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Love & Mercy (Bill Pohlad, 2014)

Love & Mercy (Bill Pohlad, 2014)

Veröffentlicht am 28, Nov., 2019 Aktualisiert am 27, Feb., 2021 Kultur
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Love & Mercy (Bill Pohlad, 2014)

Avant d'aller voir "Love & Mercy" au cinéma, je n'avais des Beach Boys qu'une vague idée, aussi superficielle que la partie du générique qui évoque à l'aide d'une esthétique vintage l'affichage marketing "sea, sand, sun and surfin USA" du groupe. J'en suis sortie profondément remuée par la personnalité de Brian Wilson, le portrait délicat et juste qui est fait de lui et une seule idée en tête: acheter "Pet Sounds" au plus vite, son chef d'oeuvre introspectif qui est au cœur du film (avec la symphonie de poche "Good Vibrations"). L'autre partie du générique, en rupture totale avec l'image extravertie du groupe fait écho à cette œuvre intimiste en montrant un écran noir traversés par des éclairs sonores. Et une grande partie du film reconstitue avec un souci du détail qui tue sa création et son enregistrement. On y voit un Brian Wilson (joué par un Paul DANO exceptionnel) qui tel une antenne se connecte aux flux énergétiques de l'univers qui le traversent (nombre de ses gestes et attitudes relèvent du Qi-Gong) avec ou sans prise de drogue. En dépit des considérations commerciales de sa famille qui ne comprennent pas sa musique, Brian Wilson maintient le cap, poussé par une impérieuse nécessité plus forte que tout "Il faut que cela sorte". Par ailleurs, le film s'ouvre sur les propos par lequel il exprime ses doutes et ses peurs à propos de cette voix intérieure qui l'inspire mais sur laquelle il n'a aucun contrôle: "Ca me fait peur parfois de ne pas savoir d'où cela vient. Comme si quelqu'un d'autre était en moi. Et si ça disparaissait, que je n'y arrivais plus, je ferais quoi?" Dans l'autre volet du film, on retrouve le même Brian Wilson plus âgé (joué par John CUSACK qui est lui aussi très convaincant), celui qui ne se soucie que de cette voix intérieure qui le guide et se fiche du commerce. ("Ce n'est pas important, c'est de l'ego"). Bien que cette voix ne lui permette plus à ce moment-là de créer mais lui indique comment sortir de sa dépression et de son isolement. Brian Wilson décrit comme un "enfant dans un corps d'adulte" a en effet tout de la proie facile sur laquelle fondent les vautours. Si le même acteur (Paul GIAMATTI) interprète à la fois son père et le docteur Eugène Landy, ce n'est certainement pas par hasard. Brian Wilson est ce que Alice Miller appelle un ancien "enfant sous terreur", celui qui a grandi sous la férule d'un père violent qui l'a maltraité physiquement (au point de le rendre à demi-sourd) et psychiquement et qui continue à exercer son emprise sur son fils adulte en exploitant son talent tout en le dénigrant (et en l'escroquant). Après sa mort, son influence néfaste continue à s'exercer au travers de l'avatar qu'est le gourou, oups, le "docteur" Eugène Landy, homme aussi creux que cupide, misogyne et infatué de lui-même qui exerce un contrôle absolu sur tous les aspects de la vie de Brian Wilson. Il lui colle l'étiquette d'un malade psychiatrique, le menace d'internement, l'abrutit de médicaments sans doute pour l'achever plus vite et fait le vide autour de lui afin de toucher le jack pot sur son cadavre (lui aussi escroc, il avait fait falsifier son testament). Néanmoins Brian Wilson n'est pas et n'a jamais été un aliéné. C'est sa planche de salut d'être de par sa nature aussi imperméable aux intrusions extérieures que les bulles dans lesquelles il se réfugie. De même qu'il n'a pas cédé aux pressions de son entourage dans les années 60 et a fait l'album qui lui correspondait quitte à le payer après par sa mise à l'écart de groupe et sa dépression, il cherche à échapper à la surveillance de son geôlier en lançant un S.O.S. qui finit par être capté par Mélinda (Elizabeth BANKS). Elle va se lancer dans une bataille psychologique et juridique pour l'arracher aux griffes du vampire qui lui suce le sang, discrètement mais efficacement aidée par une autre femme, Gloria (Diana Maria RIVA), l'employée de maison de Brian Wilson qui comme beaucoup de latinos clandestins vit pourtant sous l'épée de Damoclès de l'expulsion que lui agite sous le nez Landy pour la faire taire.

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