Parfois je veux me sentir comme une enfant, parfois je veux me sentir comme une femme. Mais il semble que je ne possède jamais le bon âge au bon moment.
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Parfois je veux me sentir comme une enfant, parfois je veux me sentir comme une femme. Mais il semble que je ne possède jamais le bon âge au bon moment.
Ou : Les tribulations de Conscience de moi et de Perception des autres, deux meilleurs ennemis à la rivalité magique. (Episode 1 : Jamais une femme au bon moment)
1ère partie
Au supermarché ce jour-là, je joue à la femme d’affaires ; le dos droit, le panier tenu du bout des doigts, les sourcils froncés, le visage du poker. Je compare les prix au kilo tout en ajustant des lunettes fictives sur le bout de mon nez. Je jette mon futur achat dans le panier d’un geste vif, rapide. Un geste de femme bien ancrée dans les affaires, somme toute.
C’est à ce moment qu'un employé du magasin dédice d'accompagner mon lancer d'un "youpla !”. Un youpla qui m’est dédiée. Un “youpla” à la Mary Poppins, une acclamation destinée aux enfants. Mon scénario s’en trouve chamboulé. Mon dos s’assouplit, perd de sa raideur. J’attrape le panier des deux mains, et esquisse un sourire gêné en voyant disparaître de sous mes yeux les lunettes rondes que je venais de créer sur mon nez. Je dénoue ma cravate mentale et m’en vais payer mon paquet de céréales, les pieds hésitant, en boitant à demi, incapable de me rappeler de ma démarche d’adulte. Soudainement, tout autour de moi m'apparaît plus grand.
2ème partie
Dans la rue, quelque fois, j’aspire à n’être qu’une simple enfant. De la musique dans les oreilles, je regarde les passants et les habitations autour de moi en imaginant mille vies. Mon corps baigne dans une veste trop grande, les mains débordent à peine de leur manche respective. Mes cheveux se prennent au jeu du vent, éloignant de moi tout besoin de feindre, ne serait-ce qu’une tentative de coiffure respectable. Je pense à toutes les fois où la nature prenait le dessus sur nous lorsque nous étions enfants. Comment se salir était la marque d’une bonne journée, comment les joues étaient rougies d’avoir joué de toutes nos forces, comment la terre coincée sous mes ongles ne me dérangeait pas.
C’est à ce moment précis qu’un passant décide de me dévisager de haut en bas, le sourire insistant, le regard peu subtile. Mon scénario s’en trouve chamboulé. La chemise dans laquelle je flottais il y a un instant ne me couvre plus. Mon corps entier est exposé, coincé dans une combinaison de peau, moulée sur la silhouette étrange formée par l’association de mes muscles et de ma graisse. Je ne sais plus comment me déplacer, chacun de mes mouvements me paraissant être une invitation au jaugement. Je me ressaisis, me grandis, accélère le pas, et verrouille un regard vide vers l’horizon. Enfin, j’arrête de sourire, à la manière d’une businesswoman qui viendrait de procéder à un licenciement. Pourquoi tout m’apparaît plus petit soudainement ?