Chapitre 7 : Sait-on seulement qui nous sommes ?
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Chapitre 7 : Sait-on seulement qui nous sommes ?
Image de StockSnap sur Pixabay.com
Gentil, attentionné, à l’écoute à chaque instant, j’avais l’impression d’avoir retrouvé ma grand-mère en lui. Durand les premiers jours passés auprès de lui, j’eus beaucoup de mal à accorder ma confiance, de dévoiler vraiment tout sur moi. Mais, il avait ce côté rassurant, celui où il prenait tous les aspects négatifs pour les rendre plus vivables au quotidien ou, au pire, trouver plus d’impartialité sur les jugements que l’on porte à nos mauvaises expériences. Je ne sais pas par quelle force d’esprit il y parvenait. Peut-être était-ce dû à son grand âge. La sagesse apportée par toutes ces années à subsister.
Nous avions tellement de points en commun. C’était comme si nous devions devenir amis, qu’il était écrit que l’on devait se rencontrer. Je lui apportais ma compagnie, mon aide au quotidien, et lui, son réconfort, sa présence et éventuellement un toit et de quoi manger. Je ne sais pas quelle bonté il m’accepta auprès de lui, mais je sais que j’ai passé les meilleurs moments de ma vie avec cet homme. Je ne culpabilisais plus. Mon lot de questions sans réponses n’était plus un problème. Enfin, si. Une seule me taquinait en permanence. La voix. Cette voix. Celle qu’il a entendue et qui lui a conseillé de me venir en aide. Était-ce la même que celle que j’avais eue ?
Voilà des semaines que j’étais là, à profiter de sa générosité. Je me sentais comme un lâche qui fuyait son passé. Qui acceptait la facilité. Mais j’avais peur de regarder ce qui pouvait bien se cacher derrière tout ça. J’avais peur de voir ce que j’étais devenu. J’avais peur de demander pourquoi, quand je cherchais le repos de l’esprit, lui, cet homme si charmant, était apparu si soudainement devant moi, tel le messie. Je ne pouvais pas tomber mieux. Ma rage, ma hargne s’était envolée. Malgré cela, je ne pus m’empêcher de douter. C’était trop beau pour que cela dur, et, je ne savais pas à ce moment-là à quel point j’avais raison de le penser.
Charles, tel était le prénom de mon hôte. Durand toutes ces journées avec lui, je m’étais contenté que de cela. Et, par pur égoïsme dû à la douleur que je ressentais, jamais je ne pris la peine d’en savoir plus sur lui. Mais, ce jour-ci, quand je pris enfin conscience de mon égocentrisme, certaines révélations me mirent sur le cul.
Il m’avait déjà parlé que, son petit fils, n’avait pas pu le voir comme il le souhaitait. La vérité était tout autre. Il ne le vit qu’à sa naissance. Fâché avec sa fille, il ne put jamais le revoir. Et, à la mort de celle-ci, puis de son beau-fils, l’enfant ne lui avait pas été confié. À cet instant, mon sang ne fit qu’un tour. J’avais peur d’avoir compris mon lien avec cet homme. Pris de panique, il fallait être sûr. Après tout, je me faisais peut-être des idées. Certainement même. Il fallait que j’arrête d’être parano.
En toute innocence, sans même comprendre où je voulais en venir, il répondit tout naturellement à la succession de questions que je lui posais. Je m’étais assis, fort heureusement. Autrement, je serais tombé de haut. L’enfant, son petit fils, le seul enfant que sa fille eue, avait était envoyé chez son ex-femme. Et devinez où elle habitait ? Oui, à Paris. À PARIS ! COMMENT CELA POUVAIT-IL ÊTRE POSSIBLE ? Une coïncidence. Il faut que ce soit une coïncidence. Ça ne peut pas être autre chose.
Arrestag, tel était son nom de famille. Très curieux comme nom. Pas commun. On l’aurait cru sorti tout droit d’un bon jeu de rôle, ou d’un conte pour enfants. J’eus un profond soulagement. Le mien n’avait rien à voir. Léorys de forestys, nom qui n’était vraiment pas simple à porter. Il avait participé aux nombreux heurts, et coups durs de la vie aussi, que je reçus. Ma grand-mère ? Huguette Arzios. Je me sentis soudainement plus léger. Moins encastré dans ma chaise, je repris mon souffle. J’en étais sûr que je me faisais trop de films. Le dramatique, c’était tellement mon quotidien, ma nourriture spirituelle, que j’en voyais partout. Quand j’y pensais, elle aussi avait un nom très particulier. Semblable à l’univers d’un monde fantastique. Mais, bon, tout ceci n’était que des noms de famille après tout, pourquoi devrais-je en chercher l’origine ?
Tout ceci, cependant, n’expliquait pas cette rencontre fortuite. Si elle avait vraiment été d’ailleurs. Et puis… cette voix. Elle n’était pas imaginaire. Et je n’avais pas été le seul à l’entendre.
- Charles ? Je… heu, comment dire ?
- La voix ! Elle t’intrigue n’est-ce pas ?
- Co… comment… ?
- Tu as cet air, parfois, d’incertitude… de doutes qui te rongent.
- Oui, c’est vrai, mais…
- Et, il n’y a qu’au sujet de cette voix que tu n’as pas osé poser de question.
- C’est vrai, mais…
- Il est donc normal de deviner que c’est un sujet qui te turlupine.
- Heu… en effet.
Son raisonnement sonnait si juste, qu’il était difficile de rajouter un quelconque mot dessus. Mais tout de même, étais-je autant un livre ouvert pour lui ? Si c’était le cas, avait-il deviné que je ne lui avais pas tout révélé sur moi ? Sur ces… pouvoirs, si on peut les appeler ainsi. Sur la véritable cause de la mort de ma grand-mère ? Jusqu’ici, je lui avais tout raconté dans les grandes lignes, mais pas les détails qui pouvaient me faire passer pour un fou. Je lui avais expliqué mon… voyage à New York, comme un week-end réalisé avec l’école. Je me sentais mal de lui avoir menti, mais comment faire autrement ? Moi-même, je n’y croyais pas. D’ailleurs, ses dons, cette force incroyable, le fait de rejoindre un lieu en quelques secondes seulement, tout cela n’était peut-être plus en moi. Depuis que je vivais avec lui, je n’avais pas retenté de m’en servir. Il était hors de question qu’un autre incident grave se produise. Et là, perdu dans mes pensées, il me regarda fixement dans les yeux. Ce qu’il avait pu dire à ce moment resta encré à vie dans mon esprit, mais je ne pus jamais avoir d’explication suite à cela, hélas.
- Je connais tous tes tourments, pour les avoir vécus. Tu te doutes de qui je pourrais être pour toi, mais tu es loin de savoir ce que je suis vraiment. Suis tes instincts, ils te guideront vers eux.
Sur ces mots, il eut une quinte de toux extrêmement forte. Il se retourna quand il sortit un mouchoir de sa poche.
Cette image. Celle de ce bout de tissu. Taché de rouge. La couleur du sang, celui de Charles, comment l’oublier ? Impossible. Mon hôte, mon ami, mon confident, celui que je crus voir comme mon grand-père était mourant. J’eus cette pensée totalement égoïste : pourquoi ? Pourquoi avait-il fallu, encore, que l’on me retire un être cher ? Quand est-ce que cette malédiction allait s’arrêter ? Était-ce moi qui étais porteur de morts ? Et si c’était la contrepartie de ces pouvoirs ? Ce serait horrible. Mais alors, qu’étais-je devenu ? Si je portais en moi encore cette particularité d’être un surhomme, étais-je censé être un sauveur ? Un justicier ? Ou… un meurtrier ? Laissant sur son sillage qu’un vent de désolation ou de funestes auspices macabres. Je ne savais pas à cet instant si j’étais le détenteur de la faux, la faucheuse d’âmes, mais, les jours qui suivirent cet échange annoncèrent la fin de mon compagnon, tant apprécier à mon cœur.
La perte, je n’avais connu que cela depuis mon enfance. Mon adolescence ne fut pas mieux. À commencer par mes parents, ma ville d’origine, ma famille par ce biais, et puis venue après ma grand-mère. Quand est-ce que cela allait s’arrêter ? Et là, Charles était inerte devant moi. Dans cette boîte, aussi froide que son corps. Aussi noir que ces vêtements d’apparat. Dans un cadre aussi sombre que mon humeur du moment. J’étais emporté à la fois par une profonde tristesse, mais aussi par la rage, le dégoût de la vie. Je ne pensais qu’à une chose, tout cassé autour de moi. Mais, ce sourire, celui de cet homme qui m’accueillit comme un fils, un membre de sa famille, affichait sur son visage malgré la mort, me ravisa. Même dans cet état, où plus aucune vie ne coulait dans ces veines, il arrivait à m’apaiser. C’était incroyable. Encore aujourd’hui, surtout maintenant que je sais qui je suis, qui il était, je me sers énormément de ce sourire comme une force.
Il avait tout prévu le bougre. Il avait déjà payé son propre enterrement. La cérémonie était déjà orchestrée. Et, le pire, c’est qu’il avait aussi déjà prévu de me léguer sa maison, ses économies. Il y avait de quoi y vivre pour toute une vie, sans travailler un seul jour. Je ne savais pas quoi faire. Accepter son testament, tel un héritage ? Je ne m’en sentais pas légitime.
À ce moment-là, je pris une décision qui, sans le savoir, aller me révéler tout ce que je souhaitais savoir. J’allais découvrir tellement de choses, qu’il me fallut beaucoup de temps pour le réaliser. Tout mon univers allait être chamboulé. Ma façon d’être, de vivre, de penser allait changer. Comme Charles l’avait dit pour lui, je croyais savoir qui j’étais, et j’allais droit devant en ayant la certitude de cela, mais j’étais très loin de savoir ce que j’étais. La vie allait de surprises en surprises, et, même aujourd’hui, j’ai le sentiment qu’elle m’en réserve encore.