« Le matin

la langue touillette

n’avait pas fait long feu

avant de donner 

dans les sommations assassines. 

Boulets de bouche 

comme des coups de butoir

qui ne demandent pas la permission d’entrer 

déboulent dans mon coeur grenadine 

et font tomber à l’eau

mes gardes qui la voient venir

mais qui jusqu’au bout

ne veulent jamais y croire. 

Allô, maman, bobo … 

Je ravale ma couleur

et ma coupe mauvais genre.

J’esquive les effusions 

de sa harde-hyène

par une meute de silences.

Mais le soir exténue

les bonnes résolutions

quand la rancoeur hache menu 

les mains qui sont là,

mais jamais assez. 

« Ma pauvre fille,

toi , ta « connaïveté » 

et ta poésie inutile.

Y a qu’à te voir

et là où tu en es ! » 

Cocktail de crachats de mots

allume ma mèche rebelle.

Émotions Molotov ! 

Je tiens tête à demi-maux :

l’alcool bouclier 

et la douleur bue 

pour ne pas partir en vrille.

Pour ne pas m’en aller.

Et le lendemain ... le lendemain, 

comme tous les autres lendemains,

on s’embrasse du bout des lèvres pincées

qui gardent secret les regrets.

Du moins les miens :

« Maman : si tu savais 

comme j’ai mal à ton coeur

qui ne sait pas m’aimer. »

Parce que je suis ta fille.

Ta seule enfant. 

Et qu’il n’est plus temps 

de te laisser boire la tasse de ta vie, 

long fleuve de bile,

seule, toute seule …

Comme tu t’y es toujours noyée. »