Fripouille et la Danse des Plumes

Fripouille marchait prudemment, les coussinets timides collant légèrement aux pavés encore tièdes de la journée. L’odeur des croissants grillés de la boulangerie voisine se mêlait à celle, plus âcre, des trottoirs parisiens. Tout allait bien, jusqu’à ce qu’un pigeon dodu atterrisse devant lui avec un plouf théâtral.

Puis deux autres. Puis dix. Puis… une horde à plumes, gloussante et picorante, surgie de nulle part comme un nuage de panique. Fripouille se figea, les moustaches frémissantes.

— Ils… ils vont m’encercler, Zazou, murmura-t-il, les yeux écarquillés. Zazou, allongé sur un rebord de fenêtre avec la désinvolture d’un chat qui a tout vu, leva un sourcil.

— Fripouille, ce sont des pigeons. Pas des dragons.

— Tu dis ça parce qu’ils te respectent ! Moi, ils me regardent comme un sandwich au thon !

Soudain, la foule s’écarta en un mouvement fluide, comme les vagues devant un navire. Un pigeon au plastron nacré, élégant comme un dandy du XIXe siècle, était perché sur le rebord du vieux manège rouillé. Il portait un nœud papillon bordeaux qui brillait sous les réverbères, et ses ailes s’agitaient comme une cape de super-héros.

— C’est… Pigok 2 ! chuchota Zazou, soudain intéressé. Le célèbre pigeon chanteur, roi des trottoirs et idole des pigeonneaux, star des battles de bec et des roucoulements en staccato.

Pigok 2 s’approcha de Fripouille d’un pas chaloupé, la tête haute, son plumage lissé comme celui d’un mannequin sur un podium.

— Et toi, mon mignon, comment tu t’appelles ?

— F… Fripouille… répondit-il d’une voix minuscule, ses moustaches frémissant.

Pigok 2 ouvrit grand ses ailes comme s’il venait d’entendre une révélation divine :

— Fripouille ?! Mais c’est un nom de star, ça ! Pourquoi tu me le balances comme si tu avais peur que je te colle la peste ?

D’un battement d’ailes assuré, il s’inclina :

— Relax, mon mignon. Je ne bec pas. Je suis là pour toi… et bientôt, tu ne pourras plus te passer de moi !

— Je… je veux pas danser ! bafouilla Fripouille en reculant, les pattes tremblantes.

— Ooooh que NOOON !s’exclama Pigok 2 en battant des ailes, sa voix résonnant comme un mélange de Fred Astaire et de pigeon des Halles.

Les autres pigeons suivaient en rang la chorégraphie de pigok, sur la danse des plumes en remuant leurs ailes.

🎶 "Si t’as peur des ailes, fais comme moi, C’est la danse des plumes, Qui danse sur les pavés de bitume !" (Un coup d’aile, et les réverbères semblaient clignoter au rythme de sa chanson.)

🎶 "On se secoue, un coup, deux coups, On roucoule tout doux… Un pas en avant, deux pas de côté, Un pas en arrière, deux pas de côté…" (Les pigeons en chœur firent un pas chassé, leurs plumes irisées capturant la lumière comme des paillettes.)

Fripouille, hypnotisé malgré lui, sentit ses pattes trembler moins. Pigok 2 tournoya autour de lui, ses ailes effleurant presque les moustaches du chaton.

🎶 "On se retourne, un pas sur la droite, Un pas sur la gauche… Et hop ! T’es une star, mon p’tit chat !"

— Mais… mais je sais pas danser ! gémit Fripouille, même si ses pattes commençaient à taper le rythme malgré lui.

— Personne ne SAIT danser, mon mignon, roucoula Pigok 2 en exécutant un moonwalk digne de Michael Jackson, version volatile. On danse, un point c’est tout !

Zazou, depuis son perchoir, observait la scène avec un mélange d’amusement et de fierté. Son protégé, celui qui avait peur des ombres et des bruits de klaxon, était en train de se dandiner au milieu d’une volée de pigeons, sous les yeux médusés d’une vieille dame qui venait de lâcher son sac de courses.

— Regardez-moi ce Fripouille ! gloussa une minette rousse assise sur un banc. On dirait qu’il est né pour ça !

Fripouille, les oreilles roses de gêne (et de plaisir), se laissa emporter. Un pas. Puis deux. Puis un saut maladroit qui fit rire les pigeons.

🎶 "Et un coup de queue, et un coup de patte, Fais pas gaffe, fais pas chat ! La vie c’est comme la pluie sur Paris, Ça glisse, ça rit, et puis ça part !" 🎶

Pigok 2, satisfait, battit des ailes en rythme, créant un petit tourbillon de plumes qui scintillaient comme des confettis sous les néons. Fripouille rit. . Pour la première fois depuis qu’il avait atterri dans les ruelles de Paris, il oublia d’avoir peur.

Mais alors que la fête battait son plein, un grondement sourd roula dans le ciel. Les nuages, lourds et gris, foncèrent sur la ville comme un rideau de scène.

— Oh non, pas la pluie ! s’écria Pigok 2, ses plumes se hérissant. Les plumes et l’eau, c’est comme l’huile et le vinaigre, ça fait une sauce, mais ça défrise !

D’un dernier battement d’ailes théâtral, il salua Fripouille et sa troupe de pigeons, avant de s’envoler vers un auvent de café. Seul un nœud papillon bordeaux tomba sur le trottoir, comme un gage d’amitié.

Fripouille, le ramassa en le regardant partir, trempé mais radieux, puis regarda Zazou.

— J’ai dansé, murmura-t-il, comme s’il n’en revenait pas lui-même.

— Et demain, tu danseras sous la pluie, ricana Zazou en lui tendant une feuille de journal pour s’abriter. Parce que Paris, mon p’tit, c’est une piste de danse géante. Même quand le ciel nous arrose.

Et tandis que les deux chats s’éloignaient, le rire de Fripouille se mêlait au clapotis des flaques… et, quelque part, au roucoulement triomphant de Pigok 2, déjà en train de composer sa prochaine chanson.

FIN

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✍️ Le 21/08/25

📸 Image seaart et Canva .

👩🏼‍🎨 Barbara Wonder