Ce petit texte voit le jour car je n'ai plus envie cette après-midi, de me retrouver confronter au confinement obligatoire.

J'ai plutôt envie de sortir me promener pour tordre le nez au coronavirus noir et voir si il en sort quelque chose sous le soleil exactement! Je me suis donc installée sur mon petit balcon, (ce qui est vu par mon imaginaire comme un demi-cloisonnement), derrière mes géraniums en fleurs, ma tasse de thé au thym près de mon ordinateur, avec le bleu du ciel pour témoin épistolaire, assise sur le seul coussin ayant échappé au massacre de la Sainte Barthélemy, orchestré par mon bien trop gros chat des forêts norvégiennes, toutes griffes dehors.

Il ya quelques années de cela, je vous livre une anedocte en catimini, je mettais procurer un petit sismomètre de poche car mon voisin s'était fait livrer à grands frais d'un livreur étiqueté "amoire à glace", suant et soufflant comme un boeuf coréen qui n'avait pas emprunté l'ascenceur, un rameur pour obtenir de magnifiques tablettes de chocolat et séduire l'immeuble tout entier, avec un rictus coincé entre sa cage thoraxique et son dentier. Je souhaitais en effet, enregistrer les vibrations émises par son appareil à musculation car j'avais doublement réalisé que 1° je ne dormais plus très bien et que 2° je l'imaginais dans une sorte de roue tournante et s'échauffant, le damné, comme un hamster en délire. Aujourd'hui acculé à la nouvelle règle du travail qu'est le télétravail, je l'entends encore plus qu'à l'accoutumé le pauvre malheureux qui se tord le cou, non de douleur mais pour admirer un bout du dôme des Invalides, par sa fenêtre d'angle du carrefour. Alors mon voisin travaille t-il vraiment en ramant? Je m'interroge sur son geste hygiènique pour se faire mousser (recommandation expresse des hautes autorités,) et j'ai planté mon instrument à enregistrer les vibrations sous les plis de son fessier du sportif en chambre qui narguaient trop mon plafond! Il fallait bien que j'indique aux enquêteurs de l'assurance que le bruit était tel qu'il nuisait à ma santé et que ce n'était pas un affreux secret!

Mais c'était trop tard, j'aurais du réagir avant car la capitale est désormais silencieuse. La pandémie a cassé le bruit de la rue, et a baissé le niveau de pollution. L'affreux dioxyde d'azote est ainsi devenu jaloux de l'autre idiot de virus oriental et peut se targuer de tuer plus. Plus blanc que blanc disait la publicité pour une lessive!  Est ce vrai que les maladies liées à la pollution de l'air tuent plus de personnes par an que tous les virus de peste, de choléra, d'ébola réunis? Nos sensibilités sont écorchées par ces impertinences mortelles et si virulentes. Quand on aime la vie, les gens, ses voisins on se protège, on reste chez soi, et on ne prend plus sa voiture même électrique  et même de la nouvelle génération, et même si elle utilisent des cookies afin de nous offrir la meilleure expérience possible de la conduite sans odeur. Les mêmes gateaux au pépites de chocolat permettant parait-t-il de fournir des fonctionnalités essentielles telles que la sécurité, la gestion du stress, l'accessibilité aux personnes à mobilité réduite. J'ai lu aussi que cela améliore la convivialité et les performances (de quelle nature?) grâce à diverses fonctionnalités, telles que la reconnaissance de la langue, les résultats de la recherche et améliorent ainsi notre quotidien. En cliquant sur les boutons et leurs aguments fatals, on peut juster épater la galerie de la réalité et non celle des dortoirs de jeunes écervelées. Le sport favori de mon voisin, je l'ai vu dans son oeil l'autre jour dans l'escalier, n'est pas de ramer mais bien de boire des Martini dry à gogo pour ferrer les belles poissonières, à l'insu de notre concierge manipulée par lui comme une grande peluche. Il va falloir qu'il fasse attention, car on voit bien maintenant le haut de la Tour Eiffel depuis que le ciel est redevenu pur et que la lune rougit de plaisir!

Il faudrait aussi avoir une conversation taoïste avec mon voisin à distance respectable (de palier à palier par exemple) car mon accidentelle rencontre dans la cage de l'escalier renvoie bien à la structure technique de son rameur- buveur dans une attitude proche du penseur-poète d'Auguste Rodin sans forcer ce qui doit venir en bronze, en 1902.

Cette sculpture est certainement la plus célèbre des réalisations de l'auteur qui a rendu folle Camille Claudel. On voit un homme qui semble méditer et qui réfléchit tellement fort que l'on se demande quel est le dilemne ou le blême qui le questionne avant de rentrer par la porte aux enfers dans les ténèbres pour toujours ou de sortir de la porte du métro station Invalides je crois. Oh! Divine Comédie! Rodin, le penseur et Dante sont bien dans une triangulation infernale d'un trio improbable. La pensée est souvent représentée par les sculpteurs d'autres générations antiques en une jeune et fougueuse guerrière drappée dans une nudité de bon aloi comme Athéna sait si bien le faire en un geste auguste, mais ici à l'hôtel Biron, on admire la musculature d'un homme nu, mûr, bien conservé et qui évoque l'agilité de l'esprit et la beauté des sports des jeunes éphèbes grecs ou olympiens.

Le modèle ne peut être mon cher et noctambule voisin qui reposera un jour au Panthéon pour avoir trop ramé au dessus de ma tête! 

En analysant devant vous ce qui fait l'opposition entre mon jeu d'écriture, la figure du grand Rodin qui a travaillé toute sa vie durant pour réaliser sa porte de l'Enfer et mon voisin, j'en déduis l'existence de trois types de formes opposées "formes-figures-mouvements" en assimilant les formes aux mots-maux, les figures aux sculptures et les mouvements au activités des confinés.

Créer de la beauté par un simple regard sur le monde demeure cependant notre sérénité!

Jeanne Gabriel-Villeneuve