Je vais bien, ne t'en fais pas
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Je vais bien, ne t'en fais pas
Vous êtes nombreux à me dire : « Tes articles sont très biens, mais comment tu vas, toi ? ».
Le but de ce blog n'est peut être pas de vous raconter ma vie au jour le jour, car elle est somme toute assez répétitive et vous vous lasseriez rapidement ; mais plutôt de vous faire partager mes impressions et mes questionnements sur ce que je vois et vis ici, comme une ouverture sur des réalités qui sont difficiles à appréhender en restant chez soi. J'espère que cela vous plaît ainsi. Quoi qu'il en soit, je vais me faire un plaisir de répondre à votre question aujourd'hui.
Les choses se passent ici globalement bien. Je suis content de ce pourquoi je suis ici, satisfait de ce que je fais et des personnes avec qui je travaille, et accepte donc les contraintes et les difficultés en lien avec ma mission. La vie est plutôt routinière, les règles de sécurité assez strictes et les possibilités de distraction très limitées ; l'expatriation loin de ma vie toulousaine, de mes proches et de Nina parfois assez frustrante ; la diversité de la vie à l'occidentale, de la nourriture, ma liberté de déplacement me manquent regulièrement. Mais l'expérience que je vis ici, les rencontres humaines que je fais, autant avec les expatriés qu'avec les tchadiens, la découverte d'une réalité et d'une pratique médicale totalement différentes de celles que je pourrais côtoyer en France, rendent ce nouveau volet de ma vie très enrichissant et me permettent d'assumer le choix que j'ai fait de venir ici.
Cette mission est comme se plait à le dire ma tante d'une certaine manière une retraite. Pas une retraite au sens repos du terme, mais une retraite de notre monde occidental, du confort de notre société et de notre mode de vie, pour me consacrer pleinement l'espace de 6 mois à un travail qui fait sens pour moi, dans un contexte totalement différent de mon environnement habituel. Cela ouvre l'esprit, apprend à regarder les choses différemment, permet de chercher à comprendre les choses de l'intérieur et non du haut de notre petite forteresse gauloise ; et ce double regard, même s'il nécessite de grands efforts d'adaptation et de décentration, et même s'il n'est pas toujours facile de trouver un équilibre entre deux perceptions, est des plus enrichissants car il permet d'approcher un peu mieux la réalité des choses. Et c'est cette synthèse, ma synthèse, qui reste purement subjective, que je m'efforce de vous faire partager à travers ce blog.
J'ai finalement choisi de pratiquer la profession de médecin ; mais je n'en ai pas pour autant oublié mon intérêt pour l'interculturel. Et au travers de cette expérience, j'affine encore un peu plus mon goût pour la rencontre entre des cultures différentes, et mon intérêt à percevoir ce qui nous éloigne et ce qui nous unit.
Ma vie suit donc son cours ici : partagé d'une part entre le travail à l'UP, les staffs médicaux du matin, les visites et les admissions du jour, et les gardes répétées, n'étant que 4 puis 3 médecins lors de nos breaks successifs ; avec une activité en dent de scie selon les périodes de distribution de la CPS, oscillant entre 40 et 75 patients, qui représente lors des pics une charge vraiment très lourde et fatiguante.
D'autre part les parties de basket régulières avec mes amis de l'UP, moments privilégiés de décompression et d'aération de l'esprit, et pour lesquelles nous avons entièrement (et fièrement, il faut le dire) rénové les panneaux.
Et enfin les moments de repos à la base vie, à écrire mes articles, à trier ma musique sur mon ordi, à regarder des films et de nombreux documentaires sur le Monde et sur l'Afrique, et à discuter avec tous ceux qui habitent ici, issus de différents pays d'Europe et d'Afrique, aux parcours de vie très différents ; discuter du projet, de l'Afrique, de MSF, du fonctionnement du monde, des raisons de notre présence ici.
Nina, elle, vient de terminer son stage et de soutenir son mémoire de Master 2. On peut vraiment la féliciter pour l'achèvement de ce parcours étudiant, qui a été difficile et semé d'embûches qu'elle a su surmonter, particulièrement cette dernière année. Elle va enfin pouvoir retourner en Centrafrique pour fêter Noël avec sa famille et sa mère, après des années d'éloignement (8 ans) sans jamais pouvoir revenir. Je l'espère et je le lui souhaite vraiment, car comme vous l'avez peut être suivi, la situation est loin d'être stable ces derniers jours en Centrafrique, à la veille d'élections succédant à plusieurs années d'exactions et de guerre civile.
Je vais bien ; et elle va bien ; ne vous en faîtes pas. C'est tout ce que je voulais vous dire. :-)