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Chapitre 9 : Décors mortuaires

Chapitre 9 : Décors mortuaires

Veröffentlicht am 24, Nov., 2021 Aktualisiert am 24, Nov., 2021 Kurioses
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Chapitre 9 : Décors mortuaires

Image de Envasa sur pixabay

 

J’ai toujours détesté parler de la mort, ou même ressentir sa présence. Ne serait-ce que d’aller voir les défunts lors de leur saint jour, la Toussaint était un véritable défi pour moi. D’ailleurs, vous constaterez que c’est l’œuvre d’un pape que de la célébrer le 1er novembre. Alors que la fête des Morts, Samhain, se trouve être la nuit qui précède ce jour. Les chrétiens ne font décidément jamais rien comme les autres. Toujours leurs grains de sel à jeter par-dessus l’épaule pour exorciser leurs différences.

J’étais assis là, à prier un Dieu qui n’était pas le mien, à désirer un avenir meilleur, plus serein. Sans grande conviction, sans réel optimisme, j’attendais un signe, une lueur d’espoir. Je ne pensais pas jusqu’à lors qu’il puisse exister des personnes possédant des dons aussi puissants. Étais-je le seul dans ce cas ? Non, j’en étais certain. Enfin, je tentais de m’en persuader.

Un flash me vint, comme une révélation, une voie que j’avais oublié d’explorer : l’impasse des Ixbrucs ! Tous ces événements insensés avaient débuté là-bas. Mes souvenirs restaient troubles à ce sujet. J’avais l’impression d’y avoir subi des tortures. Rien que d’y penser, mon ventre me faisait un mal de chien. Ma tête enfouie dans ces pensées de douleurs intenses, je ne vis pas le sol se dérober face à moi. La terre laissa peu à peu place à une sorte de grotte. Des escaliers de pierres se dessinèrent et permettaient d’y descendre. Quand je fus enfin conscient de ce qui se produisait, j’eus un bref recul, me faisant tomber sur les gravats.

Me relevant comme dans une scène tournée au ralenti d’un grand film d’action à gros budget, je pus m’apercevoir que j’avais devant moi ; un caveau. Comment avais-je fait pour le révéler ? Par mes prières ? Ou était-ce juste dû au fait que je m’étais agenouillé sur le prie-Dieu ? Comment savoir ? Ce qui me parut bizarre, c’est que personne ne remarqua cette apparition. D’ailleurs, personne ne s’était aperçu de ma présence. En même temps, dans un cimetière, qui voudrait voir qui y traîne ses guêtres. De vieilles mamies gâteuses ? Des commères de bas étage ? De jeunes gens entraînés ici de force par leur aîné qui s’ennuieraient à mort ? À mort ? Ahah, le vilain jeu de mots. Il n’y avait vraiment que moi pour dénoter de telles conneries dans mes propos, dans des conditions comme celles-ci. Peut-être était-ce cette pointe de légèreté, que j’osais m’accorder, qui m’avait gardé en vie jusqu’à maintenant.

Ne cherchant pas plus longtemps pourquoi personne ne remarquait toutes les bizarreries qui passaient ici, je pris la folle décision de descendre. Je n’avais pourtant pas de torches, mais j’avais l’impression que je n’en aurais pas besoin. Une fois en bas de la quinzaine de marches, une plaque de pierre se mit à recouvrir de nouveau le sol au-dessus de ma tête. Pris de panique, je tentais, en vain, de remonter pour sortir. J’étais enfermé.

Le souffle commença à me manquer. Mon pouls battait la chamade. Je ne voyais rien. N’arrivant pas à garder mon calme, je tentais de me téléporter ailleurs. Bien sûr, cela fonctionne que quand ça en a envie. Profitant d’avoir les yeux fermés, j’essayais de réduire mon stress. J’inspirais longuement pour expirer en douceur. Cet exercice avait toujours le don de me donner envie de dormir. Mais là, pour une fois, cela me permit de reprendre mon calme.

Quand j’ouvris les yeux, ma vision était soudainement plus claire. J’aperçus de mieux en mieux l’intérieur de ce caveau. J’avais l’impression que l’on avait éclairé cet endroit si lugubre, même si ce ne fut point le cas. L’air avait beau manquer, je respirais tout à fait normalement. Ajoutant tout cela à la bizarrerie de la situation, je voyais comme des inscriptions égyptiennes sur les murs. À moins qu’il ne s’agisse de consigne de lavage. Sans m’en rendre vraiment compte, j’eus un léger rictus. Comment, crétin que j’étais, pouvais-je penser à de telles inepties dans ce genre d’endroit ? L’humour. C’était finalement ma principale arme pour dédramatiser. Si j’avais eu un royaume, le burlesque et les clowneries seraient rois en la demeure.

J’avançais pas à pas dans cette inconnue morbide et morose, l’exact inverse de ce dont j’avais besoin. À chaque craquement que j’entendais, j’avais peur d’avoir mis le pied sur un quelconque ossement. Je me voyais mal tombé nez à nez avec des cadavres, sortant de leur tombe fraîchement ouverte. En parlant de ça, ce n’était pas ici que l’on pouvait accuser d’une note de chauffage onéreuse. Il faisait frisquet. Extrêmement frisquet. J’avais le bout des doigts qui commençait à geler. Mon visage semblait crispé, dû à la morsure du froid. Chaque respiration semblait me geler le cerveau. Au moins, j’ai su à partir de ce jour que j’en avais un, c’était déjà une bonne chose de faite.

Je ne sais pas ce qu’il m’a pris, mais je me mis à vouloir toucher les inscriptions au mur. D’ailleurs, de manière générale, depuis la rencontre avec les deux gars de l’impasse d’Ixbrucs, chacune de mes actions me paraissait irraisonnée et irréfléchie. Tout le contraire de ce que j’étais avant. Avant eux. Un avant Ixbrucs.

Mes yeux me jouaient certainement des tours, mais certaines d’elles semblaient s’illuminer. Au point où j’en étais, plus rien ne me surprenait. Je continuais ainsi Durand quelques minutes, jusqu’à ce qu’elles soient toutes éclairées. Je m’attendais à ce que la terre s’écroule sous mes pieds, qu’un épais nuage toxique prenne place, qu’un passage secret s’ouvre, mais non. Trop cliché.

Tous ces hiéroglyphes m’étaient totalement inconnus. Si elles devaient me révéler quoi que ce soit, j’étais mal, car rien ne me permettait de les déchiffrer. Malgré cela, j’eus la présence d’esprit de prendre une photo avec mon smartphone de fortune. Un i-phoune. Une repompe d’une marque très connue, mais en moins bien. Beaucoup… moins bien. Leur logo représentait une poire avec deux trous de dents, faites par un serpent selon le mythe.  

Après quelques flashages, et vérifications de la qualité des prises, il fallait que je continue. Je ne pouvais pas me permettre de rester ici des lustres à contempler ce… magnifique décor, digne de ces scènes sombres et effrayantes de nos plus grands films d’horreur. Vous savez ? Ceux où le budget ketchup est vraiment énorme. Ne sachant pas où je devais aller, je marchais sans réfléchir. Jusqu’à ce que je vois, au loin, une écriture plus facile à lire pour moi. D’abord difficile à cerner, je décidais de poser ma main dessus, comme avec les hiéroglyphes. Par chance, mon stratagème fonctionna. Les lettres s’allumèrent une à une, telles des bougies flamboyantes. Les mots qui se dessinaient à la flamme de mes ardeurs furent terrifiants.

Des noms. Toute une série de prénoms de personnes était écrite ici. Une bonne partie m’était inconnue, mais… certains d’entre eux me firent tomber à la renverse.

Où est-ce que j’étais encore ? Tout ceci ne pouvait pas être une coïncidence. On se jouait de moi, et mes nerfs étaient sur le point de craquer. Il fallait que je sorte, là tout de suite, absolument, par tous les moyens. Je recommençais à suffoquer, ma vision redevint trouble et sombre. Je pris ma tête entre les mains et, comme pour relâcher la pression, je lâchai un hurlement violent.

Sans comprendre ni pourquoi ni comment, le mur en face de moi s’effrita, jusqu’à tomber en ruine. Un passage. Le passage que j’attendais tant. Celui qui me permit enfin de sortir d’ici. Je n’attendis ni une ni deux pour l’emprunter et revoir la lumière du jour. À peine étais-je dehors, que tout s’écroula derrière moi, ne laissant aucune chance d’y retourner. En même temps, je n’en avais pas l’intention.

Fatigué, moralement et physiquement, je ne pus retenir ma chute. Fort heureusement pour moi, j’avais atterri sur un beau parterre d’herbe et de petites fleurs jaunes et violettes, amortissant en partie le choc avec le sol.

Je ne pus résister à l’appel de Morphée. Ces bras m’accueillirent comme un tendre oreiller. Mon corps s’adonna au monde des rêves, et ce, jusqu’au petit matin.

 

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