1. Can you hear me know? - Toronto, Canada
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1. Can you hear me know? - Toronto, Canada
1 h du matin. Le calme règne sur le quartier des affaires, entre Front Street et Bloor Street. Les hautes tours arborent pompeusement les différents logos de grandes compagnies canadiennes ou internationales, ayant élu domicile dans cette capitale financière. Malgré les instructions fédérales sur l’économie d’énergie, la plupart des bureaux sont encore éclairés et le resteront inutilement toute la nuit.
Dans les larges avenues, l’absence de véhicules n’entame pas la détermination des feux tricolores. Ils continuent, inlassables, leur travail de régulation et esquissent des arabesques chromatiques dans l’obscurité citadine. Le seul gémissement désormais audible reste celui du dernier tramway. Son refrain mécanique empêche d’ailleurs ses passagers de somnoler. Ces quelques noctambules, pour la plupart des ouvriers quittant les usines à l’ouest de la métropole, retournent dans les faubourgs modestes de Scarborough, plus à l’est.
Alors qu’en surface le tramway s’éloigne du centre-ville, sous terre, les deux lignes de métro s’arrêtent d’un commun accord.
Pour le moment, le monstre citadin s’est endormi. Il ne s’éveillera que dans quelques heures, au son des pas cadencés des milliers d’employés qui déferleront dans ses rues.
Dans le silence ambiant, le bruit de succion de la porte circulaire résonne comme un vacarme d’aspirateur. Un homme déboule en courant de la tour CIBC[1] et s’arrête net au milieu de l’avenue. Son costume d’alpaga clair est froissé, sa chemise blanche, tachée de sueur, sort de son pantalon et sa cravate au nœud affaissé pend de travers. Son regard angoissé trahit la marque d’une indicible peur. Il porte les mains à sa tête et agrippe ses cheveux bruns ébouriffés avec une grimace de souffrance. Entre marche et course, il titube le long de la double ligne jaune qui sépare la chaussée en deux.
— But I did what you asked for, please, oh god please make it stop![2] implore Brian Wessler avant de s’écrouler face contre terre.
Il laisse d’abord échapper un râle d’agonie rauque. Sous l’intensité de la douleur, il se met à hurler, les poings compressés sur les tempes. Son corps est soudain pris de convulsions violentes et ses bras s’agitent tels ceux d’un pantin devenu fou. L’impression qu’il nage une brasse désarticulée sur le bitume surprendrait de réalisme les quelconques badauds, mais à cette heure la voie est déserte, aucun témoin n’assiste à cette scène sordide. D’un coup, son buste s’arque, les muscles tendus à se rompre. Ses yeux se révulsent, sa langue s’étire sur un rictus grotesque, puis tout mouvement cesse. Brian Wessler s’affaisse sur le ventre. Une écume blanchâtre s’échappe de sa bouche entrouverte tandis qu’un filet de sang coule de ses narines et de son oreille gauche. Une petite mare vermillon commence à s’étaler sur l’asphalte en contrastant sur l’une des bandes de peinture jaune-canari.
Le téléphone portable de Brian, qui a glissé de sa poche durant sa chute, repose maintenant à quelques centimètres de ses pieds inertes. Une mélodie aussi joyeuse qu’incongrue raisonne. Elle annonce l’arrivée d’un message instantané qui vient bientôt s’afficher sur le petit écran : « UR dead! »[3]
[1] Canadian Imperial Bank of Commerce
[2] Mais j’ai fait ce que vous avez demandé, s’il vous plait, mon dieu, je vous en prie, faites que ça s’arrête !
[3] Abréviation de « You are dead » — Tu es mort.