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Veröffentlicht am 28, Aug., 2024 Aktualisiert am 29, Aug., 2024 Crime stories
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29 juin 2018, Commissariat central d’Ajaccio, 17h30

 

-Je vous dit que je veux parler à l’inspecteur Barot ! Lui il m’écoutera ! S’énerve l’homme.

-Monsieur je vous est déjà expliqué, s’énerve l’agent de Police. L’inspecteur Barot n’est pas disponible pour le moment et il vous dira la même chose que nous. On ne peut rien faire ! Votre femme est adulte, cela fait seulement dix heures qu’elle a disparu. On ne peut pas considérer son cas comme une disparition inquiétante !

L’homme est devenu tout rouge. Il a les poings serrés, il se lève et tape du poing contre la table.

-D’une il s’agit de mon ex-femme et de deux je vous rappelle que notre fils est mort noyé et qu’on l’a appris hier ! Elle était tellement mal ! QU’EST-CE QU’IL VOUS FAUT DE PLUS POUR VOUS INQUIETER PUTAIN ?!

L’agent de police appelle un autre agent.

-Nico, tu peux raccompagner ce monsieur dehors s’il-te-plaît ? Je crois qu’il a un peu trop bu et ça ne me plaît pas.

L’homme sent l’alcool, il est décoiffé, il hurle et fait peur à tout le monde, il est difficile de le prendre au sérieux. Alors, avec force, en voyant son comportement déplacé, deux agents de police l’agrippent et décident finalement de l’emmener en garde à vue lorsque celui-ci commence à insulter les forces de police.

Ils le portent jusqu’à une pièce étroite où l’on peut seulement apercevoir un banc. Les murs sont d’un bleu terne, le sol d’un carrelage beigeâtre très peu accueillants.

Désormais enfermé entre ces quatre murs et observé par un agent comme s’il était un pestiféré, l’homme se met à pleurer à chaudes larmes.

Son fils lui manque, sa femme lui manque, sa vie d’il y a quatre ans lui manque…

 

7 août 2023, Saint-Pierre-en-Auge, 14h58

 

Je suis paralysée. Voilà une vingtaine de minutes que j’ai appelé la police et ils ne devraient pas tarder à arriver. Ma main tremble. Je sue. Je me demande si mes parents, à cheval sur leurs vélos se doutent du spectacle sur lequel ils risquent de tomber en rentrant.

Je suis cachée, entre l’armoire et le bout de mon lit. Et si Marcellin avait entendu ma conversation avec Noah. Et s’il s’apprêtait à se débarrasser de moi ? Heureusement, le temps passe, et personne n’est encore venu pour me tuer.

C’est au moment où je m’apprête à appeler ma mère pour la prévenir, au cas où quelque chose tourne mal que j’entends une seconde voiture arriver. Je cours vers la fenêtre du salon.

Lorsque j’aperçois une voiture blanche avec inscrit police municipale sur le côté, c’est comme si l’enclume posée sur mon cœur depuis une demi-heure maintenant venait d’être retirée. Je me sens à nouveau légère, forte, prête à l’action. Je les vois observer la propriété, j’entrouvre la porte principale et je me cale au milieu, entre l’extérieur et l’intérieur, par crainte.

Un policier m’aperçoit à ce moment-là. Il remarque l’état de panique dans lequel je suis. Je vois les autres agents toquer à la porte de la maison voisine. Quelques secondes plus tard, Marcellin leur ouvre, le regard plus froid que jamais. Il semble déboussolé, regarde de tous les côtés. Il ne s’y attendait pas, mon coup a donc bel et bien marché. Lorsqu’il tourne la tête à gauche, il me voit. J’ai peur, je vois de la haine dans ses yeux. Je m’apprête à me cacher à l’intérieur lorsque le policier m’ayant remarqué tout à l’heure arrive à mon niveau.

-Bonjour, vous êtes la fille qui a appelé ?

-Oui je suis Emilie Garcia.

-Très bien, ne vous inquiétez pas, tout est sous contrôle. Vous n’avez plus rien à craindre désormais.

Tous les agents de police entrent dans la maison voisine sauf deux, mon interlocuteur et un qui mène la garde devant la propriété.

-Vos parents ne sont pas avec vous ? Me demande-t-il.

-Non, ils sont en promenade… Je réponds, le regard prostré sur la fenêtre de la maison des Fritini.

-J’ai quelques questions à vous poser me dit-il. Rassurez-vous, ce ne sera pas long.

J’acquiesce d’un hochement de tête.

-Quand cette famille est-elle arrivée ?

-Ils sont arrivés le 5 août au soir, mais le garçon lui, était là un peu avant. Je pense qu’ils l’ont installé pendant la nuit pour que personne le remarque.

-Et ce garçon, que savez-vous de lui ?

-Pas grand-chose. Il m’a dit qu’il s’appelait Noah mais que ce n’était pas vraiment lui. Apparemment Marcellin Fritini n’est pas vraiment son père. Vous pensez qu’il… qu’il a été kidnappé ?

-Nous ne pouvons répondre à aucune question pour le moment. Mais vous pouvez nous aider à y répondre. Qu’est-ce qu’il voulait dire par le fait que ce n’était pas vraiment son père ?

-Eh bien, je crois qu’il m’a dit que le vrai fils de Marcellin s’appelait Noah.

-Et ce Noah, il sait où il est ?

-Justement non, il ne sait pas. Tout ce qu’il sait c’est que Marcellin pense qu’une partie de lui appartient à Noah…

Noah… Noah Fritini. Pourquoi ce nom me paraît soudain si familier ? L’inspecteur me parle mais je n’écoute plus. Je suis bien trop concentrée sur ce nom. Noah Fritini. Oui, j’en suis sûre. Je l’ai déjà entendu quelque part, mais où ?

 

 

 

30 juin 2018, commissariat central d’Ajaccio, 07h14

 

L’homme a une migraine. Voilà plus de douze heures qu’il est assis, les bras croisés. Il a passé une horrible nuit. Il a essayé de s’allonger mais le banc était trop dur. Il se masse les tempes pour soulager la douleur. Il voit trouble tant il a pleuré. Qu’a-t-il fait de si terrible pour passer une nuit en garde à vue ? Après tout, oui il s’est énervé, il n’aurait pas dû mais quand même avec ce qu’il a traversé, ils auraient pu comprendre quand même !

Finalement vu dans l’état dans lequel il est, ils ont dû avoir pitié de lui puisque cinq minutes plus tard, un agent de police le fait sortir de sa « cellule » pour l’emmener dans une salle d’interrogatoire. A sa grande surprise, c’est l’inspecteur Barot qui se présente devant ses yeux, lorsqu’il se décide enfin à lever la tête.

-Eh bien Monsieur, vous ne me semblez pas en forme… Dit l’inspecteur en le dévisageant.

L’homme ne sais quoi répondre. Cette remarque l’agace plus qu’autre chose. Oui, il est affreux mais il vient de passer une nuit en garde à vue pour rien ça se comprend non ?! Il faut qu’il parle à l’inspecteur de son ex-femme qui a disparu. Maintenant cela doit faire plus de vingt-quatre heures. Mais est-elle toujours portée disparue ? Après tout peut-être qu’elle a fini par rentrer depuis le temps ?

L’homme devient fou. Il est coincé dans un commissariat pour un rien alors que Jeanne a besoin d’aide.

Il faut qu’il sorte d’ici au plus vite. Et la meilleure manière d’y parvenir, c’est de s’excuser…

-Ecoutez, je suis désolé, je ne voulais pas m’énerver hier soir mais compte tenu des circonstances et…

-Monsieur… L’interrompt soudain l’inspecteur.

Mais il veut continuer, il a besoin de se livrer.

-J’étais tellement mal vous comprenez. Mon fils… Mon petit garçon… et après ma femme c’est…

Il commence à pleurer.

-Monsieur ! S’exclame l’inspecteur.

Cette fois-ci, il est contraint de l’écouter.

-Monsieur, reprend l’inspecteur, vous n’avez pas passé la nuit en garde 

à vue pour votre petit incident d’hier, enfin pas exactement.

L’homme fronce les sourcils. Il ne comprend pas.

-Vous êtes ici parce que je voulais vous parler de quelque chose. C’est par rapport à votre ex-femme…

L’homme tressaille.

-Jeanne ! Où est-elle ? Vous l’avez retrouvée ? Que lui est-il arrivé ?

-Ecoutez, j’ai de mauvaises nouvelles…

L’homme a un mauvais pressentiment.

-C’est-à-dire demande-t-il ?

L’inspecteur hésite à parler, comme s’il craignait la réaction de l’homme. Puis, sachant qu’il n’a pas le choix, il déclare :

-Je vais devoir être franc avec vous…

Il marque une pause.

-Un pêcheur, reprend-t-il, a retrouvé le corps d’une femme hier soir, au large de la plage de Cargèse. D’après les premières analyses, l’ADN correspondrait. Nous attendons les conclusions du médecin légiste mais d’après les premières hypothèses, il s’agirait d’un suicide. Je suis désolé…

L’homme est comme déconnecté. Son visage s’affaisse. Ses yeux déjà creusés deviennent noirs. Sa peau, déjà pâle devient transparente. Son corps déjà affaibli s’affaisse.

 L’homme s’effondre. Il tombe en arrière et perd connaissance.

7 août 2023, Saint-Pierre-en-Auge, 16h05

 

Voilà plus d'une heure que la police est entrée dans la maison des Fritini. Mais que font-ils ? Où est Noah ? Je ne peux plus attendre. J’ai prévenu mes parents par téléphone que la police était là. Ils étaient à trente minutes d’ici. Mon père a dit qu’ils allaient prendre un taxi. Ils ne vont pas tarder à arriver.

En attendant, le policier tente tant bien que mal de me rassurer. Entre temps, un de ceux qui se trouvait dans la maison est sorti pour me servir un verre d’eau. Je vais mieux, maintenant que je sais que Noah ou le garçon est entre de bonnes mains. Cependant j’ai tellement de questions. J’aimerais savoir ce qu’il s’est passé. Qui est ce garçon ? Qui sont ses vrais parents ? Le cherchent-ils ? Le croient-ils mort ?

Des larmes emplissent mes yeux lorsque je songe à cette hypothèse.

C’est à ce moment là que j’entends une voiture. C’est eux ! Ce sont mes parents et mon frère.

Je me lève et je vois ma mère commencer à courir vers moi lorsqu’elle m’aperçoit. Je me jette dans ses bras et nous pleurons toutes les deux.

-Je suis désolée, je suis tellement désolée… Me dit-elle.

Mais je ne lui en veux pas. Qui aurait pu croire à une chose pareille ? Qui aurait pu imaginer un scénario aussi noir pendant des vacances ?

Mon père aussi me prend dans ses bras.

-Bravo ma grande ! Tu as bien agi, je suis fier de toi. Me dit-il.

En entendant ces mots, les larmes me montent à nouveau aux yeux. Non je n’ai pas été assez forte. Si je l’avais été, j’aurais pu éviter deux jours de calvaire de plus à Noah. Si j’avais tout découvert le premier soir et que j’avais appelé la police, le garçon aurait moins souffert. Deux jours de souffrance en moins, c’est quelque chose surtout pour un enfant.

Mais depuis combien de temps est-il là ? Est-ce que cela fait seulement deux jours ou est-ce que cela fait des semaines, des mois voire…des années ?

Je crains la réponse à cette question. En attendant, je suis contente que ma famille soit à mes côtés.

Dix minutes plus tard, un premier policier sort de la maison, puis un deuxième accompagné de Sarah qui est maintenant menottée, les mains dans le dos. Elle est méconnaissable, ses cheveux sont plus noirs qu’avant. Ses traits sont encore plus tirés, ses rides plus marquées. On dirait qu’elle a pris dix ans en deux heures. Elle est voûtée et regarde le sol, les yeux dans le vague, n’osant pas risquer de croiser mon regard.

Marcellin sort ensuite. Il est menotté aussi. Un agent le tient par l’épaule. Il a un air de chien battu. Il jette un regard vers ma famille. Je ne saurais dire s’il s’agit de haine ou de tristesse. Ses yeux sont cernés, ses cheveux rouges sont presque blancs. Je l’entends marmonner et crier des choses qui semblent être dans une langue étrangère tant il est en colère. Dans ce tumulte je crois entendre : « Rendez-moi mon fils ! »

Derrière lui, j’aperçois la petite Louison qui tient la main à un quatrième agent qui tente de la rassurer. Elle a les larmes aux yeux et tient son doudou de sa main libre. Elle me fait de la peine. Après tout, cette petite ne mérite pas ça. Elle a été si gentille avec moi… Elle n’a que trois ans après.

Je remets soudain en cause ce que je viens de faire. Et si en essayant de sauver quelqu’un j’avais détruit la vie de la petite Louison ? J’essaie de penser à autre chose lorsque je l’aperçois.

Il est là.

Noah.

Il est très maigre et très affaibli. Deux agents de police le tiennent par la main.

Son teint est pâle. Il a de beaux cheveux châtains et des yeux vert clair. Il doit avoir dix ans.

Lorsqu’il lève la tête et me voit, il n’avance plus.

C’est comme si le temps s’était arrêté. Il me sourit. Je m’approche de lui. Dans ses yeux, je vois beaucoup d’émotions mais surtout de la gratitude.

-Tu vas bien ? Je lui demande.

-Je vais bien merci. Grâce à toi.

Je lui souris à mon tour. Je le laisse partir vers la première voiture de police, après Louison. Dans la seconde se trouvent Marcellin et Sarah.

Puis, à mi-chemin, il se retourne et dit :

-Au fait, je m’appelle Ezéchiel.

Je les vois partir et je n’ai qu’une question en tête : que s’est-il passé ?

                                ***

 

Et vous ? Voulez vous savoir ce qu’il s’est vraiment passé ? La vérité derrière ce Marcellin et sa famille ? Ce qui est arrivé à Ezéchiel ?

Eh bien, je vais vous le raconter…

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