D...ouleur
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D...ouleur
Vaste chapitre combien de fois évoqué ! Peut-être vaudrait-il mieux dire immense tant notre méconnaissance était grande pour la traiter, du moins jusqu’à ces dernières années.
Pourtant notre extrémité céphalique est riche de pathologies douloureuses, et ce, à tout âge : migraines, sinusites, algies dentaires, névralgies, douleurs postopératoires, douleurs cancéreuses, douleurs d’arthrose…
En 1993 encore, lors du Congrès de l’Association Internationale pour l’Étude de la Douleur, l’ancien ministre de la Santé et médecin lui-même, Philippe Douste-Blazy dressa un constat accablant sur nos pratiques médicales. 90% des douleurs cancéreuses pourraient être soulagées alors que seuls 30% l’étaient correctement !
50% des patients ne recevaient aucun traitement. La France, reléguée au 40e rang mondial pour l’usage des stupéfiants à usage médical !
Avec une indifférence quasi générale pour ces symptômes, sources de doléances répétées, que l’on ne traite pas ou très mal, peut-être simplement parce que l’enseignement restait des plus ténus et que le médecin n’avait jamais été formé au difficile traitement de la douleur.
Heureusement l’attitude médicale évolue.
Depuis l’Antiquité, les philosophes (Platon, Aristote notamment) avaient longuement analysé plaisir et douleur, l’un n’allant pas sans l’autre pour Platon par exemple. Plus tard, Descartes et Pascal en donneront une définition.
On opposait la douleur physique, à la souffrance, qui est une douleur morale.
En 1986 enfin, une définition de la douleur est tentée. C’est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle, ou décrite dans des termes évoquant une telle lésion. Ainsi on associe à la douleur organique, la souffrance psychologique variable selon chaque individu et son vécu personnel, permettant de comprendre les discordances anatomocliniques, le chiffrage variable selon les individus et l’effet placebo constaté chez certains patients (un médicament censé ne pas agir sur la douleur soulage le patient).
En 1995, le Code de déontologie médicale précise qu’en toutes circonstances, le médecin doit s’efforcer de soulager les souffrances de son malade… Enfin !
Pourtant, plus de quatre siècles avant J.-C, Hippocrate, fondant les bases de la médecine moderne et rejetant les croyances qui attribuaient à des forces surnaturelles ou divines la cause des maladies, précisait dans son serment, repris en fin d’études par tous les étudiants en médecine des pays occidentaux :
« Dans toute la mesure de mes forces et de mes connaissances, je conseillerai aux malades
le régime de vie capable de les soulager et j’écarterai d’eux tout ce qui peut leur être
contraire ou nuisible… »
Bien que désuet de nos jours, ce serment imposait pourtant déjà chez tout médecin une obligation envers leurs patients : celle de traiter et de soulager leurs douleurs, qu’elles soient physiques ou morales…
Dorénavant, et c’est normal, tout patient peut prétendre avoir sa(ses) douleur(s) soulagée(s) et ce, à tous les stades de la maladie. Et aucun interdit ne doit exister. L’effet antidouleur du cannabis existe et est utilisé dans d’autres pays que la France. Il serait regrettable que là comme dans beaucoup de cas, la France reste en retard pour traiter les patients porteurs de douleurs chroniques et invalidantes, quelle que soit la thérapeutique prescrite, dès l’instant qu’elle se trouve en des mains compétentes.
Depuis la loi Kouchner de 2002, un nouvel acteur est intervenu : « Les associations de malades » ces associations sont parties prenantes dans le processus de santé et, au fil des ans, leur influence croît.
C’est une bonne chose que le médecin doive rendre compte de ses actes, car il tient entre ses mains la vie d’une personne.
Toutefois, dans le cas du traitement de la douleur, des plaintes de plus en plus nombreuses risquent de voir le jour pour le délicat traitement antalgique aux phases palliative et terminale.
Comment soulager sans sédater le patient et parfois l’endormir définitivement ?
Qui doit soulager, voire donner intentionnellement la mort à l’aide de cocktails sédatifs à un patient au stade terminal qui souffre et qui réclame d’être soulagé…
Est-ce le rôle du médecin censé donner la vie et soigner les malades ?
Ceci renvoie à la difficile question de l’euthanasie pour le soignant, pour la famille du mourant et pour le patient lui-même.
Photo : Puhhha photography