12- Lettre d'adieu
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12- Lettre d'adieu
le 01/07/2020
Mathieu,
Tu ne comprends pas ce qui se passe car ce que je crois n'existe que dans ma tête.
Tu n'as aucune idée des sentiments qui m'étreignent, tu ne te doutes pas un instant de ce que je ressens.
En fait, je pense que tu regardes tout le monde comme ça, mais moi ça m'a touché, ça m'a ému. Combien de fois j'ai rêvé que nos corps se rapprochaient, timidement mais comme aimantés l'un vers l'autre, avec cette irrésistible énergie qui te fait oublier le temps et le lieu où tu es.
Je me suis enfermée dans une relation unijambiste dans laquelle je t'ai pris pour le bon, pour le futur homme de ma seconde tranche de vie. J'ai eu cette sensation très rapidement car je crois que tu m'as plu dès le premier regard. Ensuite chacune de nos interactions allait renforcer ces sentiments d'affection et d'attirance que j’éprouvais pour toi.
Qui es-tu ? Je n'en sais trop rien. Je ne connais de toi que les bribes que tu as bien voulu partager, dans un contexte que tu voulais sans équivoque. Je ne te connais pas. Mais j'aimais nos jeux ambigus auxquels tu jouais peut-être trop innocemment. Tu te demanderas sûrement encore longtemps si tu étais ambigü.
J'ai sûrement projeté sur toi mes idéaux de complétude. Je suis attirée chez toi par ce que je ne suis pas : posé et réfléchi, pudique et mystérieux, observateur et naïf, intellectuellement brillant. Je suis aussi attirée par ce que nous sommes : joueurs et sociables, honnêtes et respectueux, hyper-sensibles, dotés du sens de l'humour et du décalage, façonnés de valeurs et épris de liberté.
Je t'ai tant aimé, si fort et violemment. Mais j'aimais sûrement un sujet idéal déconnecté de ton être.
J'arrive enfin à me projeter hors de cette relation unilatérale et à pouvoir espérer un peu d'oxygène. Car oui j'ai étouffé, suffoqué, j'ai souffert, pleuré, enragé, j'ai plongé dans le désespoir et la tristesse de me sentir si loin, rejetée. Aujourd'hui je sais que je veux partir, que je vais partir, m'éloigner pour ne plus te voir, ne plus croiser ton corps, ton regard sombre, tes mains longilignes, ne plus sentir ton odeur, ne plus entendre ta voix, ne plus te désirer enfin.
Ça me demande beaucoup de courage.
Je veux être capable de démarrer un nouveau cycle dans lequel tu ne joueras aucun rôle. Je souhaite me sentir libre, presque de tomber les masques et être capable d'assumer qui je suis et ce que je veux, sans peur de me juger moi-même. Je veux ressentir que je sers à quelque chose, que mes actes et ma personne ont du sens. Je vais développer les qualités que j'aimais chez toi en moi, me les approprier et les faire mienne. Pour ça je te remercie d'être passé dans ma vie.
Tu es un homme merveilleux, mais tu n'es pas pour moi.
Je passe ma route et te souhaite un bon chemin sur celle que tu as choisie.
Affectueusement,
Carmen