Ô Claire de la lune

Elle accueille la vie

En un souffle divin

Une étrange alchimie

Un singulier destin

Que cisèle une plume

Dans le creux de ses mains

Que façonne l'enclume

Résonnant à dessein...

Par les chemins bercée

Elle court dans les champs

Sous les feuilles cuivrées

Que balaye le vent

Ô Claire de la lune

Rêve la jeune enfant

Du mystère des runes

Et des contes troublants.

Des vagues océanes

Murmurent dans les prés

Les prières profanes

Des anciens émigrés

Par-delà les montagnes

Et les flancs enneigés

Par-delà les campagnes

Où ils allaient nu-pieds.

Dans les bras de son père

Elle touche le ciel

Découvre la lumière

Et le bel arc-en-ciel

L'envol des hirondelles

Au-dessus de la cour

La blanche tourterelle

Tout en haut de la tour.

Des abeilles butinent

La rose des pommiers

Elle file en bottine

Aux œufs du poulailler

Elle aime la galette

Et les sablés sucrés

Que sa mère complète

D'un chocolat ambré.

A travers les nuages

Des orages d'été

Y sonnent aux villages

D'innombrables clochers

Parés de leurs dentelles

Pour les festivités

Comme la demoiselle

Qui va se marier.

Entre les maisonnées

Du mont chauve aux toits bleus

Parmi les graminées

Et les pappus soyeux

Elle apprend la nature

Le chant des oisillons

Le nom des créatures

L'élan des papillons.

Dans sa jupette rouge

Belle comme un soleil

Elle vole, elle bouge

Au son du ménestrel

Deux petites couettes

Des yeux malicieux

Elle secoue la tête

Devant le merveilleux.

A côté de la porte

Odette tire l'eau

Qu'ensuite elle porte

Aux flammes du fourneau

Elle effleure les perles

Qui bruissent doucement

De sa voix elle appelle,

Suspend les jeux d'enfants.

Sur la table de ferme

Fume le café chaud

Du lait et de la crème

De beaux petits gâteaux

Elle active les braises

Au sein du potager

S'assoit sur une chaise

Un instant pour souffler.

Le tic-tac de l'horloge

Se mêle au carillon

Ensemble ils font l'éloge

Du temps des traditions

Qui rythme les journées

Des hommes endurcis

Des femmes façonnées

Par le labeur concis.

Galopant guillerette

Derrière le troupeau

Cueillant des pâquerettes

Pour en faire cadeau

Claire esquisse un sourire

Et serre sur son cœur

Une fleur qu'elle admire

L'essence du bonheur.

Léon hèle ses bêtes

Qui paissent au verger

C'est l'heure de la traite

De gestes répétés

Il nettoie les mamelles

Tire sur les trayons

Comme une ritournelle

Chante le blanc bouillon.

La prairie fruitée

Exhale ses parfums

La lueur exaltée

Décline là, enfin

Au bas de la colline

L'Aure, tranquillement

S'écoule et imagine

Des fantômes normands.

Les yeux vers les étoiles

De cette nuit d'été

Sur sa terre natale

A Caumont-l’Eventé

Ô Claire de la lune

Rêve du firmament

Des mystères diurnes

Dans le babil du temps...

c.lair.e

Des fleurs, des feuilles, des papillons colorés,

des escargots, des oiseaux, une plume, la lune et le soleil.

Illustration : c.lair.e