ai ri. Moi, courir après une balle en plein cagnard ? Jamais ! Il a ri aussi. On a partagé ce moment absurde comme on partage un secret entre amis.
Et puis il y avait Laurent Voulzy. Discret, réservé, toujours poli. Il venait, commandait sa citronnelle à l’eau, et s’asseyait en terrasse. Il observait les vagues, les gens, la lumière. Rien de spectaculaire. Juste un homme calme, paisible, dans un lieu qui lui convenait. Il n’avait besoin de rien d’autre. Et moi, je respectais ça profondément.
J’étais chez moi. J’étais le capitaine. Mais la grève est arrivée et je ne pouvais pas me permettre de couler avec mon bateau
J’ai revendu L’Entracte. Il était temps. J’avais envie de passer à autre chose, de viser plus haut. Et c’est ainsi que j’ai racheté La Chaloupe. Ce n’était pas n’importe quel restaurant : c’était une institution dans toute la Guadeloupe. Un établissement autrefois tenu par Jean-Pierre Coffe et l’un de ses associés. Rien à voir avec L’Entracte. C’était un niveau au-dessus. Une autre dimension.
J'étais assis tous les soirs sur ma terrasse, en chemise blanche, une coupe de champagne à la main, j'accueillais les gens, une poignée de main, un sourire et ils étaient contents.
J’avais un pianiste, Fanfan, et son piano à queue qui attirait le monde tous les soirs, ça et les lumières sur toutes les tables et l'ambiance chaleureuse du restaurant
Fanfan , tous les soirs, prononçait à haute voix, ces mots que je connais par cœur et me font pleurer quelques fois : “ Et pour le patron ….” et il me jouait Take Five, un air de jazz que j’adorais mais que je ne peux plus écouter de peur d’avoir les larmes aux yeux…
C’est là, dans cette grande salle ouverte sur la marina, que j’ai fait certaines des rencontres les plus marquantes de ma vie.
Henri Verneuil venait souvent. Le grand réalisateur, discret, élégant, passionné. Il aimait parler de cinéma, bien sûr, mais aussi de la vie, de l’humain, des liens invisibles qui nous unissent. Il m’a raconté Charles Bronson, cet homme que l’on croyait froid, mais qui saluait chaque membre de l’équipe un à un, toujours avec un mot, un sourire. Il m’a parlé de Fernandel aussi, et de ce tournage où l’humour cachait une grande tendresse. Nous parlions d’Alain Delon aussi , et une anecdote me revient à ce sujet: j’avais déjà croisé Alain , ou disons qu’il a failli m’écraser… Il était à Marseille pour le tournage du film Borsalino, et il fonçait avec son bolide , casquette vissée sur la tête… Virulent comme je l’étais à l’époque, je crois bien que je le suis resté, je lui ai lancé un regard mauvais. Nos yeux se sont croisés et il a redémarré et j’ai réalisé que je venais de croiser une légende. Des années plus tard nous sommes devenus amis, par l’intermédiaire d’Henri Verneuil, justement. J’ai toujours dit: Alain Delon m’a appris à avoir des rêves et Henri Verneuil m’a appris à les réaliser…
Ces conversations là, je les garde précieusement. Comme un trésor. Une preuve que même dans ce coin de paradis, on pouvait croiser la grandeur — pas celle qui se montre, mais celle qui écoute, qui respecte, qui transmet.
J’ai aussi croisé Jacques Villeret, avec sa douceur naturelle, son sourire timide et sa gentillesse désarmante. Un jour, il m’a proposé de faire un tennis, en pleine chaleur, sous un soleil de plomb. J’ai ri. Moi, courir après une balle en plein cagnard ? Jamais ! Il a ri aussi. On a partagé ce moment absurde comme on partage un secret entre amis.
Et puis il y avait Laurent Voulzy. Discret, réservé, toujours poli. Il venait, commandait sa citronnelle à l’eau, et s’asseyait en terrasse. Il observait les vagues, les gens, la lumière. Rien de spectaculaire. Juste un homme calme, paisible, dans un lieu qui lui convenait. Il n’avait besoin de rien d’autre. Et moi, je respectais ça profondément.
J’étais chez moi. J’étais le capitaine.
Mais la grève est arrivée et je ne pouvais pas me permettre de couler avec mon bateau.

