Chapitre 10
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Chapitre 10
Le matin suivant, je me réveille avec un sentiment d'étouffement, comme si chaque respiration me ramenait à un endroit que je n'avais pas encore osé affronter. Peut-être que Savannah avait raison. Il est peut-être temps pour moi d’apprendre à aller mieux. Pourtant, l'idée de devoir faire face à tout cela me serre la gorge. Aujourd'hui, je sens que j'ai besoin de prendre mes distances avec elle, même si cela me coûte.
De toute façon, il me semble qu’elle est aussi submergée par son travail en ce moment. Savannah Greene est une créatrice de contenu et un modèle photo alternatif sur les réseaux sociaux. Elle promeut des produits envoyés par des marques, créant un univers unique avec chaque photo. Sa silhouette élancée, sa peau marquée par ses nombreux tatouages, et son regard intense, captivent les marques qui adorent son côté atypique. C’est ce qu’elle transmet : un côté brut, une liberté absolue. Moi aussi, j’ai mon lot de tatouages, mais je ne ressens pas la même envie de m'exposer. Elle fait ce qu’elle aime et c’est peut-être ça qui fait d’elle un véritable aimant à attention.
Mais mon amie a toujours été de bon conseil. Peut-être qu’elle a raison et que je devrais parler à un spécialiste. Ou au moins rejoindre un groupe de soutien. Je fixe la page internet ouverte sur mon ordinateur. L’écran blanc me renvoie un reflet que j’évite d’habitude. Mais aujourd’hui, je m’y attarde.
Je plisse les yeux, comme pour m’assurer que ce visage est bien le mien. La vie ne m’a pas épargnée, c’est une évidence. Malgré ma vingtaine, mes traits sont déjà marqués par une lassitude que je n’ai plus la force de cacher. Des cernes violettes s’étalent sous mes yeux, des yeux verts qui, autrefois, pétillaient d’énergie et d’insouciance. Aujourd’hui, ils me semblent éteints, comme deux morceaux de verre ternis.
Je passe une main dans mes cheveux noirs. Ils étaient si soyeux avant, presque vivants de leur éclat. Désormais, ils pendent autour de mon visage comme des fils ternes et fatigués. Je remarque aussi mes vêtements, ce sweat noir informe qui m’avale complètement et ce vieux pantalon de jogging. Avant, j’aimais jouer avec la mode alternative, assembler des tenues qui m’apportaient un brin de confiance, mais aujourd’hui, il n’y a plus rien d’attrayant. Je me cache sous ces couches de tissu, sans même y penser.
Je m’approche un peu plus de l’écran, le menton appuyé sur ma paume. Je ne me trouve pas laide, loin de là. Mais je ne me reconnais plus. Comme si je n’étais plus qu’une version délavée de moi-même, une coquille vide qui avance par automatisme, sans but, sans âme. C’est ça, le pire. Pas de laideur, juste une absence. Un vide.
— Tu fais pitié, lâché-je à moi-même dans un souffle.
Je me redresse brutalement, agacée par cette vision que je n’avais pas voulu affronter jusqu’ici. Depuis combien de temps est-ce que j’ai laissé les choses dériver à ce point ? Depuis combien de temps est-ce que je me contente de survivre, sans chercher à vivre ?
Un frisson me parcourt, et je me détourne de l’écran. Jaxon, Savannah… même ces inconnus sur Twitter, tous m’ont renvoyé à cette même question ces derniers jours : qu’est-ce que je fais encore ici, coincée dans ce marasme ? Peut-être que Savannah a vu plus clair que moi. Peut-être qu’il est temps de chercher de l’aide.
Je laisse mes doigts glisser sur le clavier. Les mots « thérapeute en ligne » s’affichent dans la barre de recherche. Mon cœur tambourine dans ma poitrine, comme si je m’apprêtais à sauter dans le vide. Peut-être que je ne suis pas prête. Mais peut-être que je ne peux plus me permettre d’attendre non plus.
Je pianote nerveusement sur mon téléphone, hésitante. Un message à Jaxon clignote à l’écran, prêt à être envoyé.
Ravyn :
Je crois que ça ne va pas si bien…
Mon doigt plane un instant au-dessus du bouton d’envoi. Une vague de doute m’envahit.
Qu’est-ce qu’il en aurait à faire, au juste ? On ne se connaît même pas vraiment. Quelques échanges, des appels, des rires partagés à travers un écran, mais ça reste dérisoire face à ce que je porte sur les épaules.
J’efface tout d’un geste, presque agacée par ma propre faiblesse. La bulle vide du message disparaît, emportant avec elle ce moment d’hésitation. Je renonce à exprimer le peu d’émotions qui osent me submerger pour l’instant et repose mon téléphone, comme si l’éloigner pouvait éloigner mes pensées aussi.
L’écran de mon ordinateur me renvoie à la réalité. Je refocalise mon attention, cherchant désespérément quelque chose à quoi me raccrocher. Une ligne attire soudain mon regard :
Groupe de parole – Réunion le mardi 25 février 2025 à 16h
Rejoignez-nous au Velvet Lantern
Je fronce les sourcils, dubitative. Un groupe de parole dans un bar ? C’est… inattendu. Un cadre si inhabituel pour des discussions supposées intimes et vulnérables. Je m’imagine déjà le lieu : un éclairage tamisé, des chaises dispersées dans un coin isolé, loin des habituels clients qui viendraient chercher un verre après le boulot. À bien y réfléchir, un bar calme comme le Velvet Lantern pourrait peut-être offrir une ambiance moins oppressante qu’un cabinet de thérapeute aseptisé.
Mon regard glisse vers le coin de mon écran où le calendrier est ouvert : Nous sommes le 20 février. Cinq jours me séparent de cette réunion, et pourtant, cette simple date me paraît inaccessible. Je réalise à quel point j’ai perdu la notion du temps. Les jours passent, s’étirent ou se compressent, sans que je ne sache vraiment où je me situe.
Je soupire, hésitant. Devrais-je y aller ? Une part de moi veut rester immobile, enfouie dans ce quotidien rassurant de solitude, mais une autre s’accroche à cette idée avec l’énergie du désespoir. Par précaution, je note la date et le lieu dans mon application calendrier.