Seuls au monde
Su Panodyssey puoi leggere fino a 30 pubblicazioni al mese senza effettuare il login. Divertiti 29 articles da scoprire questo mese.
Per avere accesso illimitato ai contenuti, accedi o crea un account cliccando qui sotto: è gratis!
Accedi
Seuls au monde
La solitude, elle m'a souvent fait rêver. Loin du brouhaha, des transports en commun, des disputes. Seule, avec un livre, devant un film ou dans mon jardin. Oui, la solitude, avant, c'était le rêve.
Puis le rêve est devenu réalité. A l'annonce du confinement, évènement surréaliste, la solitude s'est installée.
Notre maison en bord de route devenait plus agréable. Moins de passage, du silence, de la tranquillité.
Puis, j'avais la chance d'avoir mon jeune chien Marley à mes côtés. Nos promenades, silencieuses, étaient autorisées.
Très rapidement, cette solitude tant fantasmée s'est transformée en cauchemar.
Je souffrais de cet isolement. Des voisins étaient proches mais tellement loin à la fois, derrière cette grande muraille que représentaient les murs, les masques et nos peurs.
Tout semblait irréel
Les pénuries de masques et de gel, les foules dans les supermarchés qui se sont ruées pour tout acheter, tout cela m'a effrayée. La France est un pays développé où nous sommes protégés, et ces évènements m'ont fait prendre conscience de nos limites et de notre fragilité.
Je ne comprenais plus rien à l'actualité. Fallait-il se faire tester ? Rester cloitré chez soi ? Aller voir les personnes âgées pour les aider et les assister ou les laisser isolées pour les protéger ? Quel endroit est essentiel et reste ouvert ? A quelle heure pouvons-nous sortir ? Pour quelles raisons pouvons-nous sortir ? Et simplement : pouvons-nous sortir ?
Les pandémies me semblaient être d'un autre temps. Bien qu'on se sache vulnérables, on oublie souvent à quel point tout est en équilibre et combien un simple évènement, se fusse-t-il déroulé à l'autre bout de la planète, peut tous nous perturber. Ce constat m'a terrorisée. Comme lorsque l'une de nos connaissances décède, la peur au ventre, on réalise que nous ne sommes qu'un grain de sable dont l'existence est éphémère et ne dépend aucunement de notre volonté. C'est cette nouvelle prise de conscience terrifiante qui m'a accompagnée durant des heures, des jours, des mois d'incertitudes et de solitude.
Cette annonce anachronique a marqué le point de départ de vagues. Des vagues de covid 19. Des vagues d'information et de désinformation. Des vagues d'annonces gouvernementales et de retrait desdites annonces.
Un masque jugé inefficace voire dangereux selon la porte-parole du Gouvernement, devenait fondamental et nécessaire quelques mois plus tard. Un professeur en médecine proposait une solution miracle, puis était par la suite discrédité faute de rigueur scientifique.
Le confinement a été souhaitable, puis recommandé, puis considéré comme délétère, insuffisant, nuisible, inacceptable. Les vaccins ont divisé la société en deux : les pros et les antis, parmi lesquels les deux camps comprenaient des personnes simplement paumées, qui souhaitaient faire confiance et espéraient que l'une ou l'autre des solutions serait la meilleure, ou au moins la moins pire.
Durant ce confinement, j'ai lu de nombreux articles, beaucoup de témoignages plus anxiogènes les uns que les autres, m'efforçant de limiter mes lectures à des sites sourcés et sérieux. Untel, seulement âgé de 20 ans était décédé du Covid, sûrement en raison d'anti-inflammatoires. Ils seraient donc à éviter. Une telle a été testée 4 fois négative avant de mourir du Covid. Un test négatif n'implique donc pas que je sois protégée. Il y avait des hécatombes dans les EPHAD, les personnes âgées mouraient seules. Elles mouraient du covid ou de solitude, parfois un peu des deux.
Cette pandémie, rythmée par les décisions gouvernementales, les avis des professionnels de santé, la création des vaccins, l'émergence de variants nous ayant fait réviser l'intégralité de l'alphabet grec, m'a donné le vertige.
Contradictions, incertitudes, inquiétudes, nous étions et sommes tous dans le même bateau. Un unique et même bateau que nous entendons diriger dans des sens contraires pour tenter de s'en sortir indemnes.
Tout mon quotidien a changé
Le confinement, la peur de l'inconnu, des variants, de l'évolution de ce virus auquel nous sommes toujours confrontés, ce n'est que la partie émergée de l'iceberg.
En parallèle, mon quotidien, mon stress, mes inquiétude existent toujours. Ils ne disparaissent pas pour laisser place à cet évènement majeur qui nous bouleverse. Au contraire, ils sont exacerbés par celui-ci.
Le premier confinement a été annoncé le 17 mars 2020, soit un an après mon dépôt de plainte contre l'homme qui m'a violée et six mois après le classement sans suite de cette plainte.
A cette date, mon parcours thérapeutique est devenu plus difficile. La solitude dont je rêvais et que j'avais finalement obtenue avec cette pandémie a freiné ce difficile chemin vers la guérison.
En parallèle, j'allais intégrer master auquel je n'aurais jamais imaginé être acceptée. Moi, la jeune femme que j'étais, issue d'un milieu modeste et qui avait galéré à obtenir une équivalence du baccalauréat quelques années avant, j'allais intégrer un master de droit face au grand Panthéon parisien. Rapidement, ce magnifique cadre dont je n'osais rêver s'est éloigné, puisque c'est depuis mon salon, voire dans mon lit selon les jours, que je participais à mes cours de droit. L'excitation et la fierté ont laissé place à la démotivation.
J'étais un pantin animé devant un écran qui notait machinalement ce qu'il entendait. Une machine à écrire, sans pensée, à tel point que ce n'est qu'en relisant mes notes que je les découvrais.
Je préparais également l'examen du barreau, seule, chez moi. Le taux de réussite est tellement faible, l'avenir tellement incertain, et j'étais si seule, que je n'arrivais pas à imaginer que je pourrais y arriver. La première épreuve m'a annoncé la couleur : le masque, 5 heures d'analyse et de rédaction, une trentaine de pages indigestes à traiter. J'ai passé chacune de mes épreuves et le verdict est tombé : j'avais réussi mes écrits. Il fallait donc aller aux oraux.
Le quotidien rythmé par les conseils de ministres et les allocutions du président ne me permettaient pas d'imaginer comment ceux-ci se dérouleraient. Cachée derrière ma paroi en plexiglas et mon masque, avec des travaux en fond sonore, j'essayais de présenter mon exposé au jury. Quelques semaines plus tard, j'ai su qu'ils n'avaient pas été convaincus.
L'année suivante, j'ai donc présenté de nouveau l'examen. Nouvelle année, nouvelles mesures sanitaires, nouvelles incertitudes. Les écrits se sont très bien passés. J'étais davantage habituée au masque. La trentaine de pages de l'épreuve de 5 heures m'ont beaucoup plu. Les résultats obtenus aux écrits ont été très bons. J'ai donc été davantage confiante pour les oraux. Mes présentations orales, sans paroi en plexiglas ni travaux en fond sonore, mais toujours avec nos masques respectifs, se sont très bien déroulés.
J'étais toujours seule, isolée, loin de ma famille. Enfermée à attendre une autorisation de vivre, à espérer qu'une allocution viendrait briser ce silence pour nous indiquer que ce virus s'est vollatilisé.
Mais il est toujours là, ce covid 19, il est toujours bien présent. Nous avons simplement appris à vivre avec et j'ai appris aussi.
J'ai pu continuer mon parcours thérapeutique. J'ai intégré l'école des avocats. J'ai rencontré des personnes merveilleuses durant les cours dispensés par cette école. J'ai deviné des éclats de rire derrière leurs masques. Nous sommes sortis, nous avons profité, nous avons ri. Ces moments sont devenus plus incroyables qu'avant car je les sais fragiles, et je mesure ma chance. La chance de rire avec mes amis, de profiter avec ma famille, de diner au restaurant avec mon conjoint.
J'ai pris conscience que les choses essentielles, ce ne sont pas les lieux qui ferment ou qui ouvrent, mais les personnes qui nous entourent. Je ne suis heureuse que lorsque nous ne sommes pas seuls au monde.
Elodie Furtak 2 anni fa
Votre texte est fort et puissant. Entre vos mots un peu de tout ce qu'on a vécu. Courage pour la suite
Elise Gouze 2 anni fa
Je vous remercie pour ce commentaire qui me touche beaucoup.
Bon courage à vous également
Al De Leerey 2 anni fa
Témoignage touchant... Qu'on croit ou non à tout ce théâtre qu'a été la pandémie, les ressentis sont les mêmes de deux côtés de la barrière : solitude, découragement, remise en question, peur... et parfois résilience.
Merci pour ce petit texte. En te souhaitant beaucoup de bonheur pour la suite.
Elise Gouze 2 anni fa
Merci infiniment pour ton message. Je te souhaite beaucoup de bonheur également.