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Le rêve et la dame en noir.

Le rêve et la dame en noir.

Publicado el 6, ene., 2024 Actualizado 6, ene., 2024 Cultura
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Le rêve et la dame en noir.

J'ai rêvé cette nuit. Je me voyais dans une gare, je partais mais je ne connaissais ni l'heure ni l'endroit. D'ailleurs, dans un rêve, tout est permis, on rallonge le temps, on le réduit comme bon nous semble. Quant aux endroits, on a l'embarras du choix.

Là, tout le monde avait l'air d'être ici, mais pas vraiment. Ils étaient pressés de venir ou de repartir, de maîtriser l'horloge du temps, chacun avec son histoire, son itinéraire à suivre, son affaire à régler ou son secret.

Sur le quai, je me vois déjà complice de l'ombre, personne ne me regarde. Dans une gare, les regards des voyageurs se croisent toujours avec le pas pressé ou ennuyé. Quant au sourire, on peut quelquefois l'afficher comme à la routine, sans vraiment l'offrir. Les yeux sont comme dans un Camus engloutis d’étranger.

En vérité, la plupart des gens ne voient plus l'autre visage qu'ils croisent, ils regardent ce qu'ils désirent voir. Car, l'indifférence a plusieurs facettes; à commencer par ce qu'on désire apercevoir ou penser de l'autre sans même le connaître, et on finit par construire une sorte de distance, un mur cimenté par l'orgueil et l'indifférence."

Bêtes humains que nous sommes, nos différences sont notre point fort, elles sont notre richesse, elles doivent nous unir, pas nous séparer. Pourquoi donc ce mur éphémère qu'on invente souvent et qui nous sépare des autres? Nos cœurs battent à l'unisson de nos différences, formant ainsi une symphonie de diversité, une mélodie incomparable qui devrait nous rassembler dans l'harmonie.

Je préfère les questions aux réponses trop évidentes, qui conduisent souvent à ne plus se poser de questions. Un jour il n’y aura plus de journaux, car nous penserons tous la même chose, il n’y aura plus de photos parce que tout le monde se ressemblera trop, il n’y aura plus de chapeaux, plus de chignons, plus de casquettes, on aura tous la même tête, plus de coiffeurs, plus de salons, d’esthéticiennes, plus de défauts et nous serons tous aussi beaux ; trop malins pour dissimuler la laideur qui se trouve en nous.

Je reste debout à ma place, regardant ce spectacle animé, personne ne s'aperçoit de ma présence, pourtant je suis resté longtemps à attendre le prochain train qui va à nulle part et il ne viendra pas. Soudain, mon regard se fixa sur une dame habillée en noir qui semble deviner mon tourbillon.

« Impressionnant...! Tu as vu? Maintenant, suis-moi... Tu me cherchais, tu voulais connaître mon prénom... Je suis Blanche », me dit-elle.

  • Drôle de prénom pour une femme toute en noir, êtes-vous en deuil, lui demandai-je en souriant.
  • Non, pas pour le moment, me répondit-elle avec un air sérieux.

De son regard, j'avais compris qu'elle ne peut pas venir une autre fois, mais de son sourire elle m'explique que le hasard est le grand romancier du monde entier. Car, il a le pouvoir de dépeupler l'endroit où nous sommes, pour nous avoir pour lui-même. Lui, sait comment écrire les histoires loin d'être ordinaires. Il est l'auteur et nous sommes là, à le suivre sans compliquer les choses par les Si et les Pourquoi ?

Je me sens de nouveau égaré, mais que faire quand on est attiré doucement dans son rêve tant attendu et quand on est séduit par les contours d'un charme inconnu. J'étais loin de me douter que Rimbaud allait m'ouvrir une porte de la perception des choses et me montrer à quoi s'attendre quand on veut forcer le cœur d'une femme.

Je marche à côté d'elle, sans souffler le moindre mot. Elle me pose la question: « Que viens-tu chercher ici ? ».

  • M'en faire des heureux, lui répondis-je.
  • Bien sûr que non, me dit la dame en noir.
  • Pourquoi ; Est-ce impossible ?
  • Pour faire, il faut d'abord l'être déjà, et tu n'es pas heureux, m'expliqua-t-elle avec un regard foudroyant.
  • Dis-moi donc, comment l'être dans ce cas ?.

Elle fait mine de s’émouvoir et essuie ses yeux avec ses doigts :

« Vous les humains, vous êtes toujours en quête du bonheur, en dehors de vous-même. Votre excès et votre tentation de toujours en avoir plus, vous complique la vie, et ça vous projette aux déconvenues. » Ses paroles résonnent dans l'air, portant une sagesse millénaire mêlée de tristesse.

Je l'écoute sans répondre, elle continue à marcher et me fait signe de la suivre. Nous nous arrêtons devant deux enfants qui jouaient à cache-cache tout en riant. Elle les observe longuement et me dit : « Pour connaître la joie, il faut un cœur qui parle et qui aime, une main qui donne, des yeux qui savent regarder, une âme généreuse comme une pluie, pareille à ces deux enfants.

« Regarde-les ! Ne sont-ils pas joyeux que ceux que tu regardes depuis ce matin. » Sa voix est douce, empreinte de compassion pour l'humanité.

  • Faut-il être enfant pour connaître le bonheur ? Je lui demande à voix basse et timide.
  • Non, pas forcément, ça ne dépend pas de l'âge ; on peut être heureux même plus vieux, tout en ayant le cœur d'enfant, un cœur tolérant et innocent.
  • Vous savez ! Il suffit de rien. Oui, de presque rien mais il suffit juste de savoir regarder l'autre dans l'autre coin, de savoir partager sa joie et l'extraire là où elle est, même dans les petites choses qu'on voit ou qu'on ne peut pas les voir. Il suffit d'avoir le sens du bon regard, l'équilibre et savoir que vous êtes ici sur terre que des invités, et l'invité est dans l'obligation de respecter son hôte.
  • Qui êtes-vous ? Je lui demande curieusement.

Elle respire à fond et m'explique : « Je vous ai enfanté, et tant appris depuis la nuit du temps, car je suis la source de tous vos exploits, et vous avez su vous adapter et réussir ce qui vous semblait impossible avec votre intelligence, persévérance et sciences en vous inspirant de mes éléments : l'eau, l'air, la terre, le feu et l'espace. Sauf que vous avez oublié que tous ces éléments sont complémentaires, pas un ne domine l'autre et ils doivent être toujours en harmonie.

Le vent peut éteindre le feu mais aussi attiser les flammes qui mangeront toute une forêt. L'eau peut éteindre le feu, et le feu faire bouillir l'eau. La terre peut aussi éteindre le feu s'il est petit. L'eau et la terre forment la boue, mais s'il y a trop de boue, c'est le déséquilibre. Tout est donc une question d'équilibre et surtout de respect. Les hommes peuvent vivre en paix s'il y a respect.

Si on doit prendre soin de son corps, de son cœur alors on doit aussi penser à comment prendre soin de la planète. N'est-ce pas le cas ? » Ses paroles résonnent comme un écho dans mon esprit, révélant une vérité universelle, un appel à l'harmonie avec la nature et entre les êtres humains.

J'espère que cette continuation vous plaira. N'hésitez pas si vous souhaitez en découvrir davantage!

Ensuite, elle met du temps pour continuer, et dans son silence, je ne voyais que deux trous noirs à la place de ses grands yeux. Elle parle d'une voix chargée de tristesse et de prémonition.

  • Savez-vous quel sera votre drame d'ici peu ?

Je ne lui réponds pas, je reste encore fixé à ces yeux qui brillent comme s'il y a de sombres perles dedans. Elle s'approche lentement de moi et me dit les yeux en larmes :

« Vous allez perdre des milliers de vies, vous allez être comme prisonniers dans vos propres maisons. Malheureusement certains vont mourir, d'autres survivront. Après cela, le monde va changer : Vos mœurs, vos habitudes, vos lois, vos pensées, vos chefs d'État aussi et vos priorités. Oui, tout va changer autour de vous. Espérons que vous allez en retenir leçon de ce que vous devriez être et de ce que vous allez faire de votre futur, et surtout de cette planète. Désormais, tout dépendra de vos bonnes ou mauvaises actions à mener. Mais le plus important dans tout ça, vous serez confrontés à un virus, et vous allez subir pour la première fois un destin commun, éprouvant de la peur et de la solitude. Vous allez être privés de vous enivrer des rayons de soleil, que longtemps vous n'aviez pas su saisir leur grâce dont je vous ai offerte tout ce temps passé. À ce moment, je serais en deuil. »

Sa voix résonne dans l'air, portant un avertissement qui semble lointain mais pourtant si proche. Soudain, le temps change, le ciel s'assombrit, les arbres se déchaînent, et la pluie tombe en torrent. Je me mets à l'abri tout comme les autres, mais lorsque je regarde à nouveau, la dame en noir n'est plus là.

Peu de temps après, je me retrouve seul dans la gare. Si seulement je pouvais rester un peu plus quand tout le monde avait disparu. Mais, je n'avais le droit qu'à un seul voyage, qui va sûrement me coûter l'éternel songe dans ce que je venais de rêver et d'entendre.

Souvent, je pense à elle, à cette dame en noir que je n'avais pas eu le temps de lui dire que je la respecte et de lui dire que serait l'homme sans couleurs dans le ciel et la terre ? Que serait la vie sans respecter la nature ?

Je pense à son odeur pareille à l'argile mouillée et parfumée jaillissant de chacun de ses mots qui résonnent encore dans ma tête. Je pense aux saisons qui vont changer, aux forêts que nous avions tranchées ou brûlées durant des années, à tant d'abeilles et papillons que nous avions chassés, et ces millions de glaces que nous avions fait fondre et disparaître à jamais.

La tristesse et la sagesse de ses paroles résonnent encore dans mon esprit, comme un avertissement que nous avons trop tardé à entendre. Je ne peux m'empêcher de méditer sur ses paroles, sur ce futur qu'elle semble avoir entrevu avec une clairvoyance troublante. Qui était-elle vraiment, cette énigmatique dame en noir ? Ses paroles semblent provenir d'une sagesse ancestrale, empreinte de compassion pour l'humanité et d'une profonde connexion avec la nature.

A présent, je ne cesse de penser à nos méfaits, à notre indifférence de continuer à ruiner cette nature si généreuse.

Les jours ont passé et depuis, je n'ai pu refaire le même rêve.

À chaque fois que j'avais envie de revoir cette dame, j'errais au milieu des arbres, je m'abandonnais à l'écoute des chants d'oiseaux, pour m'inspirer davantage, toujours à la recherche de son image, mais rien !

Je poursuivais mon endurance des semaines, elle n'est jamais refait surface et avec le temps, l'espoir s'affaiblissait.

 La gare, le jardin public, et quelques endroits dans la ville devenaient mon sanctuaire, d'où chaque jour je ne manquais pas le rendez-vous. Mais, elle n'est jamais revenue, je n'arrive pas à la retrouver...

Au fond de moi, je savais que c'était peut-être un délire ou une illusion, mais j'avais pourtant aimé ce délire à côté de la froideur du réel.

Comme si je tenais un bout de rêve et je ne voulais pas le lâcher, je voulais à tout prix revoir Blanche, cette mystérieuse dame en noir

Alors, je changeais d'endroits, je rallongeais les rues sans savoir où aller.

Une fois, je suis rentré dans un café, le serveur ne m'adressa pas la parole, il n'aimait pas les étrangers.

J'ai ensuite aperçu un homme habillé lui aussi en noir, cela attira mon attention, il me regarda sans rien dire, il est peut-être comme moi, à la recherche de quelque chose ; sûrement pas une femme ; il est à la recherche de soi.

Je m'assis à côté de lui, il avait l'air d'un journaliste ou un auteur et je le regardais concentré sur son papier , il semblait avoir du  mal à terminer ce qu'il était en train d'écrire, il se penchait sur la feuille, faisant les mêmes gestes depuis tout à l'heure, ajustant ses lunettes à chaque fois. Je me suis dit que peut-être lui aussi avait fait le même rêve et il a fini d’être  ici comme moi frustré, égaré et triste comme moi.

À ce moment, j'ai changé la direction de mon regard, et j’ai longuement regardé dehors, respirant à fond.

Je sentais encore le poids de la ville qui reposait sur mon corps, j’étais affaibli par le  voyage, les paupières lourdes et pourtant je n'avais plus sommeil.

En observant les alentours, je ne voyais que des visages ici et là, pareil à des fruits qui s'achèvent lentement en silence, un silence qui les prend en otage comme des images sans identités.

Par contre, j'ai aimé rester dans ce café. Le silence, L’odeur, le peu de gens qui avait, tout me plaisait

Et en plus je n'avais plus d'endroit où aller. Je me sentais comme ce lieu où beaucoup d'hommes viennent pleurer leur chagrin, comme si les  larmes sont les seules qui nous font rappeler ce que nous avons en commun : nous sommes des êtres humains.

C'est bizarre, je me sentais triste et solitaire. Je voulais rester encore et encore dans ce même endroit qui se vidait petit à petit de ses clients pendant le soir ; et les parties qui restaient en moi étaient destinées à un autre homme venu de loin d'une autre ville, un inconnu qui passe en moi, qui me décompose.

Chapitre III :  Le rêve et la dame en noir.

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