Critique express :

Ces dix dernières années, on peut dire sans craindre d'exagérer que la licence "Batman", détenue par les studios Warner, était en refonte profonde, en recherche d'elle-même. Pour aller vraiment très vite, il y avait eu les film de T Burton et leur ton gothique, déjanté, baroque qui avaient offert au chevalier noir une place réellement enviable au box office. Ensuite, on avait laissé sa chance à J Schumacher, qui a livré deux épisodes qui avaient reçu un accueil plutôt frais et distant de la part de l'audience.

Dans les années 2000, l'objectif pour des studios pour la licence était de relancer l'intérêt pour un personnage iconique mais qui ne parvenait plus à susciter l'intérêt du grand public en salle. Il fallait aller à contre courant de la lecture grand public, pop, colorée et décalée qui avait été choisie jusqu'ici et si pour ce faire, Lars von Trier, l'opposé total du réalisateur de studio habitué aux commandes à gros budget, avait été considéré pour une relecture sombre, sinistre du personnage, ce fut finalement Chris Nolan, doté d'un profil de cinéaste indépendant à l'esthétique film noir/drame naturaliste, qui fut sélectionné.

10 ans plus tard, plus d'un milliard de recettes au box office et un impact sur le blockbuster moderne clairement obtenu, Warner continue son envie d'exploiter la licence avec Batman v Superman, très long film qui séduira autant qu'il divisera. Les studios ne savent plus tellement sur quel pied danser avec leur héros.

Entre temps, Marvel et ses productions familiales parviennent elles aussi à décrocher des milliards en salle presque à chaque grande sortie. L'esthétique colorée tout public et un univers en général cohérent font partie de la recette de ce succès.

Après le succès de JOKER, la warner comprend qu'il existe une possibilité de creuser un sillon alternatif que Marvel et Disney ne souhaiteront jamais emprunter, celui du film sombre, violent, introspectif.

Nous voici donc avec the Batman, dernière incarnation de la franchise en date, un film qui se présente comme étant non pas une "origin story" car virtuellement tout le monde sait qui est Bruce Wayne, mais une histoire dans laquelle on va le suivre en train de résoudre une de ses premières enquêtes à Gotham City.

Pour donner mon avis global du film, je dirai que c'est un film visuellement très réussi, mais qui a tendance à pâtir d'un certain manque de suspense et de rebondissement forts. Tout ce que Matt Reeves emprunte à David Fincher, surtout à Seven et Zodiac, il arrive assez peu à le pousser jusqu'au bout de ce qu'il pourrait être "pressé", avec découvertes choquantes et scènes de confrontation plus rudes.

J'ai même envie de dire que le réalisateur se laisse un peu porter par son propre dénouement en ayant selon moi tendance à l'exécuter d'une façon un peu mécanique, en se sentant en plein milieu d'un exercice imposé qui l'ennuie un peu, sans jamais trop chercher à le rendre surprenant.

Un film Batman parvient à tirer son épingle du jeu non seulement lorsque son adversaire principal a du charisme, mais aussi un plan suffisamment complexe et terrifiant pour poser un vrai défi à notre justicier. Il doit le pousser jusque dans ses retranchements, le pousser à se poser des questions sur lui-même et peut-être même lui faire froler la mort un certain nombre de fois. Ici, le Riddler ne rate pas tous ces objectifs mais ne parvient pas, selon moi, à vraiment générer un peu sérieuse sur la ville, ses habitants et Bruce Wayne une véritable vague d'angoisse.

Ce que je retiens de positif cependant de ce film, ce qui me donnera envie de le revoir, c'est ce qu'on peut appeller son "exécution formelle". En gros, la mise en place de l'univers, la façon dont l'atmosphère est construite. Le réalisateur parvient à nous faire oublier ce qu'il s'est fait sur Batman jusqu'ici et inventer une lecture nouvelle de ce qui nous était évident jusqu'ici.

Cependant je dois admettre que le film me laisse avec une légère sensation de vide ou du moins, d'incomplétude dans ce qu'il raconte. L'enquête pour traquer Riddler occupe une bonne partie du film et cela résulte sur une sensation d'un script qui tourne un peu en rond parfois, qui ne laisse pas son protagoniste nous faire respirer de temps en temps autre chose que l'air de la nuit de Gotham.

Pour conclure, the Batman est un film réussi sur le plan visuel et de la mise en scène, il crée une atmosphère unique et forte qui constitue pour moi sa principale valeur ajouté. Son principal travers me parait d'être un film un peu trop cloisonné en matière de décors et de défis à relever, pour un film qui dure presque trois heures il aurait été réellement appréciable de nous sortir un peu de Gotham au heures des chauves souris et de donner au Bruce Wayne, derrière le masque, un petit peu plus d'espace pour construire le nouveau visage, la nouvelle personnalité du mythe que l'on connait depuis longtemps.

Note : 12.5  /20