Chiennes de garde
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Chiennes de garde
La sonnerie du téléphone retentit au loin, Alia sursaute foudroyée par une peur soudaine. Un flot d’images l’envahit brusquement, elle ne contrôle plus sa tête, sa mémoire et les battements de son cœur. Elle ne contrôle plus rien. Un visage plissé surgit, des yeux noirs alourdis par le maquillage la scrutent et l’agrippent. Des mots résonnent comme de profondes blessures l’étouffent. Son corps se souvient malgré elle. Malgré les années et la distance. Comment n’a-t-elle pas pu oublier ? Pourquoi le temps n’a pas soigné ses meurtrissures ? Elle pensait pourtant avoir tourné la page, mais cette maudite sonnerie d’un téléphone istanbuliote la ramène ligotée à ses souvenirs à Alger.
Tout lui revient. Ses innombrables insomnies, ces longues nuits blanches ou les mots imparables de Madame Imane cognaient son âme. Son impuissance et l’obstination farouche de cette dernière à freiner ses élans de liberté. Tout ce qu’elle pouvait faire, tout ce qu’elle devait dire et accomplir et qu’elle n’a pas osé. Était-ce de la peur ou de la pudeur ? La pudeur que l’on doit à nos aînés ?
Sa patronne, Madame Imane, avait l’âge de sa grand-mère. De longues mèches colorées tombaient sur ses yeux noirs de hyène pour cacher un front dégarni. Une marque du temps et de l’âge qui avancent. C’était une grande féministe lui a-t-on dit. Les médias la dépeignaient comme une femme de pouvoir émancipée et une leader née. Invitée sur tous les plateaux de télévision nationales, elle donnait des interviews à la presse et animait des conférences pour évoquer l’injustice qui règne, les lois archaïques en vigueur et les discrimination et les violences subies par ses paires.
C’était juste un costume que Madame Imane arborait ostensiblement. Un statut. Une position sociale. Une étiquette, comme tant d’autres, qu’elle exhibait avec fausse modestie à toute occasion. Alia la voit encore, les mains dans les poches de son pantalon de marque, discourant sur l’égalité ou la parité, peu importe. Elle exhortait les présents à changer leur vision du monde et de l’autre. Quelle mise en scène ! lâchait Alia chaque fois qu’elle écoutait ses mensonges, ses prétentions et ses délires. Sur son perchoir, comme un enfant qui pense être le nombril du monde, Madame Imane distillait sa vérité. Le regard pendu, elle cherchait ses mots, balançait ses concepts techniques et creux qui faisaient bondir la salle et arrachaient des applaudissements fiévreux.
Pourtant, sitôt les portes de son bureau fermées, loin des caméras et des journalistes, Madame Imane redevenait elle-même. Une personne aigrie, autoritaire, misogyne et conservatrice. Dans les couloirs de l’organisation humanitaire qu’elle présidait, elle dictait ses ordres entre deux coups de téléphone. Elle exigeait obéissance et soumission, elle vomissait l’échange et écrasait sans vergogne toutes les femmes à son passage. Alia rêvait de lui cracher ses vérités : impostrice ! Meurtrière ! Usurpatrice !
Madame Imane, pensait Alia, ressemblait à ces célèbres acteurs ou producteurs de cinéma qui étaient artistes le matin et devenaient violeurs le soir. Séparer l’homme de l’artiste n’est-ce pas absurde ! Comment est-ce possible d’être la chose et son contraire ? L’art n’est-il pas une vision plus humaine du monde ? Et puis comment couper la poire en deux si elle est pourrie déjà ?
Alors que tout le monde balançait son porc, Alia c’est Madame Imane qu’elle aurait voulu donner au bûcher. Elle une femme de pouvoir chienne de garde du patriarcat, qui n’a pas hésité à fusiller les rêves d’une jeunesse en ébullition !
Luce hace 2 meses
je suis plutôt partisane de séparer l’homme de l’artiste mais effectivement ça dépend des personnages et des histoires… je ne suis pas fan des chiennes de garde de toute façon! les femmes qui veulent faire payer aux hommes restent dans la vengeance alors que je serais plutôt pour la reconnaissance mutuelle respectueuse… il y a plusieurs textes où nous avons échangé la dessus avec d’autres écrivain(e)s de Panodyssey. c’est un long débat 😉