mars 2025

Bon, vous l'aurez compris dans mon premier article, l'objet premier de ce voyage était cette retraite. Mais avant et après, j'ai pu passer quelques jours autour de Capetown, et m'intéresser un peu à ce pays au bout de l'Afrique Australe.

Je suis donc arrivé chez Estelle, cette personne que j'avais rencontrée quelques années auparavant au Portugal, au sourire si éclatant et généreux, toujours le mot gentil, un cœur en or, toujours une attention à vous donner... Une personne rayonnante, chez qui j'ai pu être hébergé durant tout mon séjour, dans sa grande maison construite par et pour une chanteuse d'opéra initialement, à l’acoustique formidable. Elle y organise régulièrement des cérémonies et des concerts, dans un cadre très agréable, avec la piscine au milieu du patio...wonderful.

Elle me présente également Jonas, un gars comme moi né en 1982 (the best !;-)), prof de surf et qui se propose également d'être mon guide autour de Capetown. Je passerai le plus clair de mon temps avec lui, dans une complicité et une compréhension réciproque dignes d'une amitié de 10 ans. Car la maison d'Estelle est à Muizenberg, au sud de Capetown, dans la False Bay qui se situe juste après le cap de Bonne Esperance. Et c'est un des meilleurs endroits pour apprendre le surf en Afrique du Sud, précisément.

Capetown donc. La ville du Cap. Située à l'extrémité la plus australe de l'Afrique (en fait le point le plus au sud se situe à Cap Agulhas et non au Cap de Bonne Espérance, à l'autre bout de False Bay, mais peu importe), elle est le point de départ de l'histoire coloniale de ce pays. Au sud, une péninsule, le Table Mountain National Park, qui se termine en 2 pointes, le Cap de Bonne Esperance ou Cape of Good Hope à l'ouest, clôturant l'océan Atlantique ; et Capepoint à l'est, ouvrant sur l'Océan Indien.

Lieu de rencontre de deux courants chaud (Océan Indien) et froid (Océan Atlantique), lieu terriblement redouté des navigateurs pour ses furieuses tempêtes, obligeant les marins à patienter plusieurs semaines avant de tenter de le franchir (il fut nommé initialement Cape of Storms, le cap des tempêtes, avant d'être rebaptisé de manière plus optimiste), il était pourtant le lieu de passage obligé pour tous les navires commerçant sur la route des Indes et e l'Asie, jusqu'à l'ouverture du canal de Suez.

Découvert par les portugais, les hollandais y créèrent un comptoir dans la baie de Capetown, au nord de Good Hope, afin de ravitailler les navires et d'étudier le moment le plus propice pour éviter le naufrage. Le comptoir se transforme en colonie, avec des fermiers hollandais, les Boers, qui s'installent et s'expandent sur des territoires indigènes, ce qui n'est pas du goût des autochtones, les Bushmens (peuples San, Khoi-Khoi puis Xhosas) et de nombreux conflits éclatent. S'ensuit une période d'esclavage importante, afin de travailler ces terres et produire tout ce qu'il faut pour la colonie et la grande compagnie commerciale, la VOC, qui dirige toute la vie économique.

Quand Napoléon envahit les Pays-Bas en 1805, les Anglais s'emparent de ce haut lieu stratégique pour la maitrise des mers. Puis ils dirigent cette colonie d'une main de fer. La régulation des conflits entre Boers et Xhosas se fera sans contenter personne, et les fermiers blancs acculturés, qui se nomment désormais Afrikaners et parlent un créole néerlandais, l'Afrikaans, préfèrent migrer vers l'intérieur plutôt que de rester sous l'autorité britannique.

Cohabitent alors les colonies britanniques du Cap et du Natal et les républiques proclamées de l'Orange et du Transvaal, tandis que les africains noirs n'ont plus le droit que de vivre dans des réserves surpeuplées. L'esclavage a beau être aboli par les Anglais en 1833, la séparation entre blancs et non blancs (noirs, mais aussi colorés, descendants d'esclaves) reste très marquée, ne se rencontrant que pour le travail dans les champs ou dans les mines d'or et de diamants, les uns possédant les terres, les autres n'ayant d'intérêt pour les premiers que pour leur force de travail. Le reste du temps, c'est chacun chez soi, et interdiction d'une quelconque proximité.

L'empire britannique, très intéressé par les ressources minérales du pays, entre finalement en guerre avec les états Boers, donnant lieu à deux guerres anglo-boers finalement gagnées par les Anglais. L'Union Sud Africaine, dominion du Commonwealth, est alors proclamée en 1910.

C'est à partir de là que de nombreuses lois racistes et de ségrégation raciale sont proclamées, prenant le nom d'Apartheid en 1948 : vaste système prohibant tout mariage ou relation sexuelle entre blancs et non blancs, avec comme corollaires des systèmes de classification raciale, d'assignation à chaque groupe racial d'un territoire séparé, d'éducation différenciée pour éviter toute concurrence entre blancs et non blancs, et toutes les autres discriminations possibles qui s'y rattachent.

C'est à ce moment là aussi que les résistances contre la négation des noirs s'organisent, avec la création de l'ANC (African National Congress) en 1912, au sein duquel Nelson Mandela, avocat de formation, après une période de répression intransigeante de tout mouvement de revendication des droits des noirs, crée une branche armée. Il est arrêté en 1962, et passera 27 ans emprisonné à Robben Island, une île au large de Capetown, avant d'être finalement libéré en 1990 sous la pression internationale et le boycott de l'Afrique du Sud.

L'apartheid est aboli en 1991. Mandela obtient le Prix Nobel de la Paix en 1993, avec Frederik de Klerk, (président en fonction de l'Afrique du Sud), puis gagne les premières élections multiraciales en 1994. Il développe alors, sous la responsabilité de Desmond Tutu, le programme Vérité et Réconciliation, qui rejète toute idée de vengeance et prône le pardon et la cohabitation entre les ennemis d'hier, après avoir fait œuvre de contrition des exactions commises pendant l'apartheid. On parle alors du miracle sud-africain de la nation arc-en ciel.

Mais l'après Mandela n'est pas aussi rose, avec une flambée de l'épidémie du VIH sous la présidence de Mbeki ( 1adulte/6 contaminé, 17% de la population, l'un des pays les plus contaminés au monde) puis la flambée de la corruption sous la présidence de Jacob Zuma, organisant et protégeant un véritable système clientéliste et mafieux national entre 2008 et 2018. Tous sont pourtant des membres de l'ANC et d'anciens compagnons de prison de Mandela. Mais son train de vie luxueux passe avant tout.

Son successeur, Cyril Ramaphosa, actuel président, cherche à tourner la page Zuma, mais il peine à assainir ce vaste système de corruption qui persiste encore aujourd'hui. Les écarts de richesses entre blancs et noirs, dans ce pays le plus riche d'Afrique, sont parmi les plus exacerbés au monde, les populations noires et colorées continuant à s'entasser par millions dans les fameux townships, ces immenses quartiers de bicoques faites de tôle ondulée, situés aux abords des villes, à la pauvreté et à la criminalité incontrôlées. Des programmes de maisons en dur pour reloger tous ces déshérités sont bien lancés, mais la tâche est immense. Reste l'épineuse question de la réforme agraire, celle de l'expropriation des blancs pour redonner de la terre aux noirs, qui est sans cesse repoussée.

C'est donc autour de Capetown que je navigue pendant 15 jours. En dehors de mes sessions de surf tous les matins avec Jonas, et de mes progrès considérables, il faut bien le dire:-), je me promène dans cette magnifique province dominée par un relief très montagneux, de belles plages au sein de baies de sable blanc, tant du côté Atlantique que du coté Indien.

Nous allons ainsi dans la réserve nationale découvrir Capepoint et Cape of Good Hope, sous un vent très fort nous laissant imaginer ce que les marins pouvaient ressentir, puis chercher à observer à l'état sauvage des élands du Cap et autres antilopes, des autruches et autres oiseaux volants, des babouins, des zèbres (que nous ne trouverons pas), des petits pingouins et même des otaries.

Nous visitons également Capetown, son cœur de ville et ses belles plages, et montons au sommet de Table Mountain, montagne plate dominant toute la ville de ses 1.000m d'altitude, classée au patrimoine mondial de l'Unesco et parmi les 7 nouvelles merveilles du monde (!!). De là, nous découvrons toute la géographie de la baie, apercevons Robben Island au loin, apprécions un très beau coucher de soleil.

Nous flânons chez Estelle, dans l'ambiance apaisée et babacool de Muizenberg, paradis des surfeurs toujours très nombreux dans l'eau.

Je rentre, très content de mon séjour dans sa globalité, très heureux de ces moments passés à mieux connaître Estelle, touché par cette belle amitié qui nous a rassemblés avec Jonas, le temps de 15 jours.

Merci à vous ! I'll be back soon;-)