Chapitre 12 - Vous êtes une idiote
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Chapitre 12 - Vous êtes une idiote
Strange ne semblait pas vouloir attendre le retour de Scotland Yard avant de continuer les interrogatoires. Le prochain qui allait subir ses questions imprévisibles et son mauvais caractère était le jeune frère de Charles : Edward Pembroke.
Ce dernier avait largement démontré qu’il pouvait se montrer très antipathique lorsqu’ils l’avaient rencontré devant la maison, et même un bon petit-déjeuner n’avait pas réussi à améliorer son humeur. Lorsqu’il était entré dans le salon, il avait considéré le « détective » comme s’il s’agissait d’un fauve particulièrement dangereux. Il s’était installé sur le fauteuil de la même manière que sur un trône en or, le dos raide et droit en les toisant avec supériorité.
— Où se trouve l’inspecteur ? demanda-t-il en remuant à peine les lèvres.
Contrairement à son aîné, sa voix était plus claire et juvénile, identique à celle d’un adulte sortant tout juste de l’adolescence. Cependant, chaque mouvement de son corps criait qu’il n’avait aucune envie de parler aux deux hommes.
— Parti, répondit simplement Strange en haussant les épaules. Mais en général, c’est moi qui pose les questions. D’ailleurs, en voici une : quel est votre problème, exactement ?
— Je vous demande pardon ? se vexa son interlocuteur en passant une main sur ses cheveux bruns coiffés.
— Non, je ne vous ai pas demandé de vous excuser, répliqua l’enquêteur en faisant mine de ne pas comprendre, presque avec un visage d’ange innocent. Je vous ai demandé quel était votre problème ? Est-ce que vous souffrez d’une douleur particulièrement violente ? Vous ne vous sentez pas très bien ? Votre frère vous a fait une mauvaise plaisanterie ?
— Non, pas du tout ! s’exclama Edward avec impatience. Pourquoi me demandez-vous cela ?
— J’essaye désespérément de trouver la raison de votre mine rébarbative. Ah, je pense que j’ai deviné ! Ne serait-ce pas parce qu’en tant que fils cadet, vous n’hériterez pas de la plupart des biens de votre défunt père ?
La délicatesse ne devait vraiment pas être son point fort, mais au moins, il avait l’avait le talent de déstabiliser ses suspects. Le jeune homme le fixa avec un mélange intéressant de visage scandalisé et d’expression franchement surprise.
— Vous en avez, du toupet ! siffla-t-il avec fureur.
— Je sais, répondit simplement Sullivan en approuvant d’un hochement de tête. Après tout, votre mère, votre sœur et vous n’hériterez que des miettes alors que votre frère recevra la plus grande part de sa fortune et de ses possessions. Mais dites-moi un peu : où étiez-vous lors de la soirée organisée par votre père ?
— Je vous interdis de me parler sur ce ton ! s’exclama le brun en serrant les poings. Restez un peu à votre place !
— Teh, ce serait plutôt à moi de vous faire la remarque ! rétorqua le noiraud en croisant bras et jambes. Nous devons avoir une bonne dizaine d’années d’écart au minimum. Vos parents ne vous ont donc pas appris à traiter vos aînés avec un peu plus d’égard ?
— Nous n’appartenons pas au même monde, gronda Edward avec dégoût. Ne me mettez pas dans le même panier que vous !
— Vous voyez, Wilson, soupira l’enquêteur d’un air dépité. C’est là le problème des nobles : ils pensent toujours que leur vie vaut plus cher que celle des autres !
Il glissa sa main dans sa veste et en ressortit la liste des invités à la soirée. Il déplia la feuille et la déposa à plat sur la table. Il posa son doigt devant une ligne avec un sourire amusé.
— Puisque vous êtes apparemment plus instruit que moi, pourriez-vous lire ce nom, je vous prie ? demanda-t-il avec un rictus sournois qui n’indiquait rien de bon. Et vous devez sans doute pouvoir me dire de qui il s’agit.
— Kieran Strange, lut le noble à voix haute. Oui, je l’ai déjà vu, c’est le sous-secrétaire du ministère de l’Intérieur. Un noble de pure souche !
— Exact ! s’exclama son interlocuteur avec satisfaction. Et il est également mon grand frère.
— Pardon ?!
Cette fois, il était évident qu’Edward était pris de court. Il avait presque bondi de son fauteuil, les yeux ronds d’étonnement. Alexander comprenait un peu sa surprise : les deux frères n’avaient presque pas de points communs en dehors de cheveux noirs.
— Je suis le fils cadet, je n’ai donc hérité ni des titres ni de la propriété, continua Sullivan sans paraître furieux de sa situation.
— Je n’étais même pas au courant… qu’il avait un frère… bredouilla le brun avec hésitation.
— C’est bon, n’essayez pas de trouver une quelconque excuse pour votre comportement désagréable ! le coupa l’enquêteur avec impatience. Si cela peut vous rassurer, je partage le même sentiment que vous : le mépris. Maintenant, voulez-vous bien me dire où vous vous trouviez lors de la soirée de votre père ?
— Je suis resté en compagnie de Mère, répondit le jeune homme, un peu perdu dans le fil de ses pensées. Si je ne suis pas à ses côtés, elle est très vite gagnée par l’ennui.
— Saviez-vous que votre frère et votre père s’étaient disputés ce soir-là ?
— Oui, à vrai dire, il est plutôt difficile de ne pas le remarquer. Mettre notre père en colère était vraiment très facile, mais le calmer, c’était une autre affaire.
— Comment vous entendiez-vous avec lui ?
Le brun hésita quelques secondes, avant de finalement répondre.
— Pour être honnête, peu de gens l’appréciaient, et je ne le portais pas dans mon cœur non plus. Il ne se souciait que de ses investissements, et il nous délaissait totalement, nous, ses enfants et son épouse. Il était tellement occupé que nous ne le voyions que très peu de temps. Vous devez savoir ce que c’est, je suppose…
— Pas vraiment, répliqua Strange en reprenant sa feuille. Mon père est mort avant que je ne puisse me disputer avec lui. Concernant le testament, saviez-vous qui en était le bénéficiaire ?
— C’est Charles, bien sûr, répondit immédiatement Edward. Sauf en cas de conflit avec Père. Mais il me semble que le dernier testament distribue la majorité des biens à Charles.
— Intéressant… murmura le noiraud pour lui-même. Bon, je n’ai rien d’autre à vous dire pour l’instant. Vous pouvez partir et veuillez appeler votre mère.
Alexander resta silencieux sur le temps que le jeune homme quitte la pièce. Il avait l’étrange impression que cet interrogatoire avait été plus court que les précédents, comme si son compère avait voulu en finir au plus vite.
— Vous n’avez pas tardé avec lui, commenta-t-il dès que la porte fut refermée.
— Celui-là me met mal à l’aise, murmura l’enquêteur en massant délicatement sa nuque. Il méprise autant les nobles que le reste du monde… la seule personne pour qui il semble avoir un tant soit peu d’estime, c’est sa mère.
— Et vous, vous ne méprisez pas la noblesse ? ironisa le soldat en haussant un sourcil.
— Oui, mais pas tout le reste de la population ! protesta Sullivan, piqué au vif. Je ne vois qu’une seule raison qui pourrait le pousser à tuer son père mais ça…
— Vous vouliez me voir ?
La veuve venait de les rejoindre dans le salon, et Strange s’interrompit immédiatement. Il lui fit signe de s’installer, ce qu’elle fit, mais il resta muet plus d’une minute.
— Le plus jeune de vos fils, déclara-t-il en parlant lentement, il semble vous vouer une admiration sans bornes…
— En effet, confirma-t-elle non sans fierté. Edward a toujours été le plus attentionné des trois ! Charles ne rêve que d’aventures romanesques et Isabel veut se trouver un mari au plus vite et quitter le foyer. Edward est plus attaché à moi que son frère et sa sœur. C’est vraiment un garçon adorable.
Les deux hommes échangèrent un regard sceptique à l’entente du mot « adorable ». « Déplaisant » aurait été plus proche de leur vision du personnage.
— Où étiez-vous lors de la réception de votre mari ?
— J’étais avec Edward, justement. Dès qu’il me voit seule, il se sent obligé de me tenir compagnie. J’ai essayé de lui faire comprendre que cela ne me dérangeait pas, que le calme était reposant, mais rien à faire ! Pourtant, j’aimerais bien qu’il essaye de se trouver une charmante épouse avec qui il pourra fonder sa famille…
— Et concernant l’aîné, il avait apparemment un différend avec son père, est-ce vrai ?
— Malheureusement oui, soupira la femme. J’ai vainement essayé de les raisonner plusieurs fois. J’avais demandé à Henry de se montrer plus tolérant et patient avec Charles, que les conflits ne mèneraient à rien. Et j’ai essayé de faire comprendre à mon fils que son père était dans une situation compliquée et qu’il devait lui accorder un peu de temps de réflexion…
La pensée de son défunt mari fit remonter les larmes à ses yeux et elle tenta maladroitement de masquer son émotion.
— Je suis désolée, murmura-t-elle en chassant les larmes de son pouce. S’il vous plaît, dites-moi que vous avez une piste pour retrouver le coupable !
Le soldat fixa son colocataire, comme pour essayer de deviner s’il allait faire preuve d’empathie et essayer de la réconforter, ou se montrer franc et admettre qu’ils n’avaient aucune idée concrète de l’identité du — ou plutôt « des » — meurtrier.
— Dans la mesure où le tueur est soit vous soit l’un de vos enfants, répondit finalement Strange, je ne suis pas sûr que même si je vous disais que j’avais une piste, vous en seriez plus heureuse pour autant.
— Vous accusez mes enfants ? s’étrangla la veuve, à mi-chemin entre la colère et la détresse. Pourquoi serait-ce forcément l’un d’entre nous ? Après tout, il y avait aussi les domestiques !
— Mais aucun des indices retrouvés dans la chambre ne pointe vers cette piste, répliqua platement l’enquêteur. Aucun des domestiques ne pouvait vraiment tirer profit de ce meurtre !
Son interlocutrice resta silencieuse sous le regard impitoyable de l’ex-inspecteur. Alexander fixait son compagnon avec insistance, analysant le moindre de ses gestes.
— Je dois vous avertir, continua Sullivan avec froideur, que si vous décidez de garder une information hors de ma portée pour tenter de protéger vos enfants, vous courrez de grands risques. Non seulement je finirai par le découvrir tôt ou tard, mais l’inspecteur-en-chef pourrait décider de vous arrêter pour obstruction d’enquête, voire complicité de meurtre. Alors si vous voulez me dire quelque chose, c’est maintenant…
Cette fois-ci, les larmes coulèrent réellement sur les joues pâles de la veuve. Elle sanglota silencieusement quelques instants, avant qu’une phrase ne s’échappe finalement de ses lèvres.
— Le stylet qui a tué Henry… il faisait partie d’une collection…
— Je le sais.
— Cette collection appartient à Edward…
Le noiraud poussa un profond soupir en cachant son visage dans ses mains, comme s’il était sur le point d’exploser de rage. Il appuya ses coudes sur ses genoux, la tête penchée en avant.
— Je suis désolée… murmura la jeune femme avec désespoir. Je craignais que vous accusiez mon fils… il est tellement gentil, il n’aurait jamais fait une chose pareille !
— Vous… haleta Strange en se pinçant le haut du nez. Vous… êtes… vraiment… une… sombre idiote !
La violence de son propos choqua tellement la mère qu’elle se tut immédiatement, et même ses pleurs avaient cessé. L’enquêteur ne bougeait toujours pas, même si le tapotement agacé de son pied sur le tapis était un marqueur de sa colère difficilement contenue.
— Il ne vous est pas venu une minute à l’esprit que si le tueur avait pu prendre un de ces stylets pour tuer votre mari, il aurait pu en prendre un autre pour vous tuer, vous ?! Mais non, vous avez raison ! Il valait mieux protéger votre fils et laisser des armes en circulation pour le premier meurtrier qui passe ! C’était tellement plus intelligent !
— Strange, calmez-vous, susurra Alexander à mi-voix.
— Me calmer ?! rétorqua son colocataire en se redressant d’un coup, le regard remplit de fureur. Et puis quoi encore ! Qui avait connaissance de l’existence de cette collection ?
La veuve hésita quelques secondes avant de répondre.
— Il n’y a que moi et Edward… souffla-t-elle, la respiration saccadée.
— Je crois que je ne me suis pas bien fait comprendre, gronda l’enquêteur en lui adressant un regard incendiaire. Qui avait connaissance de cette collection, et ne me mentez surtout pas !
À nouveau, le militaire vit dans son regard ses peurs et ses doutes, comme si elle essayait de mesurer l’importance de son aveu.
— Toute la famille, admit-elle à mi-voix.
L’ancien policier serra le poing si fort que les jointures de ses phalanges devinrent blanches. Il sembla à deux doigts de frapper la table basse, mais au prix d’un effort surhumain, se retint.
— Je vais hurler… chuchota-t-il pour lui-même. J’ai besoin d’air !
Il se leva brusquement du canapé et se précipita à l’extérieur. Alexander se lança sur ses talons de peur qu’il fasse une quelconque idiotie qu’il pourrait regretter par la suite. En sortant, il se heurta à l’inspecter Carter, qui semblait manifestement surpris de voir les deux compères quitter la maison comme des boulets de canon.
— Mais que diable se passe-t-il ?! s’exclama-t-il en voyant son ex-subordonné tourner en rond comme un lion en cage.
— Je vous l’ai dit, chef, ricana Patel, Strange est complètement fêlé !
Le noiraud tourna brusquement la tête vers lui, ses yeux bleus avaient l’air de le transpercer. Malheureusement, le sergent se révélait être plutôt dérangeant lorsqu’il s’agissait d’apaiser un Strange particulièrement sur les nerfs.
— Lui, je vais me le faire, gronda-t-il en serrant le poing.
Au moment où il s’élançait vers le policier, Alexander passa ses bras autour de ses épaules pour l’empêcher d’avancer. Il avait pour lui sa taille supplémentaire et sa force physique, mais il devait reconnaître que son colocataire se débattait comme un beau diable.
— Retournez à l’intérieur, inspecteur, conseilla le blond en reculant prudemment. Allez-y aussi, sergent, je vais essayer de le calmer !
— Lâchez-moi, Wilson ! rugit Sullivan en essayant de se libérer. Je vais faire en sorte que son arbre généalogique prenne fin immédiatement !
— Frapper… le sergent, aussi tentant soit… ce geste, haleta le militaire en resserrant sa prise, vous amènera… tout droit en cellule !
— Je vous ai dit de me lâcher !
L’enquêteur lui mit un puissant coup de coude dans les côtes flottantes, et au moment où il sentit les doigts du soldat se décrisper, il se dégagea d’un brusque mouvement d’épaule. Mais il ne put pas faire trois pas avant que son colocataire ne l’attrape par le bras pour se forcer à se retourner. Autour d’eux, les policiers ne semblaient pas savoir s’ils devaient intervenir pour arrêter le fauve ou rester prudemment en dehors de cela. Ils choisirent la seconde option et rentrèrent prudemment à l’intérieur de la maison.
— Calmez-vous ! tonna Alexander avec fermeté.
— Patel ! Reviens ici, espèce de froussard !
— J’ai dit du calme !
Il aurait préféré ne pas en arriver jusque-là, mais il ne voyait pas d’autre moyen de l’arrêter. Il attrapa le tissu des épaules de sa veste pour mettre Strange face à lui, avant de lui asséner un violent coup de genou dans l’estomac. Le souffle coupé, le noiraud se plia en deux sous la douleur. Voyant qu’il allait tomber, son compagnon passa son bras autour de sa nuque. Sullivan prit soudainement une longue inspiration sifflante comme s’il était jusque-là en apnée, sa main libre crispée sur ses côtes. Le trainant à moitié, Alexander l’aida à gagner le perron de la maison et le fit s’asseoir sur les marches.
— Vous êtes calmé, à présent ? interrogea le soldat en voyant sa grimace douloureuse.
— Un peu… que je suis calmé, souffla son interlocuteur d’une voix éraillée. C’est tout juste si… je peux respirer…
— Désolé, mais j’ai dit à votre frère que je prendrai un minimum soin de vous.
— Vous avez… une drôle de manière de vous y prendre…
— Je préfère vous frapper moi-même et contrôler mes gestes plutôt que de laisser le sergent vous attaquer, expliqua Alexander en esquissant un sourire. J’espère que vous ne m’en voulez pas trop.
— Un peu… mais si vous me ramenez à York Street, alors je passerais l’éponge…
— Strange, voulez-vous bien m’expliquer comment vous avez pu découvrir que le stylet appartenait à Edward Pembroke ?!
La voix de Carter en provenance du hall trahissait une certaine impatience et surtout, une curiosité dévorante.
— Oh pitié, murmura le noiraud dans un appel à l’aide évident en posant son front sur ses genoux
Le policier arriva à côté de lui, attendant visiblement une réponse de sa part. Ayant compris que son compère voulait juste s’échapper, ce fut le blond qui prit la parole avec le ton le plus innocent possible.
— Je suis désolé, inspecteur, mais pour qu’il arrête sa crise de nerfs, j’ai été obligé d’employer une méthode un peu brutale et je crains qu’il soit un peu sonné…
L’officier le fixa quelques secondes, avant de hausser un sourcil. Manifestement, il ne croyait pas du tout à cette excuse et il n’avait pas tout à fait tort de douter d’eux. Il s’accroupit à côté de son ancien collègue et l’attrapa par une épaule en le secouant vigoureusement.
— Strange ! Répondez-moi !
Rentrant dans la stratégie de son complice, l’enquêteur ne résista pas et se laissa ébranler comme une poupée de chiffon. Il retomba contre Alexander en jouant l’inconscient.
— Strange, vous saviez que Patel allait être promu inspecteur ? continua Carter en changeant totalement le sujet de conversation.
Devant l’absence totale de réaction de l’intéressé, le brun se redressa en passant une main dans sa nuque.
— Ça alors ! Il est vraiment secoué s’il ne dit rien en entendant ça. Je pense que vous devriez le ramener chez vous, Mr Wilson.
— Oui, je crois que c’est mieux, répondit le blond en imitant parfaitement la voix de l’homme inquiet.
— Vous pouvez prendre une voiture de Scotland Yard, proposa le policier avant d’appeler un de ses hommes. Troy, amenez-les à York Street, puis revenez ici. Voulez-vous un peu d’aide pour le porter ?
— Non, ça ira, je vous remercie, déclina Alexander. Il est étonnamment léger !
Il passa un bras sous ses genoux et l’autre dans son dos avant de se relever. Strange jouait admirablement bien son personnage évanoui. Cependant, le militaire n’avait pas menti en disant qu’il ne pesait pas très lourd, son compagnon lui semblait plus léger que certains des paquetages qu’il avait porté pendant la guerre.
Il l’installa dans la voiture, salua brièvement Carter, et bientôt, ils purent quitter Grosvenor Square. Sullivan rouvrit lentement les yeux.
— Je suis étonnamment léger ? répéta-t-il en desserrant à peine les dents pour ne pas se faire entendre du policier, la voix chargée de menace. Qu’est-ce que je suis censé comprendre, Wilson ?
— Que vous avez vraiment besoin de manger un solide repas ce midi, répondit l’intéressé avec un sourire paisible.