Cire...
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Cire...
Un des grands motifs de consultation.
On l’appelle aussi cérumen, joliment rebaptisée cire humaine par nos Français imaginatifs et parfois encore plus poétiquement par miel, certaines oreilles fabriquant beaucoup de miel… d’autres ayant du sérum dans les oreilles.
Parfois même les oreilles sont bouchonnées… (comme le vin), mais par du miel…
Il y en a de toutes sortes : dure, molle, de toutes couleurs, de toutes odeurs… et de toutes quantités. Le Français est intarissable sur la cire.
Certains s’étonnent qu’il faille venir tous les six mois faire retirer cette saleté. A contrario, d’autres viennent nous voir un jour, car ils n’entendent plus bien, exigeant parfois qu’on veuille bien leur retirer la cire qu’ils n’ont pas, cause de cette surdité apparue soudainement (du moins le pensent-ils).
Le Français, soucieux que cet orifice borgne soit toujours impeccable, y va de bon cœur pour le rendre d’une netteté irréprochable abusant des « cotons-tiges » quand ce n’est pas une petite curette encore plus agressive pour son conduit et parfois son tympan.
Combien de perforations de l’adulte ou de l’enfant, occasionnées par ces cotons-tiges, les Oto-Rhinos ont-ils vues dans leur carrière ?
Car les enfants font ce qu’ils ont vu faire par leurs parents ! Parfois même, ils se promènent avec les cotons-tiges introduits dans leurs conduits.
Je me souviens d’un patient dans sa salle de bain qui les avait laissés en place, attendant certainement que l’extraction se fasse d’elle-même. Il n’avait hélas pas fermé la porte et son ouverture soudaine avait enfoncé l’arme en question au fond du conduit…
Nos voisins suisses et peut-être d’autres pays précisent sur l’emballage de ces cotonnettes de ne pas les introduire dans les conduits auditifs.
Pourquoi ne le fait-on pas chez nous ?
Faut-il y voir un intérêt mercantile ? Impensable voyons !
Depuis janvier 2020 l’usage des cotons-tiges est interdit dans la Communauté européenne. Enfin, diront les ORL !
Mais la raison n’en est nullement médicale. Le remplacement des tiges de bois par des tiges en plastique où s’enroule le coton a rendu son usage peu écologique… Son abandon a donc été programmé.
Précisons simplement que les glandes cérumineuses fabriquent cette cire pour évacuer naturellement les saletés qui s’accumulent dans cet orifice borgne. Introduire un coton-tige revient à tasser la cire comme on le ferait de la poudre dans un fût à canon, la quantité enlevée restant infiniment moindre que celle tassée.
Chez certains patients, pour des raisons anatomiques de conduit, de dureté de cire, d’excès de poils dans le conduit (hypertrichose des conduits), la cire s’évacue mal.
Évitez produits et farfouillage et venez voir votre médecin qui vous en débarrassera sans traumatisme.
Une nouvelle mode est apparue depuis quelques mois. Elle consiste à pulvériser dans le conduit du sérum physiologique. Si c’est physiologique… c’est forcément bon pour l’organisme. Notre époque réprouve odeurs ou saletés. Tout orifice doit être irréprochable. Le sérum physiologique dont le Français fait grand usage pour les nez encombrés des nourrissons est dorénavant utilisé pour leur propre nez (alors qu’il est parfaitement propre et que son propriétaire sait se moucher) et les oreilles. Cela amène parfois une irritation chronique, notamment de l’orifice narinaire qui cesse miraculeusement à l’arrêt des lavages… Il suffit d’ailleurs de juger de l’évolution d’une plaie superficielle soumise à des bains de mer répétés pour constater que de telles habitudes ne sont pas très… physiologiques !
Deux anecdotes pour clore le sujet, rapportées pour la première, par l’un de mes collègues.
Constatant qu’une de ses patientes présentait un gros bouchon de cérumen il en pratiqua le lavage avec un énéma (poire à eau).
Le patient … patient, attendit quelques minutes avant de remarquer :
Si je comprends bien Docteur, vous lavez l’oreille gauche pour expulser la cire qui se trouve dans l’autre oreille ?
Un peu confus, ce collègue revint laver le bon côté.
La couleur de la cire est également une source d’interrogations.
Alors que j’extrayais du conduit une cire ambrée une patiente, probablement surprise de la couleur s’interroge et m’assène :
C’’est pour ça que je mouche aussi la même chose !
Le Français, on le voit, n’est jamais à court d’arguments !
Photo: seriniti.fr