8-La colère en moi
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8-La colère en moi
J'ai bien écouté ma colère, cette colère qui gronde en moi. Elle est tournée ce matin contre elle. Hélène m'horripile, me sort par les trous de nez.
Je vais mettre de côté ma compassion, mon amour de maman, ma patience, ma douceur, ma compréhension, ma pitié, la respiration consciente, les mantras, et même mes connaissances en psychologie, en analyse, en littérature, en philo, pour lâcher enfin tout ce que j'ai sur le cœur, dans les tripes, tout ce que je retiens depuis des lustres, tout ce que je n'ose lui dire sur le moment et qui à force de tourner en rond dans ma tête est devenu incontrôlable. Je vais devenir la langue de pute que je peux être, au fond sans trop de mal je dois avouer, et c'est bien ça le plus terrible aussi. La colère vous fait devenir autre, l'autre, ce dragon enragé emmuré depuis des années, cette horrible mégère visqueuse et rouge, qui peut dire des insanités sans froncer le sourcil, avec ce léger sourire qui fend ses lèvres pincées, ce sourire qu'elle laisse transparaitre tout en faignant de vouloir le retenir alors qu'au fond elle sait qu'il va se voir, tout ça juste pour être encore plus méchante. Parce que c'est kiffant. C'est troublant. C'est bandant. Être une bonne vieille salope, une morue, une méchante, une vraie, sans fard et sans artifice. Et répandre le mal autour de soi. Blesser, faire souffrir, faire pleurer. Extirper sans aucune difficulté les larmes du cœur, faire se serrer la gorge, faire baisser la tête, et abattre de sang froid sa proie qui tremble dans un ultime sanglot retenu, avec la satisfaction du travail bien fait et surtout bien mérité. "Na, bien fait".
"Na", car oui, la colère est puérile. Elle remonte à l'enfance et se nourrit de ses blessures. Elle tire sur le fil invisible qui est attaché aux souvenirs, aux punitions, aux humiliations de l'enfant qui n'avait pas le droit de crier à l'injustice. Elle vient de lui, de ce père, de mon père. Merci papa.
06/04/2015