Le Théâtre Antique de Delphes
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Le Théâtre Antique de Delphes
Le théâtre antique de Delphes. Ou du moins ce qu'il en reste. Quand je regarde la brochure que j'ai récupérée à l'office de tourisme d'Athènes, on y voit une reconstitution de ce qu'il était dans ses beaux jours. Je dois avouer qu'il était beau, le genre d'endroit où j'aurais adoré jouer. Le genre d'endroit que tu aurais adoré. Cette pensée me pince le cœur et humidifie mes yeux.
J'ai l'impression de sentir la présence du dieu Apollon en ce lieu.
Je regarde les gradins d'où je suis, sur la scène, et je me rends compte de la taille du théâtre. C'est vraiment impressionnant !
Je reprends l'étui contenant ma guitare qui est posé au sol puis monte quelques marches des gradins pour m'y asseoir. Depuis que je suis arrivé en Grèce il y a dix jours, je n'ai pas réussi à écrire ne serait-ce qu'un couplet, ni même un vers. Malgré tout, je sors mon carnet ainsi qu'un stylo. Si je me dis que j'y arriverais pas, c'est voué à l'échec. Alors j'essaie de convaincre mon cerveau du contraire en faisant comme si je savais déjà quoi écrire.
Nos souvenirs ensemble tournent en boucle dans ma tête. J'imagine comment tu aurais réagi en voyant cet endroit, tu aurais eu les yeux qui pétillent, tu aurais sauté sur place en disant que ce théâtre est génial. Tu m'aurais ensuite raconté son histoire dans les moindres détails sans t'arrêter. Parce que tu étais comme ça, quelqu'un de passionné. Un petit rire m'échappe en pensant à tout ça, puis je me rends compte que deux couplets ainsi qu'un potentiel refrain sont écrits sur le papier. Même d'où tu es tu continues d'être ma muse, ma source d'inspiration.
En quelques minutes, le premier jet de ma chanson est écrit. Je fais quelques modifications pour faire des rimes, pour une meilleure musicalité et j'y met un point final. Je la relis et les larmes coulent. Elles coulent parce que la chanson parle de notre passé, et de notre futur qui a été piétiné. Je pleure parce que notre histoire est comme ce théâtre : notre passé est magnifique, mais aujourd'hui, il n'en reste que des ruines et le souvenir de ce qu'il était et ne sera plus.
j'essuie mes larmes du dos de la main et sors ma guitare de son étui. Je passe mes doigts sur ce soleil que tu avais gravé sur l'instrument.
- "Pourquoi un soleil ? Avais-je demandé
- Parce que comme le soleil, tous les jours tu mets de la lumière dans ma vie. Grace à toi, Elyo, il fait constamment jour dans mon cœur. Le titan Hélios grâce à son char amène le jour sur terre. Toi, avec ta pureté et ta bonne humeur, tu repousses les ombres et apporte la lumière. m'avait-il répondu avec un sourire lumineux n'ayant rien a envié au soleil."
Une fois devant les gradins, je relis mon texte pour l'avoir en tête, puis je pose le carnet au sol, ouvert afin de pouvoir y jeter un œil de temps en temps. Je ferme les yeux et prends une grande inspiration. Je sens mon cœur s'emballer. J'ai le trac alors que je suis seul, même avec moi-même je ne suis pas en confiance. Il n'y a qu'avec toi que je me sentais en confiance.
C'est les yeux fermés que je gratte les premières notes. Puis les premières paroles.
You were everything I had
(Tu étais tout ce que j'avais)
Now you are everything I miss
(Maintenant tu es tout ce qui me manque)
Je chante ma joie d'hier, et je joue ma peine d'aujourd'hui. Je me laisse porter par la musique et par mes émotions. Je crois bien que je pleure, mais je continue.
Au moment d'enchaîner le dernier refrain, j'y mets toute mon énergie, toute ma peine, toute ma colère. Une douce chaleur envahit alors mon corps. Je le sens bien. Je ferme les yeux pour profiter de ce moment. Lorsque je les rouvre, l'image du théâtre en ruine se superpose à celle de ce qu'il était autrefois, rempli d'un public en folie. Mais surtout, je te vois, toi et ton sourire au milieu de cette foule d'inconnus, alors je ne chante plus que pour toi, comme avant.
Alors que mes dernières notes s'évanouissent dans la nature, une larme coule sur ma joue, et s'écrase au sol, tout comme mon corps. La superposition se dissipe. Je reste quelques temps à genoux, à pleurer ton départ. Je relève la tête vers l'endroit où tu te trouvais, et j'y vois une fleur. Je suis presque sûr qu'elle ne se trouvait pas la tout à l'heure. Je me rapproche. Je monte les deux premières marches des gradins et je l'observe. Une jacinthe.
Je me souviens de ce mythe antique, Hyacinthe, le grand amour du dieu Apollon. Ce dernier avait tué le jeune homme par accident. Alors qu'ils jouaient au disque tous les deux, Zéphyr, dieu du vent d'ouest, amoureux aussi de Hyacinthe, et jaloux d'Apollon, dévia le disque lancé par ce dernier et frappa mortellement le jeune homme à la tête. Dévasté, Apollon transforma son amant en fleur : une jacinthe.
Si j'en avais eu le pouvoir, je crois que j'aurais fait la même chose que le dieu, je t'aurais transformé en fleur pour te garder auprès de moi pour toujours.