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Chapitre 10

Chapitre 10

Veröffentlicht am 8, Juni, 2022 Aktualisiert am 24, Juni, 2022 Kultur
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Chapitre 10

Chapitre 10

Florence, 13 septembre

Après avoir déposé Clara à l’école, je me suis sentie étrangement seule après les deux mois de vacances et les deux semaines de stress intense qui ont suivi. J’avais pris l’habitude d’être avec ma fille en permanence et j’ai ressenti un vide. Heureusement, les activités au Hayon ne laissent guère de temps morts pour ruminer. Je commence à bien maîtriser la traite des chèvres et la fabrication du fromage. Thomas est un jeune chevrier doux et patient, passionné par son métier et toujours enthousiaste à l’idée de me transmettre son savoir. J’apprends beaucoup en sa compagnie et apprécie de passer du temps avec lui. Même si parfois, il me charrie comme ce matin, quand il m’a appelée pour me montrer quelque chose sur un trayon de Blanchette. Je me suis penchée et j’ai approché mon visage à quelques centimètres du pis, mais avant que je comprenne ce qui m’arrivait, je me suis retrouvée aspergée de lait. Il a beaucoup ri de sa plaisanterie ; moi, un peu moins. Je trouve que c’est encore un grand gamin, mais grâce à son humour et sa jovialité, il parvient à me faire sourire, même quand je me sens triste. L’après-midi, Mathilde m’a initiée à l’apiculture et juste avant d’aller rechercher Clara à l’école, je suis allée récolter des pommes avec Bérengère et Cézanne. Ceux-ci m’ont expliqué que ces fruits tombés allaient être emmenés au pressoir de Gaume, situé à Virton et que nous vendrons le jus de pommes sur les prochains marchés de la région. Mistigri ronronne sur mes jambes tandis que Clara termine ses devoirs.

  • Comment s’est passée ta journée à l’école, ma petite émeraude ?
  • C’était super ! Je me suis déjà fait une super-copine. Elle s’appelle Célia. Je suis à côté de son frère en classe, mais contrairement à elle, il est plutôt turbulent et boudeur. Il ne m’a pas fait de mal, mais il ne m’a pas non plus adressé la parole. L’après-midi, j’ai fait une peinture et puis on a joué à des jeux par équipe dans la cour. Si tu avais vu Valentine ! Elle est super forte ! Et tu sais pas ? Elle est presque aveugle. Elle fait partie du club d’handisport de Gérouville.
  • Ah, je ne savais même pas qu’il y avait un club d’athlétisme tout près d’ici. Ca t’intéresserait, toi ?
  • Oh non, moi, je préfère faire de la peinture avec toi et en plus, je vais déjà faire du sport : de l’équitation avec Théo. Tu te rappelles ? Je t’en ai parlé.
  • Oui, oui, c’est vrai qu’ici, on a tout à la maison. C’est très gentil de la part de Théo de t’apprendre à monter à cheval.
  • Oui, c’est sûr.
  • Cet après-midi, Mathilde m’a dit qu’elle t’achèterait une combinaison spéciale pour aller t’occuper des abeilles avec elle. C’est cool, non ? Tu te plais ici ?
  • Oui, beaucoup. C’est juste dommage qu’il n’y ait pas d’autres enfants, ajoute-t-elle tristement avant de s’installer à côté de moi sur le canapé.

Aussitôt, Mistigri change de jambes. Clara l’approche de son visage et frotte sa joue contre la sienne. Un petit bisou sur son nez, puis elle le repose sur ses genoux pour le caresser.

  • Tu pourrais inviter Célia à venir ici de temps en temps, non ?
  • J’aimerais bien aller chez elle aussi. Elle a un petit frère et une petite sœur qui ont quatre mois. C’est des jumeaux et j’ai trop envie de les voir. Je pourrai y aller, Maman, s’te plaît, s’te plaît, me supplie-t-elle en joignant ses deux mains.
  • Pourquoi pas ? Il faudra qu’on en discute avec sa maman.

Clara a toujours été naturellement attirée par les bébés. Pourtant, elle n’a pas souvent l’occasion d’en côtoyer. Quand nous allons faire des courses ou nous promener, je vois bien les regards envieux qu’elle pose dans les poussettes. Souvent, quand son papa était encore en vie, elle me réclamait un petit frère ou une petite sœur. Moi, je ne l’envisageais pas du tout à cause des absences de Stéphane. Pour compenser, je lui avais acheté la panoplie complète d’accessoires pour jouer à la poupée. Elle avait fait des demandes précises à Saint-Nicolas. Elle voulait une petite fille et un petit garçon, mais il fallait que ces deux poupons puissent prendre des bains. Hors de question pour elle d’avoir des poupées molles, comme elle disait. Elle avait exigé une poussette double pour pouvoir les promener ensemble et un porte-bébé ventral et un dorsal pour les câliner lors de nos sorties au parc. Je me rappelle que c’était toute une expédition pour préparer tout ce petit monde.

  • On pourrait peut-être déballer les cartons avec tout ton matériel de poupées. Depuis que nous sommes ici, il me semble que tu n’as pas trop eu l’occasion de jouer avec Tiago et Léa.
  • Oh oui, bonne idée. Je pourrais leur donner le bain ?
  • Oui, si tu veux.

Je m’affaire à tout sortir pendant qu’elle déshabille ses bébés et les emmène à la salle de bains emballés dans une serviette.

  • Il ne faut pas qu’ils prennent froid, se justifie-t-elle alors que je n’ai rien demandé. Et n’oublie pas de leur prendre des vêtements quand tu apportes la table à langer.
  • A vos ordres, chef, dis-je en effectuant un salut militaire.

Son rire déclenche mon sourire.

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