"La vérité fait mal".

Cette phrase, vous l'avez entendue à tout âge, en toute situation et peut-être que vous la défendez vous-même comme une affirmation inéluctable, une vérité universelle à laquelle on ne peut échapper. La vérité fait mal, ça sonne comme une sentence, une malédiction qui viendrait nous toucher, un verdict qu'une voix supérieure nous claironne, comme si l'issue c'était d'avoir forcément mal, de finir complètement brisé.

Hommes que nous sommes, sommes-nous destinés à ce que la vérité d'une ou plusieurs choses nous fasse fatalement mal ?

Ce qu'il faut briser, c'est cet encensement collectif et réducteur qui veut faire croire que la vérité fait toujours mal et que vous finirez souffrant et réduit à porter cette douleur d'avoir à affronter la vérité en face, en réalisant que vous vous êtes leurré. S'être leurré fait mal, engendre des émotions dérangeantes car cela occasionne un sentiment de perte de temps et de stupidité. Qu'est-ce que j'ai été stupide de croire ça, mais c'est pas possible !

Mais est-ce véritablement ça, la vérité fait-elle toujours mal ?

Nous allons décrypter ici les nuances gravitant autour de cette phrase intemporelle afin d'extraire des informations et des outils pour mieux comprendre ce qui s'y dit vraiment et pourquoi l'utiliser n'est pas toujours aidant.

La vérité est juste

En toute chose, nous cherchons à être vrai, à toucher le véritable du doigt, parce que ce qui est vrai est juste. Quand on est dans la vérité, on sait que le chemin que l'on prend va dans la bonne direction, qu'il n'y a pas à dévier ou à se questionner parce que nous sommes dans ce qui est vrai.

Quelque part, la vérité rassure et nous donne de quoi avancer sans trop nous tourmenter. C'est un guide qui nous permet d'être fidèle à nous-mêmes et authentique dans toutes les décisions que nous prenons.

C'est vraiment ce que je veux, c'est véritablement là que je dois être.

On peut l'observer avec un choix d'étude spécifique : je suis bon en mathématiques et j'aime les calculs et la transmission, alors pourquoi ne pas enseigner cette matière ?

Les faits sont véridiques et justes, on part dans une direction qui nous convient. Voilà donc le chemin de notre vérité professionnelle.

Être vrai donne à chacun une ligne directrice dans la vie. La vérité -contraire au mensonge- promet de ne pas partir dans des extrêmes comportementaux ou langagiers.

Si je dis la vérité, alors personne ne peut me contredire, je suis juste et honnête, rien ne peut aller contre moi.

Se comporter justement est un choix de sécurité parce qu'au final, nous savons que cela aura été juste. C'est donc avec plus de légèreté que nous avançons alors dans la vie.

La vérité dépend de chacun

Une information trop peu mise en lumière : votre vérité n'est pas forcément celle de votre voisin.

On façonne notre vérité tout au long de notre vie à travers notre éducation, nos fréquentations et les expériences que nous traversons. Il existe bien entendu des principes scientifiques indiscutables, des actions qui en font découler d'autres et qui sont elles aussi indiscutables. Si vous décidez d'aller en eaux profondes sans savoir nager, vous vous noierez obligatoirement. Ici, il s'agit d'une vérité logique, on ne s'invente pas nageur lorsque nous n'avons pas appris comment nager.

Il est bon de nuancer ce que chacun peut dire afin de ne pas vous méprendre et de laisser la parole d'autrui être une parole prophétique ou bien parole d'évangile. Lorsque vous manquez de confiance en vous par exemple, c'est très facile de croire ce que dit quelqu'un d'autre parce que vous n'avez pas les repères nécessaires, le discernement adéquat pour analyser cette parole justement.

Reconnaître quelque chose de véritable, ça se travaille. La vérité est toujours naturelle, sensée et sincère. Plus vous serez sincère et authentique, plus vous toucherez ce qui est véritable. Alors vous serez à même de gérer une vérité douloureuse si elle vous apparaît, sans vous perdre à encaisser des heures ou des jours entiers de souffrance et de désillusion.

L'illusion est contraire à la vérité : c'est l'illusion d'avoir pensé quelque chose de véritable qui blesse.

La vérité et la sensibilité

Peu importe les manifestations que cela peut prendre, nous sommes tous sensibles. En public ou en privé, cela dépendra de chacun, mais la sensibilité est une composante de l'être humain. Nous vivons dans un monde sensible, physique et matériel. Toucher et percevoir les choses grâce à notre corps et nos émotions, façonne et élance notre sensibilité.

Être sensible à la lumière trop forte, est une forme de sensibilité.

Être sensible à la violence au cinéma, est une autre forme de sensibilité.

Tout comme être sensible face à quelqu'un en larmes en est encore une autre.

Ce sont des natures de sensibilité différentes, mais des sensibilités tout de même. Dès lors que nous sommes capables de ressentir quelque chose, nous sommes sensibles.

Si une vérité vous fait mal, c'est parce que vous y êtes sensible.

Votre sensibilité, c'est votre curseur face aux évènements qui se produisent dans votre vie. Elle n'est pas commune et similaire à tous. Chercher à se défaire de sa sensibilité revient à quitter sa vraie nature. Ce n'est pas utile de fuir ses émotions ou ses ressentis, ou même de les cacher parce qu'à un moment ou un autre, vous serez rattrapé par eux. Il est préférable de se laisser aller à leur passage tout en ayant connaissance que l'on est comme ça et que ça ne fait rien tant que nous ne nous en consumons pas.

Partir dans des extrêmes réactionnels -et y rester- est un signe de dérèglement émotionnel.

La sensibilité combustible, comme je l'appellerais ici, revient à être entièrement assiégé par ses ressentis. Toucher un extrême émotionnel et le faire perdurer ne peut rien vous apporter.

Un exemple simple : vous réalisez que votre ami de toujours vous trahie depuis des mois en parlant de vos projets privés à tout le monde. C'est alors l'hécatombe, le déluge, vous êtes incapable de vous relever et vous tombez dans une déprime lancinante.

Je me suis trompé sur son compte, comment ai-je pu être si aveugle ?

Avez-vous vu les signes précurseurs ? Votre ami était-il à l'écoute, encourageant, prêt à vous soutenir et à vous aider ? Ou au contraire, était-il plutôt nerveux, envieux, jaloux, réducteur et sabotant dans sa parole ? C'est à vous de tirer au clair l'historique qui a conduit à cet évènement. Bien sûr, prenez toujours le temps de composer avec vos émotions, peu importe la durée de celles-ci.

En définitive, oui, la vérité fait mal, mais à moindre mesure. Le réel mal provient de l'illusion dans laquelle on peut se projeter parfois. C'est avant tout le fait de s'illusionner et de tomber brutalement dans la réalité qui fait lourdement mal.

Notre niveau de sensibilité est lui aussi sujet à entretenir une vérité douloureuse. Car il en existe forcément, le tout est d'appréhender cela avec du temps, du courage et de la résilience.

Je terminerai en disant que toutes les vérités ne sont pas bonnes à dire à tout le monde. Nous ne sommes pas détenteurs des vérités universelles, occupons-nous de la nôtre et soyons ferme en celle-ci afin d'avancer le plus sereinement possible. Cela n'est pas utile de prendre la responsabilité d'une vérité qui ne sert pas la personne à qui on la divulgue.