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Stéphanie Wismer Cassin : "Les femmes n'osent pas"

Stéphanie Wismer Cassin : "Les femmes n'osent pas"

Publicado el 13, oct, 2019 Actualizado 25, sept, 2020 Economía
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Stéphanie Wismer Cassin : "Les femmes n'osent pas"

Après une rencontre avec une femme SDF qui lui a raconté comment elle avait tenté de créer son entreprise, sans réussite, et la descente aux enfers qui a suivi, Stéphanie Wismer Cassin a pris alors conscience de la nécessité d’améliorer les choses en matière d’entrepreneuriat féminin. En 2013, elle décide  de monter Biilink, un réseau pour startups réservé aux femmes. L’entrepreneuse revient sur son parcours et pose son regard sur l’état actuel de l’entrepreneuriat en France.

 

Dabord, d’où vous est venue cette idée d’aider les entrepreneuses et pourquoi avoir créé Biiliink ?

J’ai crée ma première boite à 23 ans, j’ai commencé en faisant du conseil en stratégie d'entreprise. J'ai donc été formée à la gestion de crise, et de cette spécificité, je me suis dit qu’on avait un état d'esprit en France et en Europe de réaction trop tardive. Cette expérience m'a permis très vite d'être au contact direct de l’humain, que ce soit pour des entreprises, des individus qui voulaient créer des entreprises ou de la gestion de carrière. Je me suis rendue compte qu’au niveau des compétences, il existe une réelle différence entre les hommes et les femmes, on ne fonctionne pas du tout de la même façon. Je me disais que si les femmes entreprenaient autant que les hommes, il y aurait un boom social. Les enfants verraient un modèle de femme qui travaille différemment, en responsabilité. Très souvent les femmes représentent le deuxième revenu d'une famille. Or l’entrepreneuriat, c’est créer de la richesse et du patrimoine : créer des entreprises, c'est créer du capital et le développer, c'est autre chose que d'avoir un salaire tous les mois.

J’ai vraiment cherché à savoir comment les femmes fonctionnaient et comment l’on pouvait les accompagner. Avec Biiliink, mon objectif d'entrepreneur était de créer une offre, pas juste d'accompagner des femmes dans le développement. Je n'avais pas de fortune personnelle à ce moment là, donc il fallait bien que je trouve un modèle à associer à ce que je pouvais faire. Je voulais que Biilink soit un acteur social clé. L’on a développé pas mal de problématiques dont le fait que les femmes manquent de réseau. Je me suis donc dit qu’il fallait créer un outil digital plutôt orienté sur du réseau social.

Quel est le projet d'entrepreneur lancé sur le réseau Biilink que vous avez accompagné qui a vous a rendu le plus fier ?

Je dirais Tykaz, une start-up rennaise qui propose un service de pressing et retoucherie en ligne. C'est le premier pressing connecté. Ce projet m’a vraiment touché. La porteuse de projet avait plus de 50 ans au moment du concours et on y a vraiment vu un souffle de fin de carrière, qu’on peut retrouver parfois dans l'entrepreneuriat et je trouve ça extra. C'est une femme qui a été salariée toute sa vie et qui, à un moment donné, avec de la maturité, s’octroie le droit de dire « j'y vais. »

Quelle sont les différences entre l’image que renvoient les entrepreneurs masculin et leurs homologues féminines ?

Il y a très vite des freins à l'entrepreneuriat féminin qui ne sont pas du tout les mêmes pour des projets dits « au masculin ». Les femmes se demandent tout de suite ce qu’on va penser d’elles, surtout si elles échouent. Au contraire, l’homme va souvent y voir l’occasion de tenter le tout pour le tout et va se sentir en toute puissance au moment de la création du projet et son développement. On a beau dire que la société a évolué, l’image que les femmes pensent qu’elles pourraient renvoyer reste encore un grand frein.

Quelles sont les difficultés que peuvent rencontrer les femmes dans l’entrepreneuriat ?

Elles sont dans leur vie très tôt très mobilisées et centrées sur leur vie de famille et elles n'ouvrent peut être pas les portes ni les fenêtres pour pouvoir accueillir un réseau professionnel. Deuxièmement, même si les femmes se mettent en réseau, elles n'osent souvent pas. Une femme ne va pas oser dire qu’elle a besoin d’aide : elle va très vite dire ça ne va pas mais ne va pas forcément aller chercher les outils ressources externes.

En France, de nombreuses femmes entrepreneuses se retrouvent dans la précarité. Comment pourrait-on expliquer ce phénomène ?

J’ai particulièrement porté mon attention sur le fait d'accompagner des femmes qui avaient pris l'opportunité d'un congé maternité. Une femme va en fait très souvent entreprendre à des moments précis de sa vie où elle pense qu’elle va être plus libre et plus indépendante : la maternité effectivement surtout, mais aussi quand les enfants quittent le domicile familial, par exemple. On a constaté que la maternité est souvent le tremplin pour monter un projet. 

En France, je crois qu’on reste face à une vraie problématique de rentabilité. A l'heure actuelle, on est encore beaucoup sur le fait de vendre une idée, alors que les investisseurs n’en sont en fait plus là du tout. Ce n'est pas tant une idée qui les intéresse mais un concept qui a fait ses preuves et surtout commercialisable. Sinon, ils ne mettront pas au pot et les entrepreneurs ne seront pas accompagnés. Étant donné que les femmes entreprennent à des moments clés et charnières de leur vie, il faut que cela aille très vite car elles ont très peu de temps pour faire leurs preuves. J'ai vu justement une vraie misère sociale s’installer à ce niveau là. Certaines femmes se retrouvent dans une situation financière et sociale terrible.

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