The Delines - The Sea Drift - 2022 - du crépuscule à l'aube.
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The Delines - The Sea Drift - 2022 - du crépuscule à l'aube.
The Delines, ce groupe, pour moi, dans ces détours, m'a toujours séduit, peut-être est-ce lié à sa profonde humanité que j'entends à chaque fois sourdre de leurs chansons. Rien de spectaculaire et pourtant, le liant des mélodies, de la voix, de la douceur granulée qu'elle enferme, à chaque fois, comme par magie, m'ensorcelle.
C'est l'americana comme on l'apprécie... qui sait vous encercler avec ses charmes, ses notes glissantes, où l’on se retrouve en compagnie de la voix vieillie d’Amy Boone, mais qui demeure encore toujours aussi profonde et plus grave qu’hier ; une voix dans un corps qui a vécu lui aussi et traversé, c'est certain, bien des instants difficiles, avec d'autres plus doux, assurés et fragiles. Et leur musique témoigne de tout cela, de la vie qui passe et qui vous traverse, de tous ces instants, ces moments palpables, faits de petits riens qui s'engouffrent en vous.
Des minutes, des mois, des années. Ce temps où l'on attend soi-même des nouvelles, elle, lui, comme nous.
Il y a au milieu de l’album une chanson qui déboule tranquillement : The Surfers Twilight, dans ces détours, en ce crépuscule qu’elle évoque, les voiles des mélodies faseyent, les mots sont à peine susurrés et l’on imagine alors le soleil qui pénétrerait peu à peu dans le coin d'une chambre, ses derniers rayons se déposant avec légèreté sur l'oreille blanchie sur laquelle une main molle s'étendrait.
Alors dans ce silence ahurissant, les notes de guitare, seules, s'égrènent dans une lenteur sidérante, laissant s'échapper leur mélodie feutrée. La voix apparaît, elle aussi douce mais avec, dans le fond de la gorge, une gravité palpable. Celle-ci, entourée d’écharpes et d’enluminures radieuses, s’accouple dans l'espace aux sons d’un clavier harmonieux étendant ses mélodies avec, en arrière plan, l'or d'une trompette qui résonne à peine. Et, au milieu de tout cela, la voix fière et sensuelle surgit à nouveau, s’élance, s'étale et se sauve.
Amy, avec les mots que Willy Vlautin lui confient, fait s'élancer tout le long de l'album des ombres, des parfums, des lumières qui s’agitent, tout cela à travers des histoires simples.
Faire un disque, pour eux, on le sent, c'est témoigner de cela, de ce qui a été, de ce que l'on vit et traverse, ce qui nous forme. Et ils éparpillent dans leurs chansons ces moments feutrés, d’autres plus tragiques, insérant entre elles des entre-deux, où le temps de l'écoute d'un album, on peut se retrouver moins seul. C'est là le pouvoir de la musique.
C’est là leur force, on se laisse prendre, tout le long, par la sensualité âpre que la voix d'Amy charrie, emportant avec elle les guitares, les cuivres doux et les cordes qui lui tricotent un manteau bien seyant. Dans ses recoins, cette musique fait retentir les bonnes mesures, juste comme il faut, avec de surcroit, d'un couloir l'autre, toutes les notes nécessaires pour révéler l'entière sincérité que le groupe recèle en lui.
C'est ce qui fait leur valeur, cette profondeur si rare dont il témoigne parce qu'il n'y pas ici d'apparences à surjouer, seulement laisser aller ce que l'on contient.
Laisser tout cela se déposer, se décanter, près de soi, avec comme seule ambition de se regrouper, à deux tout d'abord puis avec ses camarades, à l'abri d'un studio pour y jouer les notes bleues et limpides que l'on contient et d'y laisser filer les mots, les sons puis la voix.
Tout cela emmêlé, paroles et voix, musique et mots, les uns et les autres aussi volatiles que les volutes d'une cigarette, afin de délayer cet ensemble dans un album qui atteindra alors le cœur des futurs auditeurs.
L'album est à écouter ici