Trois voeux et un désir
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Trois voeux et un désir
Les vœux de nouvelle année se confondent dans notre esprit peut-être avec la lettre au père noël de notre enfance. Ils se conjuguent alors avec le verbe avoir : de l’argent, de la santé, de l’amour.
Et ce n’est que dans un sublime effort de volonté qu’ils s’expriment et se donnent à voir sous la forme de l’être : être heureux, être en bonne santé, être en sécurité, être amoureux, être parent, être professionnel, être en paix, être dans le succès, et même tout simplement, pour ceux en difficulté, ceux qui me consultez, selon les « objectifs » de développement personnel : être quelqu’un, être entier, être à la hauteur, être en progrès…
La distinction
En espagnol, nous faisons la distinction, – certains d’entre vous le savent pour s’y être buté en deuxième langue ou lors de vacances au soleil -, entre le verbe « ser » et le verbe « estar », entre le verbe « tener » et le verbe « haber ». Deux variantes à chaque fois pour les seuls verbes être et avoir en français.
Dans nos pays latins, nous ne sommes pas tristes au sens nous = tristes, nous traversons la tristesse : estar triste. Comme un séjour, una sala de estar, a living room.
« Estar » est aussi un auxiliaire. Accolé aux participes passé et présent il indique ce qui a été ou qui est en voie d’accomplissement.
« Haber » est un auxiliaire également. Il permet à tous les autres verbes d’action de vivre leurs temps.
« Tener » se destine aux seules possessions.
L’expression
Ces différences de ma prime enfance s’effacent dans le comportement de mes propres enfants, nées en France. Elevées pour être et pour avoir dans la culture du lieu et de leur temps. Je « me bats » avec elles, gentiment, corps à corps, comme je me bats avec mes patients, pour qu’elles et eux nuancent leurs états profonds et auxiliaires plutôt que de se confondre et de se perdre dans la quête de l’identité entière et parfaite « to be or not to be » et dans les tendances consuméristes ou du moins cumulatives de nos jours. La vie est un cycle. L’être est fait de manque, de perte et de désir.
Cette particularité expressive de la langue espagnole, reconnue par les lingüistes comme étant une exception notable aussi bien au latin classique qu’aux langues arabes et germaniques – son surgissement vient du latin populaire, parlé, échangé depuis des siècles sans jamais lâcher son utilité -, cet effort princeps et renouvelé de différenciation dans l’expression du langage contribue à l’expression des âmes et des corps.
Le rassemblement
En l’année 2020 ou vous êtes, comme nous tous, beaucoup resté chez vous, vous avez peut-être vécu dans tous vous états à l’intérieur d’une même et seule « salle de estar ». Toujours en voie d’être et avec peu de consommations, de fait. Etes-vous pour autant plus ou moins ? Certains se sont figés ou du moins immobilisés, dans une salle d’attente qui est souvent l’antichambre de l’absence, aux autres et à soi.
Ce sont eux qui nous demandent un effort de lien, qui font surgir la variante d’un « être avec » résumant ainsi aussi bien estar que ser, se mettent en mouvement dans un « haber » auxiliaire existentiel : pour avoir le sentiment d’être humains. La diversité expressive se condense alors dans son coeur et dans son essence pour mieux nous rassembler et nous ressembler.
Et c’est ainsi qu’en 2021 je vous vœux.