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L'enlèvement de Proserpine

L'enlèvement de Proserpine

Veröffentlicht am 14, Mai, 2020 Aktualisiert am 28, Sept., 2020 Kurioses
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L'enlèvement de Proserpine

Il existe un petit endroit, tout à fait charmant, en plein Paris, tout là-haut presqu'en au milieu du ciel clos composé de nuages bleus et blancs qui circulent rapidement par le vent interposé. En écoutant, ce délicieux zéphir du printemps naissant, me parler d'amour, sur un vieux banc de bois qui a perdu sa couleur, la tête levée, j'ai surpris le tracé fugitif du char du cher Pluton, le célèbre Dieux des Enfers, emportant à toute vitesse la sihouette d'une jeune femme, les cheveux détachés, la fille de Jupiter et de Cérès, vers une destinée fermée en temps ordinaire. J'ai alors rêvé d'être à sa place, lieu qui n'est pas à mes yeux, un renoncement à la vie fraîche et limpide mais plutôt un symbôle d'accés à la liberté parfaite et retrouvée. Je comprenais en même temps, qu'il n'y avait pas de limite temporelle à cet enlèvement que je trouvais indicible et osé, peut-être même inadmissible. Pourquoi cette femme nommée Proserpine et pas moi?

Vous pouvez encore l'admirer certains soirs cléments, après une envolée de marches qui mène à une butte sur laquelle est plantée un portillon en fer rouillé par les pluies diluviennes de ces dernières décennies. Il reste des traces de leur passage, fugitifs liens tissés les nuits de mélancolie rouge quand le phénix s'embrase.Le chariot a une jolie serrure composée d'arabesques et de nombreuses circonvolutions. Il est très agréable de grimper pieds nus, le nez au vent. Les enjambées sont certes bourrues et parfois l'aide des branches des arbres est bien précieuse. Elles nous séparent d'un trait béant de la terre et du ciel si pur que cela en devient indécent. Dans la folle course vers le séjour des morts, la charette de ma belle  aux épines a pris aussi, quand on regarde précisément son dessin, des allures de délicates ferronneries.

Alors, derrière une sorte de petit jardinet où poussent des fleurs sans symétrie, j'ai découvert une porte grinçante qui délimite une coquette maison habillée de son minuscule jardin de poupée et qui sent bon la nostalgie. Alice dans son pays merveilleux en a conçu les moindres détails, les fêtes et les galettes aussi. Tout cela donne un air de campagne à caresser un bon pain doré ou à lui casser la croûte, avec son galant pour compagnie. Dans un treillage de saccades en cascades, une adorable gloriette oubliée indique son intimité fragile et toute en dentelle. Les fleurs se précipitent sur Posperpine pour lui former une agréable corbeille et la retenir de sans aller sur un parterre agréable à fouler. Comme le maître de cette nature folle doit être un grand créateur! Mais il doit l'ignorer car les génies sont toujours humbles. Je pense cahin caha à Jean-Jacques Rousseau si épris d'esprit au naturel, que dans sa campagne bohème, il s'était déguisé en satyre à sabots pour courir après la ribambelle de jouvencelles qui se chamaillaient autour de lui, nombreuses les jours de Sainte Catherine. Dans la passerelle pavée aux amoureux, les jours de vacances uniquement, un chat noir en céramique veille sur ce passage ; la queue dressée et les yeux jaunes. Je crois bien que des chatières existent rien que pour lui et dans lesquelles il se glisse pour chasser les souris qui dédalent dans le lierre en liesse.

Je croise, chaque jour, sur ce même escalier tortueux, un vieux monsieur qui soulève son chapeau quand il me voit passer la tête dans les nuages, batifoler avec Proserpine qui n'a de cesse de faire des cahotteries dans le plus grand des secrets mettant tout son péril en un immense fatras. J'ai l'impression que de l'herbe lui pousse entre les oreilles et cela lui donne un air très joyeux tout en lui vidant la tête car il sème partout où il va et à tout vent des graines  vertes qui tombent sans cesse de ses poches trouées! C'est ainsi que les pâquerettes naissent sur le macadam! Figurez vous que l'autre jour, il m'a avoué un peu timide qu'il offrait toujours la même fleur à son épouse bien-aimée: Des camélias ouvertes au petit matin! La seule fleur capable à ses yeux de les emmener à l'opéra sans bourse déliée, par ses airs d'ingénue couverte de velours rouge cramoisi.

_" C'est une question d'oeil ou d'observation mais pas de raisonnement " me répétait en boucle ce suranné viellard.

_" Ha oui je sais vous avez horreur des intellectuels! " était alors ma réponse sans cesse recommancée.

Il lui écrivait aussi des poèmes mais n'avait jamais réussi à tenir un crayon de couleur sous son toit d'ardoises grises et sa lucarne couleur mine de plomb, aujourd' hui totalement en friche. Tout cela tenait par on ne sait quel miracle et c'est bien émouvant. Et oh! Splendide surprise, un jour il m'a remis un papier qui avait perdu sa couleur bleu tendre d'origine, sur lequel était griffonnée à la va vite ces quelques mots que je vous recopie ici:

Ma douce amie: Vous avez la grâce fragile et tragique des nymphes vivaces des sous-bois mousseux. Si je pouvais vous séquestrer, je vous enlèverez à votre triste sort et tant que vous êtes encore fraîche dans votre robe de soie. Obligée par la mort de flétrir, je voudrais vous serrer dans mes bras en croix. Vous êtes ma Psyché qu'on assassine. Oh! supplice doux, ne vous en allez pas sans mon fatal choix!

Du grand siècle! Quelle plume gorgée d'émotions retenues et de fulgurance avouée. Je sais, par une indiscrétion des alentours, qu'il gagnait de maigres revenus en vendant ses feuilles place du Tertre, souvent pleine de gens du peuple comme lui, mais aussi de particuliers fortunéns, de touristes dépenaillés. Puis, il comptait ses sous sur une table en bois avec une chandelle dessus. Je lui ai demandé si sa dulcinée avait trouvé un certain goût à son florilège? Magnifiée par mon imagination fantasque, j'ai observé cet homme ridé avec son nez en champignon, me faire sa réponse tout recroquevillé comme un arbre centenaire, tout en se transformant, devant mes yeux ébahis en la figure magistrale de Pluton:

- "Vous ne l'avez pas connue! Elle avait une vie très mouvementée et je sais qu'elle ne m'a jamais aimé, je vous le concède! Elle dansait au Moulin avec la complicité d'un homme à chapeau haut. Un certain Degas! Vous auriez vu la sensualité de ses figures! Elle dansait pour lui et pas pour moi  cette horrible coquine! Mais qu'avait t-il de plus ce bossu de surcroit? Certainement pas un grand format! Ha mais pardonnez moi ! Je deviens salace, aigri et bouguon ! Alors en poète, j'ai tenté de transformer ma misérable vie de solitaire!

L'épisode qui suit est dramatique. Dans un souffle baroque, il se mit à pleurer tout en se mouchant avec force dans son grand mouchoir. Je ne savais pas quoi faire de ce pauvre malheureux! Mais sans m'apitoyer, avec une tendresse toute en retenue infinie, je lui ai tendu, un peu lasse un panier de grand teint, contenant tout un frichtis pour dessiner et beaucoup de pastels  en méli-mélo. Nous avions la végétaion pittoresque pour fond de décor autour de nous. je l'ai invité à s'asseoir sur les marches, à la lumière du soleil déclinant et parmi une fine mousse verte qui s'affirmait sans humilité.Voilà ce que je lui ai murmuré:

- " Les liens qui vous lient à l'âme de votre épouse ne sont pas brisés par ses infidélités! Croyez moi car l'amour est toujours plus fort que les bassesses charnelles! Connaissez vous un beau dessin de Pierre-Paul Prud'hon qui a pour titre: l'Ame brisant les liens qui l'attachent à la terre? On y voit une femme ailée, les bras tendus. C'est l'Ame qui tente de séloigner des tourments de la vie qui sont représentés par un serpent. C'est le serpent des envieux, il représente le mal et ceux qui aspirent toujours à posséder les objets du voisin! Il s'appelle l'Envie. Moi je répéte que c'est assez vilain de penser que les autres sont mieux, ou de considérer que leurs sorts sont plus agréables. On pourrait presque penser à un enlèvement au sérail, mais c'est elle toute seule qui part dans sa quête de nouveaux ennuis. Elle aspire en fait à s'échapper de l''enfert sur terre. Chacun doit assumer son destin, vous ne croyez pas? Et puis avoir de la dépendance affective c'est un concept un peu révolu. Vous n'allez pas offrir votre tête de médusé aux premières zombies allumées qui passent devant vous! Ce n'est pas ce que on peut appeler grossièrement des opportunités de salon, des rencontres avec des lendemains. Allez ouste! Chassez moi votre chagrin et causons dans ce clair de lune qui donne une belle lumière à vos cheveux argentés! Vous voyez comme le temps passe quand on se sent utile? Si cela se trouve votre Egdard Degas qui était tout de même un grand artiste a pu la trainer par les cheveux pour la faire jouer à la danseuse. on ne sait rien de la vie privée des gens. Son impudente beauté a du mettre aussi la chevelure de Degas en désordre de grand combat. De nos jours, il y a beaucoup d'affaires sexuelles, vous le savez bien puisque vous lisez les journaux, n'est ce pas ? Bon alors, à demain et avec audace! Je vous souhaite de dormir en mettant votre fort tempérament sous l'oreiller, et de le resortir pour rédiger vos poème. Oh mais regardez le ciel qui se découpe, je pense que ces lignes courbes indiquent que Pluton a renoncé à enlever Proserpine décidément trop capricieuse! "

 

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