Salariés autistes : 4 répercussions positives de leur intégration
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Salariés autistes : 4 répercussions positives de leur intégration
Alors que les personnes autistes représentent 1% de la population mondiale, en 2014, on estimait qu’entre 76% et 96% des adultes autistes étaient au chômage en Europe. Bien qu’aucune statistique fiable ne soit disponible en France, la situation n’a guère évolué depuis : les entreprises demeurent frileuses à l’idée d’embaucher des collaborateurs porteurs d’autisme, jugeant leur handicap comme un frein à leur intégration et à leur productivité. Cependant, avec de bons aménagements et une pointe de bienveillance, un salarié autiste peut s’épanouir comme n’importe quel autre salarié et même devenir un atout pour son entreprise. Nous vous expliquons les répercussions positives insoupçonnées de l’embauche de salariés autiste pour les entreprises en quatre points.
Préambule : un mot sur l’autisme
L’autisme est une condition neurologique présente dès la naissance de l’individu. Il s’agit d’un handicap, non d’une maladie, bien que l’autisme s’accompagne parfois d’autres troubles comme l’épilepsie, l’anxiété, le syndrome d'Ehlers-Danlos, la déficience intellectuelle, la dépression, la bipolarité, pour ne citer que quelques exemples.
Les autistes ont d’abord des problèmes de communication : le sens social n’est pas inné chez eux, il leur faut apprendre les usages et les appliquer. Aussi ils n’utilisent pas toujours de manière adéquate le langage verbal et non verbal et ils devinent moins aisément l’état d’esprit dans lequel se trouve leur interlocuteur. Ils ne savent ainsi pas forcément adapter leur discours au contexte, font preuve de maladresse, de timidité ou au contraire d’une folle exubérance en société. Ces bizarreries les pénalisent dans les relations interpersonnelles sans parler de l’anxiété sociale qu’un bon nombre d’autiste éprouve au contact des autres.
L’autisme s’accompagne également de particularités sensorielles ; parce que leur cerveau traite différemment les signaux reçus par leur environnement, les bruits, la lumière ou les odeurs trop fortes les gênent. Ces dernières ont des répercussions majeures au quotidien car l’excès continuel de stimulations fatigue les personnes autistes. Aussi, des tâches qui paraissent anodines deviennent pénibles comme conduire, prendre les transports en commun, assister à un séminaire, se concentrer durant une réunion lorsque plusieurs interlocuteurs échangent ensemble, etc. Cependant les personnes autistes peuvent au contraire avoir besoin de stimulations accrues.
Enfin, les personnes autistes ont des comportements répétitifs, des obsessions, des passions très spécifiques et durables dans le temps. Ils se ressourcent en s’adonnant à leurs centres d’intérêts. De manière générale, les changements ont tendance à les angoisser tandis que les routines les rassurent.
Les situations sont très variables, raison pour laquelle les médecins parlent désormais de trouble du spectre autistique (TSA). Chaque individu porteur a des caractéristiques et capacités qui lui sont propres bien qu’il partage à des degrés divers les tendances citées dans les paragraphes précédents.
Pour aller plus loin sur ce sujet, je vous recommande cette page très claire et documentée.
1. Des aménagements positifs pour tous les salariés
À l’heure des grands plateaux open space, du travail collaboratif et du team spirit, on comprend que les nouveaux usages en entreprise mettent les personnes autistes à l’épreuve. Pourtant, ils ne sont pas les seuls à en pâtir. Selon une étude de l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), les open spaces nuisent à la productivité des salariés[1]. De petits gestes comme remplacer les ampoules des néons pour atténuer leur luminosité, mettre des stores aux fenêtres, inviter au calme dans les espaces de travail ne peuvent qu’être positifs pour l’ensemble de l’équipe. Certaines entreprises, pour offrir à leur salarié autiste un cadre favorable, acceptent des horaires de travail flexibles, augmentent la part du télétravail à la demande du salarié ou aménagent un bureau séparé ou un espace de concentration, des mesures dont certains collaborateurs profiteraient volontiers car les autistes ne sont pas les seuls à avoir des besoins spécifiques, exprimés ou non.
Aucun groupe humain n’est uniforme et, bien qu’il soit impossible d’adapter ou de fournir un service à la carte à l’ensemble de l’entreprise, certaines mesures améliorent par ricochet le cadre de vie global des salariés. Sachant que nous passons huit heures par jour au bureau et que nous n’avons pas les mêmes préférences, les mêmes rythmes ni les mêmes caractères, posséder davantage d’options offre à chacun des leviers pour ajuster son travail à son mode de fonctionnement. De plus, la mutualisation des équipements et l’augmentation du télétravail réduisent les coûts.
2. Accès à des talents souvent sous-estimés
Davantage que leurs pairs, les autistes ont du mal accéder à un emploi car ils parviennent rarement au terme du processus de recrutement. Sans le savoir, l’entreprise se prive alors de talents et de compétences opérationnelles chères faute d’avoir su les repérer chez les candidats et faute d’avoir su, côté candidats, les valoriser.
L’envoi du CV et de la lettre de motivation obéissent en effet à des rituels complexes. L’employeur vérifie lors de cette étape préliminaire que le salarié est capable de se couler dans un moule, qu’il respecte et adopte les coutumes du monde de l’entreprise, qu’il en possède le jargon. Il y a peu de place pour l’originalité et encore moins pour ceux qui ne maîtrisent pas les codes implicites qui régissent les échanges professionnels. Pour ne rien arranger, les personnes autistes mésestiment souvent leurs compétences. Ainsi elles aiment volontiers fouiller et creuser un sujet des heures durant pour avoir une vision panoramique mais, bien qu’aux yeux d’un tiers elles soient des expertes, les personnes autistes n’en parlerons pas d’elles-mêmes parce qu’elles ne se trouveront pas assez compétentes. À moins qu’elles noient leur interlocuteur de détails peu pertinents. Ces savoir-faire ne seront en outre pas toujours présents sur le CV ou difficilement mesurables car le candidat n’a pas forcément réalisé une formation certifiante.
Les entreprises exploitent ensuite trop peu les forces inhérentes à l’autisme. Contrairement aux autres salariés, les tâches répétitives et routinières les stimulent. Ils sont autonomes (pour peu qu’on leur ait donné au préalable des instructions claires), respectent les règles et les délais, sont loyaux, ont des facultés organisationnelles accrues. Le salarié autiste quitte rarement une entreprise où il se sent bien, il accumule ainsi de l’expérience, une précieuse expertise et garde en mémoire l’historique des procédures.
Ces forces, certains secteurs s’en sont emparés. Depuis quelques années, on parle surtout des autistes en milieu ordinaire quand on fait référence aux métiers de la Tech. Des cabinets de conseils ou de recrutement se sont même spécialisés dans les profils neuroatypiques. Les autistes, notamment les Asperger, y sont particulièrement recherchés en raison de leurs capacités d’analyse, de leur rigueur et de leur sens du détail. Ils font de très bons développeurs, data scientists ou ingénieurs en informatique, preuve qu’un salarié autiste peut se révéler un excellent atout.
3. Un moyen de s’affirmer en tant qu’entreprise responsable
Outre le fait que les entreprises ont intérêt à embaucher des salariés porteurs d’un handicap pour être en conformité avec la législation et respecter les quotas en vigueur, moins prosaïquement, cette initiative donne une formidable occasion de valoriser sa marque employeur. Les salariés et notamment les générations Y et Z se disent en effet soucieux d’intégrer une entreprise dont les valeurs sont en cohérence avec les leurs. L’établissement d’une politique RH novatrice en matière de handicap aura des répercussions positives puisqu’elle attirera de nouveaux talents par ricochet.
Des entreprises se saisissent d’ailleurs l’arrivée d’un collaborateur handicapé pour initier une dynamique interne au sein des équipes. Elles forment des couples de salariés dont l’un est handicapé[2]. Le second a pour mission de faire découvrir l’entreprise au nouvel arrivant, de le former à ses tâches et de lui transmettre les usages du service. Ce dispositif est appelé pairing. Un tel système serait tout à fait adapté à un salarié porteur d’autisme : dès l’embauche, le salarié autiste serait intégré à une équipe, il acquerrait rapidement la culture d’entreprise et surtout les savoir-être qui, peut-être, lui font défaut.
Aujourd’hui, les entreprises ne doivent plus seulement être performantes dans leur cœur de métier mais prouver qu’elles ont un impact positif sur la société. Aussi, les collaborateurs ne sont pas les seuls à être sensible à de telles initiatives positives en matière d’embauche. Certaines entreprises, à l’instar d’Andros, l’ont compris : après avoir intégré avec succès une main d’œuvre autiste dans une de ses usines sur le territoire français, Andros a entamé une campagne de communication d’envergure[3]. La nouvelle a été relayée par de nombreux média papiers et audiovisuels, une occasion de sensibiliser la clientèle de l’entreprise et d’améliorer son image de marque auprès du grand public.
4. Booster l’innovation en introduisant de l’atypisme dans les équipes
Si le salarié autiste est par essence moins à l’aise dans le travail collaboratif, sa présence au sein de l’équipe demeure un puissant atout pour stimuler la créativité du groupe. Car le salarié porteur d’autisme a une vision des choses différente, complémentaire, qui servira à tous. Il examine les problèmes avec pragmatisme et fait montre d’une meilleure intelligence fluide en moyenne. L’intelligence fluide est la capacité d'analyser de nouvelles situations, d'identifier les tendances et les relations qui sous-tendent des problèmes et de les extrapoler au travers de la logique. Ce type d’intelligence influence la capacité de raisonnement, d’analyse, d’abstraction et de synthèse.
Ainsi, le salarié autiste devient un véritable catalyseur d’innovation. Avoir une équipe plurielle et des profils atypiques représente une ressource précieuse, gage de compétitivité pour toutes les entreprises.
En route vers l'inclusion
Pour pallier les difficultés des salariés autistes, des solutions existent pour les mettre à l’aise et leur donner l’occasion d’apporter leur pierre à l’édifice comme, par exemple, les inviter à s’exprimer ou leur permettre de transmettre à l’écrit leurs idées en amont ou en aval des réunions. Les idées ne manquent pas pour peu qu’on accepte de s’y pencher. Leur intégration n’a donc rien d’insurmontable. Il en va de même pour la plupart des handicaps. Aussi, laissez la porte ouverte aux profils atypiques, et notamment aux salariés autistes, ils peuvent vous apporter beaucoup.
Bibliographie
L'Asperger au travail, Rudy Simone (Trad. Françoise Forin-Mateos), Deboeck supérieur, Paris, 2018.
Rapport du groupe de travail sur l’insertion professionnelle des personnes avec autisme, Centre ressource autisme Bretagne, 2017.
http://www.creai-bretagne.org/images/pdf/rapport_insertion_professionnelle.pdf
« L’insertion des personnes avec TSA : l’expérience à l’usine de Novandie-Andros d’Auneau », Vivre et travailler autrement & Fondation Handicap Malakoff Médéric.
http://www.autismcanwork.org/wp-content/uploads/2018/12/Guide_Novandie_Andros.pdf
« Autisme : le travail d’intégration d’Andros », François Gazaix, Les Echos, 19 septembre 2016.
« L’Intégration de salariés atteints d’autisme et syndrome d’asperger dans l’entreprise ordinaire », Groupe JLO.
https://www.groupe-jlo.com/integration-autisme-syndrome-asperger-entreprise-ordinaire/
[1] Cf. « Le bruit est la première nuisance du travail en open space », Le Point, 2019.
Url : https://www.lepoint.fr/sante/le-bruit-est-la-premiere-nuisance-du-travail-en-open-space-26-09-2019-2337920_40.php [visité le 18.12.2020]
[2] « L’Intégration de salariés atteints d’autisme et syndrome d’asperger dans l’entreprise ordinaire », Groupe JLO.
URL : https://www.groupe-jlo.com/integration-autisme-syndrome-asperger-entreprise-ordinaire/ [visité le 12.12.2020]
[3] Par exemple : « Autisme : le travail d’intégration d’Andros », François Gazaix, Les Echos, 19 septembre 2016.
URL : https://www.lesechos.fr/idees-debats/leadership-management/autisme-le-travail-dintegration-dandros-1246517 [visité le 12.12.2020]