Depuis le mois d'octobre 2018, ils se rassemblent une fois par mois devant les mairies du pays. À Paris le 6 septembre dernier, des manifestants du mouvement Nous voulons des coquelicots, lancé par le journaliste de Charlie Hebdo Fabrice Nicolino et l’association Générations Futures il y a tout juste un an, souhaitent obtenir l’interdiction de tous les pesticides en France. Je suis allé à leur rencontre.
© Victor Joly
« Stop aux pesticides, oui aux chrysalides ! » scandent les manifestants du mouvement Nous Voulons des Coquelicots sur la place de l’Hôtel de Ville à Paris, une petite cocarde en forme de coquelicot accroché à leur manteau. La raison ? « On trouve de moins en moins cette jolie fleur, qui a quasiment disparu à cause de l’utilisation des herbicides en agriculture ».
Utilisés pour détruire les mauvaises herbes, les insectes ou encore les champignons, les pesticides sont pour eux un véritable fléau pour la santé qu’il est nécessaire d’interdire : « Ils sont partout ! dans l’eau de pluie, les fruits, l’estomac des abeilles et provoquent beaucoup de maladies ». Les produits phytosanitaires ont été reconnues comme étant la cause de cancers, de maladies de Parkinson, d’infertilités.
« Il faut interdire maintenant les pesticides ! »
© Victor Joly
Si les manifestants se réjouissent aujourd’hui que les concepteurs des pesticides soient désormais poursuivis par la justice, comme l'entreprise agricole Monsanto, condamné pour avoir provoqué le cancer d’un agriculteur américain via un de ses produits, les plans d’action anti-pesticides sont pour eux encore trop timorés. En faisant pression sur le gouvernement, ils espèrent que leur contenu sera bientôt amélioré.
Tous sont d’accord pour dénoncer l'influence des lobbys, dont le « seul objectif est de garantir les rendements agricoles au détriment de la santé humaine. » Les manifestants insistent clairement sur le caractère urgent de la situation : « Il faut interdire maintenant les pesticides ! Pas dans trois ans. Il existe aujourd'hui des dérogations pour beaucoup de pesticides, c'est honteux », me confie Jean-Baptiste Reddé, un activiste rendu célèbre par ses pancartes et que l'on voit presque systématiquement dans les manifestations. Il est vrai qu’avec cinquante-huit demandes contre une moyenne d’environ dix, la France dépasse largement les autres États de l'Union Européenne en matière de dérogations aux restrictions d'usage des pesticides.
Infographie réalisée par Angéline Lunel
Un phénomène « insidieux »
« On est tous contaminés par ces produits chimiques qui ont été mis dans la nature depuis des décennies. On en a tous dans le sang. C'est insidieux. » Si nous sommes tous plus ou moins touchés par le phénomène, ce sont les agriculteurs qui en sont les premières victimes. En France, quatre-cents sont aujourd'hui atteints de cancer à cause de l’utilisation de ces produits. « C’est un crime, non seulement contre l'environnement mais aussi contre l’Humanité », s’insurge Marie, portant son fils dans les bras.
« Il y a beaucoup d'espèces d'animaux et d'insectes qui ont disparu à cause des pesticides. Dans ma campagne, on n'a presque plus d’abeille ni de papillons. Il faut vraiment acheter autrement dès maintenant, consommer différemment, manger moins de viande, acheter bio, se rendre chez le petit éleveur local, arrêter d'acheter dans les supermarchés », continue-t-elle.
Des études récentes du CNRS révèlent que le tiers des oiseaux ont disparu en quinze ans, la moitié des papillons en vingt ans, que les abeilles et les insectes pollinisateurs meurent par milliards, et que les fleurs sauvages deviennent rares.
Lancée le 10 septembre 2018, l’appel à l’interdiction de tous les pesticides a rencontré un franc succès. La pétition a déjà été signée par plus de 800 000 personnes.