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Une Singuliere dedicace

Une Singuliere dedicace

Published Nov 28, 2024 Updated Nov 28, 2024 Historical
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Une Singuliere dedicace


La journée avait mal commencée, mon éditeur m’envoyait dans un hypermarché de banlieue dédicacer mon dernier livre, vous en avez déjà vu de ces auteurs débutants ?, tristes a leurs table, que

personne ne viens voir, ou pour leur demander qu’est-ce que vous écrivez ? ou leur demander un rayon, et qui se confondent presque en excuses.

« ha mais non, je ne suis pas employé du magasin, je suis auteur de romans…», avant que vous n’ayez fini de répondre, le demandeur est déjà parti.


De plus j’avais la malchance d’avoir un presque homonyme célèbre, de mon nom Michel Kerenek, on me confondait souvent avec l’autre Yan Kefe…, il y avait même une dame une fois qui m’avait demandé de lui dédicacer un livre a son nom.


J’en serais presque venu au meurtre, je m’imaginait emporté de force par la sécurité , que les journaux fassent leurs gros titres, « UN AUTEUR DEVENU FOU », que d’éminents psychiatres se pencheraient sur mon cas, mais rien de cela , je suis plutôt placide, STOÏQUE, dirais mon dentiste.


Cette pauvre dame qui me prenait pour ce que je n’étais pas, alors je lui ai dédicacé son livre


« Affectueusement, votre ami, Yan Kefe… » , j’étais passé du côté obscur, je devenait un faussaire pour ne pas lui faire de peine, moi Michel Kerenec, professeur d’histoire et auteurs de livres sur la

grande guerre.


J’avais commencé vingt ans plus tôt, a l’occasion du déménagement de ma grand-mère, a la suite d’un dégât des eaux, j’avais trouvé une malle emplie de vieux journaux, de lettres, des morceaux de

tissus jaunis par le temps, des photos aussi.


Grand-mère m’avais expliqué que son mari, Gildas, était mort a la guerre a la bataille du chemin des dames, ainsi que deux de ces frères, elle avait conservé des centaines de lettres, les coupures de

journaux, tout ce qui lui rappelais son cher disparut.


Me sachant passionner d’histoire, elle me les avait confié, j’avais entrepris un travail de fourmis, de recoupement, rencontrés les derniers survivants de la grande guerre, et j’avais pu écrire un

premier livre, dans une collection connue uniquement des passionnés d’histoire.


Puis en 2014, alors que j’écrivais mon dernier roman, « la fleur au fusil », je fus contacté par un éditeur connu, a l’occasion du centenaire de la grande guerre, ils rééditeraient mes livres et vu le succès qu’avait connus le dernier, me prédisait un avenir radieux dans l’Edition.


Mais tout comme ma grand-mère me l’avait appris, elle m’avait élevé cinq ans ou ma mère s’était retrouvé en sanatorium, je gardais les pieds solidement ancrés dans la terre.

Ou en étais-je ?

Ha oui, j’arrivais a l’accueil du magasin, je patientais quand un employé en gilet rouge vint me chercher, il m’installa sur une table à l’entrée, une pauvre table nue, avec une pile de livres a côté, une pancarte indiquait « Dédicace de M KERENEC », de la même couleur que celle qui annonçait trois pour le prix de deux au rayon en face , désespérant.


Comme je lui demandais si je pouvais avoir un café, il me dit que oui, mais vu la moue qu’il faisait je n’étais pas près de l’avoir.


Je m’installais donc, ma pile à ma gauche, mon stylo à droite, prêt a dégainer des « amicalement, avec toute mon amitié, a Viviane, Josette ou Martine.. », oui il a rarement des jeunes parmi mes

lecteurs, quoique mon éditeur me dise le contraire.


Je m’étais donc résolu à être souriant, à répondre à la moindre de leurs sollicitation…

Encore aurait-il fallu que je sois sollicité…

Les couples passaient devant moi, me regardant, je lançais un bonjour, la plupart du temps ils ne répondaient pas, le banlieusard est ainsi, méfiant a tout ce qui peut être sympathique,

« Que veut il me vendre lui avec son bonjour …qu’est-ce que sa cache… »

Un ou deux s’aventuraient à regarder la couverture, une dame avec un enfant de demanda même

- de quoi ça parle ?

Ni bonjour ni rien,

j’avais envie de lui Crier « je suis un être humain madame, alors bonjour »

- de la guerre de 14-18, du départ des jeunes vers le front

- c’est drôle ?

Je serais mon stylo dans la paume de ma main, dans ma tête résonnait les violons de psychose, je me voyais poignarder la mégère a grand coup de stylo bille devant son rejeton qui sortait les doigts

de son nez.


- la guerre est rarement drôle, chère madame

- je ne lis que des

livres drôles.., dit-elle en tournant les talons


Je l’imaginais assez bien sur une plage, la cellulite dégoulinante sur son maillot, avec un rire gras des blagues d’un vieux « les roucasseries » tenus de la main droite et d’un sandwich a la mayonnaise dansl’autre main, tandis que son mari reluqueraient sous ses lunettes de soleil quelques jeunettes en pensant à ce qu’aurait pu être sa vie s’il ne l’avait jamais rencontrée.


Il y eu un passage à vide , j’en profitais pour me rendre à l’entrée du centre ou j’avais aperçu un semblant de café , le TGV pris 4 heures plus tôt dans mes Cévennes me pesait , j’avais envie d’un grand crème et d’un croissant, bien que celui-ci semblait tout droit sorti du rayon boulangerie du même magasin, je l’avalais puis fit un tour dans le magasin, en ce samedi , il était rempli de

démonstrateur de toute sorte , qui vous font gouter , qui du fromage , qui des saucisses,

qui la dernière cafetière a la mode, avant de retourner dans mon rayon.


Fallait-il que je fasse comme eux ?


« Madame laisser-moi vous faire gouter cette délicieuse couverture,ou cette magnifique page quarante-deux, vous sentez ce gout de marne, légèrement épicé de poudre à canon »

Je fus surpris de voir une jeune fille d’une vingtaine d’année, assis sur la chaise qui m’avait été attribuée.


- excusez-moi, mais je crois que vous êtes a ma place

La jeune fille, se leva en s’excusant

- non c’est moi,

je croyais que vous n’étiez pas là, la chaise vide …


- il n’y a pas de mal, ce livre vous intéresse ?

- il m’interpelle, je me demande comment on a pu faire croire que la guerre allait finir

dans trois mois ?

- cela s’appelle la manipulation de masse, les soldats étaient persuadés d’avoir la meilleure armée du monde … et en face pareil, toute la communication de l’époque était dirigée vers ce but


Nous partîmes alors vers une discussion que j’affectionne particulièrement, expliquer a des personnes qui n’ont connus ni des survivants et leurs conjointes, les tenants et les aboutissants de cette guerre.

Peut-être fut-ce la passion que nous mettions dans nos propos, mais un petit attroupement

s’était formé, et de plus en plus de dédicaces m’étaient demandées.

Je lui demandais son prénom, elle s’appelait Marie rose, et la prié de bien vouloir déjeuner avec

moi, j’appris qu’elle était étudiante en histoire, et qu’elle préparait une thèse sur napoléon, troisième du nom.


- vous savez que beaucoup de jeunes remettent en cause le nombre de morts 14-18, me dit elle


- c’est le problème de votre génération, elle a tellement d’information qu’elle remet tout en cause, le 11 septembre… , la Shoa , elle voit des complots partout !

- vous exagérez !

- vous savez, alors que j’étais très jeune, je me suis couché très tard ce soir de 1969 pour voir sur de très mauvaises images, le premier homme marcher sur la lune, ce jour-là j’étais fier de faire partie de

l’humanité, alors quand j’entends dire que ça a été monté par la CIA…

- je l’entends bien, mais on peut le prouver

- oui mais quand on veut démontrer quelque chose, vous en avez toujours un pour vous dire, c’est bizarre autant de preuves, c’est bien que c’est truqué.

- la théorie du complot, je connais

- il faut toujours se demander qui a intérêt à fausser la donne, toujours garder son esprit critique, garder l’esprit ouvert pour ne pas se faire manipuler.

Elle dut s’absenter l’après-midi, je continuais les dédicaces sans enthousiasme


Lorsque une personne s’approchait, je lui lançais « avez-vous eu un grand père mort a la première guerre mondiale ?», bien souvent la réponse était oui, je pouvais alors lui expliquer qu’à la fin 1918, une génération entière avait été décimée, sans qu’aucun des ministres ou généraux ne fut jamais poursuivis par la justice, étonnante conception du sacrifice suprême d’un autre temps.


Le centre commercial commençait a se vider, je n’avais plus dédicacé depuis près de quarante-cinq minutes, et songeait sérieusement à partir quand Marie rose réapparut

Elle me tendit une vieille photo d’un homme jeune, probablement vingt ans, son grand père Léon en tenue de poilu, il était mort quatre jours avant l’armistice.

Nous discutâmes longuement, Marie rose me raccompagna jusqu'à la gare de Lyon, je lui donnais l’adresse de mon éditeur, ainsi nous pourrions rester en contact

Je pris un livre dans ma besace et lui fit la dédicace suivante « a la mémoire de tous les Léon et Gildas, et de tous les autres avec toute mon affection, Michel Kerenec »


Je m’en retournais dans ma solitude cévenole, propice a la méditation sur le monde.


Marie rose m’écrivit par la suite, je l’aidais du mieux que je pus a finir sa thèse, bien que je tenais le « petit napoléon » en sainte horreur, le considérant plus comme un dictateur que comme un chef d’état.


J’ai souvent une pensée pour Marie rose quand je dédicace, me disant qu’elle a été la plus singulière dédicace de ma vie, et l’une des plus belles.







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